Montréal la mal-aimée. Ville de corruption et de désordre. Montréal la fière et la prétentieuse. Montréal la ville de tous les problèmes. Problèmes de violence, d'immigration, de congestion routière, de dysfonctionnements politiques.
Montréal a bien mauvaise presse par les temps qui courent alors que celle-ci est notre porte-drapeau international, notre porte d'entrée sur le monde. Pourtant, elle est laissée à elle-même et on sent peu de sympathies pour elle en dehors de ses frontières. Elle est abandonnée à elle-même et elle est bien seule. Montréal mérite-t-elle mieux?
Montréalais de cœur et Sherbrookois d'adoption
Je suis un Montréalais d'origine et de cœur. Bien sûr, je suis surtout aujourd'hui un Sherbrookois d'adoption, mais au fond de moi, Montréal demeure toujours ma ville, mon premier chez moi.
Je pensais à cela il y a quelques semaines, alors que j'ai passé le weekend à Montréal, histoire d'aller faire un peu de lèche-vitrine, de marcher la ville et d'en profiter pour aller voir des spectacles de danse et de théâtre qui ne seront pas disponibles chez-nous. Le dernier weekend fut splendide. Je n'ai pas été déçu d'être à Montréal. Pourtant, cette belle et grande Cité de notre Québec est fort mal en point et jamais son rayonnement et sa crédibilité n'auront été aussi entachés. Nous les gens de l'Estrie avons aussi une part à faire pour assurer le succès et le rayonnement de notre capitale culturelle et économique. Le succès et le rayonnement de Montréal sont à bien des égards ceux du Québec.
Faits et chiffres sur Montréal
La ville de Montréal c'est 0,04 % de la superficie du territoire du Québec soit 498,2 km carrés. Sa population c'est le quart de la population du Québec avec 1 906 811 habitants en 2009. Au cours des prochaines décennies, la ville de Montréal connaitra une croissance démographique inférieure à celle du Québec avec un taux de 12,1 % entre 2006 et 2031 alors que le même taux prévu pour l'ensemble du Québec s'établira à 15,8 %. Comme partout ailleurs, Montréal verra sa population vieillir et elle connaitra un double phénomène typique à Montréal soit un solde migratoire international positif (Montréal accueille beaucoup d'immigrants) et d'un solde migratoire interrégional négatif (les gens migrent vers les banlieues).
Sur le plan du développement économique et de l'emploi, Montréal se tire fort bien d'affaire avec un PIB qui compte pour le tiers de celui du Québec (35,1 % du PIB du Québec) et la productivité par emploi est supérieure à Montréal par rapport à celle du Québec. Le PIB par emploi s'élevait en 2006 à 81 474 $ à Montréal contre 77 678 $ pour l'ensemble du Québec. Sur le plan de l'emploi, les emplois à Montréal représentent près du quart de tous les emplois au Québec, mais, en même temps, on retrouve à Montréal un taux de chômage plus élevé que la moyenne québécoise avec 11,1 % contre 8,5 % pour le Québec.
Montréal possède de nombreux atouts, une base économique diversifiée, une intense activité touristique et culturelle et un rôle de pôle majeur de l'identité culturelle québécoise avec un rayonnement international que nulle autre ville du Québec ne peut espérer, même si en cette matière des progrès substantiels ont été réalisés par la ville de Québec depuis son 400e.
En fait, Montréal se doit pour le progrès économique, social et culturel du Québec d'être la locomotive du Québec. Sans le dynamisme et les atouts que possède Montréal, le Québec ne peut être celui qui brille et rayonne à l'étranger. Montréal est de loin notre meilleur atout. Pourquoi ces faits simples ne sont-ils pas reconnus et intégrés? Qu'est-ce qui fait que nous soyons si modestes à faire valoir les qualités de Montréal ici comme ailleurs et à reconnaître son rôle de métropole identitaire du Québec?
Montréal, le poumon et le cœur du Québec
On a beau vouloir jouer à l'autruche et se mettre la tête dans le sable, mais le succès de Montréal est intimement lié à celui du Québec. C'est grâce à l'intégration harmonieuse des nouveaux arrivants à Montréal que le Québec pourra passer au travers de la problématique du vieillissement de la population. C'est aussi le rayonnement international de Montréal qui est notre meilleure carte de visite pour attirer des investisseurs et des immigrants chez nous. C'est notre capacité de défendre et de promouvoir la langue et la culture française dans un milieu multiculturel qui permettra au Québécois d'assurer la pérennité de leur identité. C'est la production culturelle et la créativité montréalaise qui assurera le rayonnement du Québec ici comme ailleurs. C'est notre capacité d'intégrer harmonieusement les nouveaux arrivants à une société de langue et de culture française qui sera garante d'une société dotée d'une véritable cohésion sociale. Bref, ainsi va Montréal, ainsi ira le Québec.
Cesser d'opposer Montréal au Québec
Loin de moi de nier l'apport des autres régions et villes du Québec à notre vie commune. Il faut cependant cesser d'opposer Montréal aux régions, aux autres villes du Québec. Il importe que nous soyons capables de reconnaître collectivement que Montréal est un important outil de développement pour tout le Québec. Pour cela, il faut cesser de nous diviser entre régions et villes sur la base de sentiments chauvins d'une autre époque. Pour sa part, les Montréalais et leur porte-parole doivent dorénavant faire l'effort de ne pas se voir comme le nombril du monde et d'accepter que d'autres bonnes idées et d'autres initiatives que celles de la grande ville peuvent mériter leur attention. Les Montréalais doivent s'ouvrir aux autres régions et villes du Québec alors que le Québec tout entier doit exiger de ses politiciens et de ses décideurs que l'on accorde à Montréal non pas un traitement de faveur, mais des politiques dignes de celles que méritent la capitale économique et culturelle de la seule société francophone d'Amérique du Nord. Montréal a besoin de l'appui des gens de toutes les régions du Québec. Sommes-nous prêts à lui prêter notre concours?
Comme Robert Charlebois, chantons : « Je reviendrai à Montréal... »
Tweet de la semaine
« La trompette bouchée ou la renommée enrouée » dans Bernard Pivot, Les tweets sont des chats, Paris, Albin Michel, 2013, p.92.
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