La réalité est têtue. Souvent, elle dépasse la fiction. La politique québécoise et canadienne mériterait d'être l'objet d'une grande télésérie tellement elle est riche en rebondissements et en paradoxes. Parmi les images les plus fortes qui s'imposent à nous : il y a celle de la « Harperisation » du Canada. Exploration d'un concept...
La « Harperisation » du Canada : un concept à explorer!
Stephen Harper est premier ministre depuis une éternité déjà. Fidèle à ses convictions de réformiste, Harper a patiemment et avec une efficacité redoutable transformée le Canada de Trudeau et des libéraux qui l'avaient façonné pendant tout le vingtième siècle. Si le 20e siècle fut selon le mot célèbre du premier ministre libéral Wifrid Laurier celui du Canada, le 21e siècle sera celui de sa destruction par le réformiste conservateur Stephen Harper. C'est ce que j'appelle la « Harperisation » du Canada qui s'est manifestée en matière de politique étrangère, de nos institutions nationales, en matière d'environnement et finalement en matière culturelle.
Politique étrangère...
En selle depuis 2006, Stephen Harper a réussi à s'attaquer à toutes les institutions canadiennes qui sont pour lui des institutions libérales. Les politiques généreuses du Canada sur le plan international, son rôle de chien de garde de la démocratie et de la paix dans le monde, dans la tradition de l'ex-premier ministre libéral et Prix Nobel de la paix, Lester B Pearson, sont relégués aux oubliettes. Harper croit plutôt à une vocation plus guerrière pour notre politique étrangère et s'aligne sur celle de notre puissant voisin américain. Parfois, le Canada se fait encore plus vindicatif que les États-Unis d'Amérique notamment par notre nouvelle politique d'aveuglement à l'égard de l'État d'Israël. Fini les casques bleu place aux missiles et aux avions de chasse. L'Antarctique devient aussi un enjeu guerrier. Nous sommes loin de la politique critique du Canada à l'égard de la politique étrangère américaine, de la reconnaissance de la Chine de Mao et de Cuba de Fidel Castro.
Institutions nationales
La « Harperisation » du Canada se traduit aussi par des politiques de saccage de nos institutions nationales qui ont longtemps fait la fierté des Canadiennes et des Canadiens. Pensons aux coupes budgétaires dans Statistiques Canada, l'attitude du gouvernement Harper à l'égard de la Chambre des communes et du Sénat qui témoignent de son mépris profond pour les institutions démocratiques de notre pays. Ces dernières semaines, le premier ministre Harper s'est surpassé en s'attaquant à la crédibilité de la juge en chef de la Cour suprême du Canada, Beverley McLachlin dans la foulée de la mauvaise nomination du juge Nadon. Non seulement la « Harperisation » du Canada se traduit-elle par un mépris ouvertement affiché pour les institutions qui fondent ce pays, mais également à l'égard des provinces et territoires du Canada. Jamais monsieur Harper ne veut rencontrer sauf un à un les premiers ministres des provinces et des territoires du Canada. Il gouverne comme un monarque absolu.
Pas étonnant que cet homme voue une si grande admiration aux traditions monarchiques, à la reine Élizabeth II et à la famille royale. Il n'a pas hésité à rebaptiser nos armées et y introduisant, sauf pour notre armée de terre, le qualificatif de Royale. Notre monnaie, rassurez-vous, est aussi royale. La reine a bon dos au pays des rêves de monsieur Harper!
L'environnement
Savons-nous que notre gouvernement canadien est parmi les rares de la planète à nier les changements climatiques? Eh oui, vous avez bien lu. Nous le pays de l'entente de Montréal après Kyoto, nous le pays sensible à un autre temps au sort des plus pauvres et des déshérités de la terre, rappelons-nous la générosité d'un Pierre Elliot Trudeau et d'un Paul Martin envers le continent africain, nous sommes parmi les pires voyous de la terre en matière de politique énergétique et du non-respect des ententes internationales en matière d'environnement. Il s'agit, il faut le rappeler, de la vie de nos enfants et de nos petits-enfants. Il semble que dans la vision harperienne du monde seule la santé financière du Canada mérite son attention. Pas important pour lui que notre pays survive. Je ne vous parle même pas de ses opinions pour les peuples de la terre qui seront plus durement affectés par les changements climatiques. Il n'en a rien à cirer...
Culture et Radio-Canada
Monsieur Harper nous avait habitués à ses coupes dans la culture. L'attitude du gouvernement Harper envers la Société Radio-Canada/CBC est encore plus « parlante » quant à sa vision du Canada. Pour les tenants de la « Harperisation » du monde, que les Canadiennes et les Canadiens puissent compter sur un puissant média pour échanger entre eux et se reconnaître comme Canadiens n'est pas important. Seuls les coûts le sont. L'inqualifiable silence du gouvernement Harper sur le démantèlement de Radio-Canada/CBC petit à petit par des compressions budgétaires récurrentes et qui reviennent comme le balancier d'un métronome nous en dit long sur ses opinions sur cette institution. Là aussi on ne dénote que du mépris. Je salue l'initiative du syndicat des employés de Radio-Canada qui dans une large coalition cherche à mobiliser la population contre la disparition de cette importante institution dans nos vies. Ici en Estrie, j'avais, avec Pierre Tousignant, Jean Lacharité et Yves Bellavance, lancé l'idée d'une coalition large des Amis de Radio-Canada. L'initiative n'aura pas vécu. Je salue celles et ceux qui cherchent ces jours-ci à remobiliser autour de cet enjeu dans notre région et je les assure de mon appui.
Néanmoins, la seule issue possible pour redonner au Canada ses lettres de noblesse et d'en faire un pays digne de ce nom c'est de battre le gouvernement Harper dès que nous en aurons l'occasion et d'éradiquer de notre pays celles et ceux qui veulent le « Harperiser ». Mobilisons-nous contre la « Harperisation » du Canada!