Le chiffre chanceux le plus reconnu? Le 7 ?
Je ne sais pas trop. Mais je sais que ce devrait être le 9. Ou plutôt, le neuf.
La valeur de ce qu'on possède se mesure au neuf. Ce qui est neuf est porteur de sens dans notre société de consommation. On achète sa première maison en se disant qu'un jour, on en aura une vraie. Une neuve. On achète une voiture usagée en prenant soin de spécifier que, grâce à un curé ou à une personne âgée, ladite voiture n'a jamais servi et qu'elle est comme neuve. Parce qu'à défaut d'être neuve, la comme neuve devient acceptable. En attendant la neuve...
Bref, si j'ai à choisir le chiffre qui définit le mieux mon succès entre un et dix, il convient que j'y aille pour le neuf.
Le neuf, c'est un vernis qui donne l'impression que le bois est meilleur qu'il ne l'est vraiment.
Mais il y a plus! Il faut savoir que le concept ne s'applique plus uniquement aux produits. Vous savez ce qui est l'ultime, le nec plus ultra, le wow inconditionnel, dans cette même société de surconsommation? Ce qui peut battre le concept de produit neuf? Hé bien, sachez que le rêve, le fantasme, c'est de devenir un client neuf!
J'ai compris que quand on devient un client usagé, on n'a plus de réelle valeur.
À part quelques cartes de fidélisation à gauche et à droite, la tendance est au client neuf. Un client neuf vaut quelque chose. L'autre? Ben...qu'il paye!
C'est surtout vrai dans les télécommunications. Il y a de quoi gonfler le torse de fierté quand on magasine un forfait télé, Internet ou cellulaire. Les tapis rouges se déroulent, chacun créant un écran de fumée par-dessus celui du voisin.
Allez, avouez! On est entre nous... On s'est tous dit, un jour ou l'autre : «Ha, oui! Ils me veulent! » On s'est alors sentis investis d'un pouvoir incroyable. Subitement, on était armés d'une épée de lumière et on était prêts à se faire un chemin glorieux parmi des dizaines d'offres alléchantes. « Ils me veulent! », se répétait-on! Quelle sensation, non?
Une sensation, intense, mais courte. Comme d'autres, d'ailleurs!
Dès que le contrat est signé, c'est terminé. Et la frustration prend lentement la place. On est encore attaqués par toutes ces publicités qui offrent des forfaits magiques aux nouveaux clients. Mais voilà, on n'est plus des clients neufs. On est devenus de vieux clients. L'épée s'est éteinte... Et on regarde nos factures en se disant qu'on paye beaucoup trop. Et si on compare trop, un de ces quatre, on redevient un client neuf, mais ailleurs. Chez un autre fournisseur. Qui va nous traiter en usagé dès que le contrat sera signé.
Deux choix s'offrent alors: changer aux années et redevenir toujours un client neuf. Ou bien se regarder dans le miroir et se convaincre que, finalement, on est presque comme neuf!
Clin d'œil de la semaine
John Baird, ancien ministre de l'Environnement, s'occupera maintenant de l'environnement ... mais à la Chambre des communes! Ses collègues vont enfin comprendre et sentir ce qu'est l'effet de serre!