Je viens peut-être de semer un air de Céline Dion dans votre
esprit et si celui-ci prend la décision unilatérale de le jouer en boucle dans
votre tête, je m'en excuse...
Mais le titre de cette pièce m'inspire ce matin.
Le rêve américain n'était que ça, au fond. Un rêve.
En sommes-nous au réveil ?
C'est depuis le tournant des années 1950 que le rêve a été
énoncé sans relâche. Bien plus qu'énoncé, il a été vanté, louangé, présenté
comme une fin en soi.
« Quiconque travaille fort et agit comme un bon Américain
aura sa maison, son char, ses vacances, etc. »
À l'époque, ça voulait aussi dire qu'une charmante et toute
dévouée maman tenait maison, cultivait des fleurs et était fraîche et disposée
pour prendre bien soin de son mari qui travaillait fort et de ses enfants, leur
plus grand trésor.
Bon. Décortiquons ça un peu.
Le rêve idéologique
Le rêve est avant tout idéologique. Dans les faits, les
disparités ont toujours été là, mais l'aspect grisant d'un rêve possible
atténuait le tout.
Il faut dire que le pays est inspirant. Il est immense et
magnifique par ses reliefs et ses particularités géographiques spectaculaires.
C'est d'ailleurs peut-être pour ça qu'au final, une très
grande majorité d'Américains n'ont jamais effectué au moins un voyage à l'extérieur
de leurs frontières. Pourquoi aller ailleurs alors que le plus beau pays du
monde est là, près de chez nous ?
Cette dernière phrase peut faire sourire, mais elle est
issue du déploiement d'une idéologie qui est semée depuis des lunes chez nos
voisins du Sud.
Il y a bien des manières de contrôler un peuple. Bien sûr,
il y a la force et la puissance armée. Mais il y a aussi la plus vicieuse et
manipulatrice imposition d'idées reçues qu'on transmet de génération en
génération. Des idées devenues tellement concrètes dans la vie des Américains
qu'ils en viennent à croire qu'ils sont supérieurs à tout autre pays. Que le
citoyen américain fait partie d'une race supérieure. Ce n'est pas dit ainsi,
c'est plus discret, mais tellement constant que ça devient vicieux.
En fait, le principe de race supérieure dont je parle
s'exprime par la surabondance de drapeaux. La bien trop grande fierté exprimée.
Mais c'est justement sur cette fierté que Trump surf présentement. Le Make America great again est une
démonstration de cette trop grande fierté. Autant de calottes portées et dont
la palette fait ombrage à une vision claire de la réalité !
L'idéologie de l'ultra-fierté comme outil de manipulation
reçoit de l'aide par les temps qui courent : diminution de l'information
vérifiée, minimisation du rôle de l'éducation, bannissement de livres traitant
de toutes sortes de diversité, manipulation outrancière des algorithmes, bref,
c'est une puissante mise en scène.
Et ce que Trump et sa troupe de milliardaires devenus
abrutis souhaitent, c'est que les mesures s'installent vite et fort. Ne pas
laisser le temps au peuple de se prendre en main.
C'est leur souhait. Revenir dans l'histoire. Retourner la
femme à ses fourneaux. Bannir les avortements. Ramener le pouvoir décisionnel
sur les épaules puissantes du mâle. Bref, se servir à outrance de la nostalgie
qui a cette faculté de filtrer les choses pour ne garder que le beau, à tel
point qu'on en arrive à croire que « c'était donc le bon temps ! »
Comme pour tout rêve, c'est endormi qu'on se laisse avoir.
Pour faire une image, il m'est arrivé de me réveiller au petit
matin, amèrement déçu que ce dont je venais de rêver ne fût qu'un rêve...
Chez nos voisins du Sud, je crois que le réveil est en train
de se faire. Je veux y croire.
Un réveil lent et non uniforme parmi la population, mais je
m'oblige à croire qu'il est en train de se faire quand même.
Le réveil qui déboulonnera des vérités qui ne sont que de
fausses prétentions du type de : quiconque travaille fort et agit comme un bon
Américain vivra le rêve américain. Ou encore : nous sommes tous nés égaux. Que
le drapeau constitue une cape d'invincibilité qu'on devrait porter en tout
temps. Que les autres pays sont à la remorque des États-Unis et que, en
passant, le reste du monde rêve de faire partie du rêve américain...
S'ils savaient !
L'hyper-fierté tue la logique, l'empathie, l'ouverture. Tout
comme la philosophie selon laquelle la liberté s'exprime par le gun qu'on tient
à la ceinture.
Le rêve n'a toujours été qu'un rêve. Un rêve qui tourne au
cauchemar, en incluant, cette fois, les voisins immédiats, bien sûr, mais
l'ensemble du voisinage planétaire.
Maux de tête garantis au réveil complet.
Mais je veux croire au réveil quand même. Une bonne partie
de mon espoir y réside.
Clin d'œil de la
semaine
Trump veut que nous fassions partie de sa
famille comme 51e état... Comme il est sagement dit, on ne choisit pas la famille
dans laquelle on naît, mais on peut choisir nos amis, par exemple... M. Trump, je
préfère l'amitié. Celle qui se mérite.