La période
estivale est propice à plusieurs activités que l'on fait moins durant l'année.
Les vacances sont aussi favorables à la pratique d'activités que l'on néglige souvent.
Parmi les choses que l'on devrait faire plus, il y a la lecture. Lire est une
activité essentielle à la nourriture de l'âme et nous permet de nous faire une
belle tête. Trop peu de gens lisent même s'ils aiment les histoires. Plongée
dans le monde de la littérature.
L'art du roman
Jean-Paul
Sartre a écrit que : L'écrivain a choisi de dévoiler le monde et
singulièrement l'homme aux autres hommes pour que ceux-ci prennent en face de
l'objet mis à nu leur entière responsabilité. La fonction de l'écrivain est de
faire en sorte que nul ne puisse ignorer le monde et que nul ne puisse se dire innocent »
(situations II - tiré du texte d'opinion d'Éric Corneillier « Au cœur de
l'été, la guerre... 1914-2014 dans Le
Devoir, samedi 2 août 2014 p.B4).
Ce qui fait
la force d'un romancier c'est sa capacité à aller au fond des choses par le
biais des points de vue de ses personnages. C'est pourquoi comme l'écrit Éric
Corneillier : « l'art du roman, le vrai, ne relève pas d'une
technique du divertissement. Il relève plutôt d'un approfondissement de notre
compréhension de l'existence dans ses multiples déclinaisons possibles. » (Le Devoir samedi, 2 août 2014 p. B4). En
fait, la force de la littérature c'est qu'elle nous raconte des histoires de
vie. Des vies possibles d'autrui ou encore des tranches de nos propres vies.
Vie et
littérature : histoire de vies...
La vie est
cependant encore plus riche que la littérature. Le point de vue des uns et des
autres sur ce que nous vivons collectivement est encore plus romancé qu'un
roman. Nos histoires de vie personnelle fondent notre compréhension au monde et
notre rapport aux autres. Plus une personne est soumise à des histoires de vies,
plus elle sera susceptible d'adopter des points de vue nuancés ou faire preuve
d'une plus grande ouverture aux histoires des vies autres que la nôtre. La
littérature et le roman nous racontent des histoires qui aident à une meilleure
compréhension du monde et comme le disait si bien Sartre de façon à ce que
personne ne puisse se dire ignorant du monde dans lequel nous vivons...
Les
Jacarandas de Téhéran
L'actualité
donne prise à de nombreuses histoires d'horreur. Nous n'avons qu'à penser au
sort réservé aux Palestiniens par l'État d'Israël ces jours-ci pour nous en
convaincre. Si tous les dirigeants de l'État d'Israël lisaient le roman de l'Iranienne
Sahar Delijani « Les Jacarandas de
Téhéran », ils pourraient mieux comprendre les espoirs des musulmans déçus
par des révolutions détournées au profit des mollahs au mépris de leurs
libertés. Se mettre dans les chaussures de l'Autre avant de porter un jugement
comme le répétait souvent mon grand-père est une bonne façon de se libérer de
ses préjugés et de ses démons. Les histoires de vies de ces Iraniennes et Iraniens
persécutés par l'État iranien dans la version que nous donnent les personnages mis
en scène par Délijani a de quoi faire réfléchir quiconque revendique un peu
d'humanité.
Lire un tel roman
avec en filigrane la grave crise palestinienne et des crimes commis par l'État
d'Israël contre des civils palestiniens, femmes et enfants, a de quoi remuer
nos sentiments et nous amener à être critique de la position de notre
gouvernement quant à la question de la Palestine et de l'État juif. Voilà un
bel exemple qui lie la littérature à notre vie actuelle.
Notre-Dame du Nil
Ce qui
est vrai pour le roman de Delijani est aussi vrai pour le roman de Scholastique
Mukasonga : « Notre dame du Nil »
qui raconte l'histoire de jeunes filles africaines que l'on prépare à leur vie
de femme soumise et où l'on sent bien poindre le génocide à venir au Rwanda. L'histoire de ce roman traite d'un lycée perché
sur la crête Congo-Nil au Rwanda et réunit des jeunes filles dont les familles
espèrent qu'elles parviendront vierges au mariage négocié pour elles dans
l'intérêt du lignage. Prélude au génocide, le huis clos, où doivent vivre des
lycéennes encerclées par les nervis du pouvoir hutu, fonctionne comme un
microcosme existentiel. De quoi faire réfléchir au sort de ces jeunes Africaines
enlevées par Boko Haram au Cameroun.
C'est pour dire que la littérature est plus
vraie que nature et elle offre un potentiel à celle ou celui qui s'y prête à
mieux comprendre et mieux réfléchir le monde dans lequel nous vivons. J'ai pris
des exemples lointains, mais j'aurais pu aussi parler de choses plus près de
nous comme le roman de Claudine Bourbonnais Métis
Beach qui parle d'Exil, de riches et de pauvres et de notre rapport à
l'Amérique et à l'argent.
Se raconter grâce à la littérature...
La littérature nourrit parce qu'elle nous
raconte des histoires de vies... En fait elle raconte l'histoire de nos vies.
Notre vie est donc une histoire à raconter et à partager. C'est pourquoi il est
important de lire et de s'adonner à la littérature et de pouvoir se faire
raconter notre vie en histoires... Pensez-y lorsque vous ouvrirez votre prochain
roman et demandez-vous de quelle vie parle ce récit. Il est à parier que vous y
retrouverez la vôtre...