Enfant, j'étais en contact, comme vous toutes et tous, avec
des contes de fées, de chevaliers, de châteaux où il y avait toujours un roi,
bon ou méchant, et, quelque part, le cheval noir du méchant et le cheval blanc du
sauveur.
La vie de château était réservée à une élite. Les citoyens
semblaient voir en ces personnages princiers et royaux une catégorie de gens
sélectionnés par je-ne-sais-trop-qui et habités dès leur naissance par une
flamme spéciale qui donne courage, intelligence et jugement.
La vie de château, c'était une vie souvent cloîtrée dans le
luxe d'un bâtiment orgueilleusement orné de richesses. Je réalise aujourd'hui
que je lisais les histoires de château en les imaginant avec mes repères de vie
moderne : je ne réalisais pas vraiment qu'il n'y avait ni électricité ni
eau courante et que l'humidité devait habiter les lieux de façon permanente.
Vie de château, disons-nous...
De roi en prince et de prince à roi, les membres des
familles se léguaient le pouvoir politique sur leur pays. Comme une bonne
lignée d'animaux dits de race pure !
Je repensais à tout ça cette semaine en voyant naviguer le
président désigné Donald Trump. Il a invité Justin Trudeau à sa table. Il s'est
présenté à la réouverture officielle de la basilique Notre-Dame-de-Paris, en
France, et il a déjà reçu d'autres dignitaires politiques. Il est frappant de
constater que lorsque Trump serre la main de quelqu'un, son bras est toujours
placé bien plus haut que celui de l'autre personne. Une forme de domination. Il
sent rarement le besoin de regarder l'autre dans les yeux. Je trouve qu'il agit
comme un roi tout-puissant.
Cette semaine, quelqu'un me disait : « Au fond, Trump
est une bonne personne. On voit bien qu'il ne ressemble pas à ce qu'il
projetait lors de la campagne électorale ! »
C'est vrai qu'il ressemble peu au Trump agressif de la
campagne, mais il demeure le Trump qu'on a connu depuis 2015.
Depuis des années, il sème la peur par des menaces
incessantes envers et contre tous (ou presque). Il vient de réaliser une série
de nominations aux postes clés de son équipe présidentielle. Le point commun
entre elles et eux ? Une
loyauté sans faute envers sa personne. Ce critère bat tous les autres, incluant
la compétence !
Il agit déjà comme s'il accordait aux autres dirigeants du
monde le privilège de le voir. Lui. Le président.
Que dis-je, le président : le roi !
Dans notre système démocratique, il s'approche de plus en
plus de la définition pratique d'un roi. D'un dictateur.
Entouré de gens qui le vénèrent, bien en contrôle de la
fameuse Cour suprême, aux commandes à la Chambre des représentants et au Sénat,
il a pas mal tout ce qu'il faut pour faire ce qu'il veut, au moins pour les
deux prochaines années. Les élections de mi-mandat pourraient faire basculer la
Chambre des représentants en 2026.
Autre comportement royal : cette habitude de gracier
des gens reconnus coupables de fautes graves. Il l'a fait lors de son premier
mandat et le refera allègrement dans le deuxième.
Cette simple notion qu'un président puisse gracier qui il
veut pendant son mandat est ridicule et vient disqualifier tout le processus de
justice. J'imagine que la mesure n'a pas été adoptée en pensant qu'un jour, un
président aussi narcissique aboutirait dans le bureau ovale.
Mais c'est le cas.
Que le roi soit bon comme dans certains contes ou qu'il soit
méchant comme dans d'autres, un fait demeure, à mon point de vue :
centraliser autant de pouvoirs dans les mains d'une seule personne est
fondamentalement dangereux.
Le roi Trump sourit et sert des poignées de main
dominatrices. On sent bien, il tisse une toile. Une toile par laquelle il
essaiera de transcender le temps. Comment les États-Unis pourraient se priver
de sa royale personne pour un troisième mandat ?
Donner toutes les allumettes disponibles à un pyromane,
c'est dangereux. Quand ce pyromane s'assure que ses pompiers n'éteignent pas
les feux par loyauté pour lui, ça me semble pas mal plus dangereux.
Clin d'œil de la semaine
Le Roi
des habits, le Roi de la patate, le Roi de ci et de ça... même les commerces
semblent avoir abandonné la royauté !