Une
seule fois dans ma vie j'ai eu l'occasion de faire un trajet dans un TGV (train
à grande vitesse).
Honnêtement,
j'ai d'abord été déçu.
Je ne
sais pas trop, je crois que je m'attendais à la grisante sensation qui s'empare
de moi quand je commence une descente abrupte dans les montagnes russes (le
Monstre, je crois) de la Ronde, ou je ne sais trop quel autre référent du
genre.
Pantoute.
Le
trajet se faisait en pleine campagne. Le paysage ne semblait défiler plus vite
qu'à l'habitude. Je me disais : « bon, on va finir par accélérer,
soyons patients! » Non!
C'était
jusqu'au moment où je me suis rendu à la salle des toilettes. Juste au-dessus
de la porte, une affiche lumineuse indiquait : Vitesse actuelle 297 km/h.
Ben
voyons...
Face à
la salle de bains, une porte vitrée donnait sur l'extérieur. C'est là que le
vertige m'a happé. Quand j'essayais de voir la végétation, par cette baie
vitrée qui se rendait au sol, je ne voyais qu'une ligne verte faite au crayon
gras. Je venais de prendre conscience de la vitesse réelle de l'engin qui nous
déplaçait d'un point A à un point B.
La
vie en TGV
Je
repense à ce moment et je transpose un brin.
Disons
que le jour de l'An est une gare. Le jour de mon anniversaire et la fête du
Travail aussi. Toutes ces dates qui sont des espèces de repères dans le temps
deviennent des gares. Entre les deux, on fait nos vies. Sans trop regarder au
sol. Sans jamais s'apercevoir que le rythme qu'on s'impose est hallucinant. Ce
n'est qu'une fois en gare qu'on se dit : « ben voyons que c'est déjà
le jour de l'An! Me semble qu'on vient de finir de fêter l'autre!"
En
gare depuis mars dernier?
Des
fois, je me dis que le train a fait un arrêt forcé autour du 15 mars dernier.
Depuis, il tente de reprendre sa route, tant bien que mal. On sent bien que la
mécanique n'est pas bien huilée. Ça avance, mais pas comme avant. Loin de là!
Depuis
des décennies, on définit notre bonheur en fonction de construire et/ou
d'obtenir ce qui nous semble essentiel pour être heureux. Bien sûr, cette quête
apporte son lot de désagréments. L'anxiété qui s'invite plus souvent qu'à son
tour depuis des décennies, l'épuisement professionnel qui fait que nous sommes
plusieurs à marcher le long d'une ligne toujours claire, mais dont on sait qu'il
ne faut pas la franchir. Il y a aussi cette course contre la montre entre le
lever et le coucher du corps.
Mais
tout ça, on se dit que ce sont les désagréments nécessaires à l'obtention de ce
dont on a besoin pour accéder au bonheur quotidien. Mais après tout, pourquoi
ne pas faire tous ces efforts si c'est pour mener à l'obtention de telle chose
dont je rêve?
Dit
autrement, il me semble qu'on associe notre bonheur (sans trop le nommer) à la
quête de ce que ça prendrait pour l'obtenir.
Là,
depuis mars, on ne sait plus trop. Le rythme est changé. Dans bien des cas, les
discussions à l'arrivée au travail, les fous rires des pauses et des dîners avec
les collègues, la socialisation créée par des rencontres professionnelles,
bref, tout ça est modifié.
On se retrouve
plus souvent qu'avant face à nous-mêmes.
Méchante
affaire nouvelle, ça!
Ce
matin, je vous partage cet état d'esprit. Simplement. Je constate. Un peu pour
voir si je suis le seul à penser comme ça. Je l'écris aussi pour donner une
forme à ma pensée.
Tout ça
à cause de vendredi dernier.
Notre
première sortie culturelle depuis mars dernier. Au Granada. Dans la magie
contagieuse des voix de Qu4rtz. Avec des amis chers, en plus.
Le genre
de soirée qui rappelle que l'art est essentiel. Vital. Qu'il provoque la
création d'un espace intérieur sain. Qu'il favorise la créativité. Qui titille
les émotions. Qu'il transporte ailleurs sans même bouger de sa chaise.
L'art
qui rappelle que le réel sera toujours plus fort que tout le virtuel réuni.
Que le bonheur,
si tant est qu'il existe au-delà des plaisirs ressentis, passe sûrement par le
vrai plutôt que l'apparence du vrai.
Clin
d'œil de la semaine
L'affaire
avec les spectacles, c'est qu'on en fait partie. Sauf, peut-être, quand on
décide de filmer le spectacle avec son cell au lieu de le vivre!