Scranton, Pennsylvanie, un lieu familier pour moi. Quand je
me rends en Floride, c'est toujours dans cette ville que je m'arrête au premier
jour de mon périple routier pour me rendre en Floride. Ville ouvrière, une
vieille gare transformée en hôtel et Centre de congrès, Scranton ressemble à
bien des petites villes américaines. C'est là qu'est né le nouveau président
élu des États-Unis d'Amérique, Joseph Biden, dit Joe Biden. Joe Biden a été
déclaré élu par CNN samedi dernier à 11 h. Partout dans les grandes villes
américaines dont Washington, New York et Philadelphie, des foules se sont
rassemblées spontanément pour célébrer la défaite de Donald J. Trump, le 45e président
des États-Unis que personne n'oubliera de sitôt. D'ailleurs, le président en
fonction refuse de reconnaître la victoire de son adversaire. Il a décidé de
défier le choix démocratique et va tenter de se maintenir au pouvoir par des
recours légaux et espère-t-il l'intervention de ses amis tout juste nommés à la
Cour Suprême des États-Unis. Chemin hasardeux que celui-là pour le président
Trump et qui le mènera se fracasser sur les récifs de la réalité. Réflexion sur
l'impact de l'élection de Joseph Joe Biden et de sa colistière Kamala Harris
pour le Canada et pour le reste du monde...
Retour aux sources de la démocratie
Samedi soir, à Wilmington au Delaware dans un stationnement,
Joseph R. Biden élu 46e président des États-Unis d'Amérique,
accompagné de sa colistière Kamala Harris, a livré un inspirant discours de
victoire. Faisant appel à l'unité et aux défis que pose à l'Amérique la double
crise économique et sanitaire, Joe Biden a tendu la main à celles et ceux qui
ont voté pour son adversaire en leur demandant de lui donner une chance et de
réapprendre à s'entendre et s'écouter les uns et les autres.
Un discours assez
traditionnel pour un candidat à la présidence au sortir d'une course chaudement
disputée et ponctuée de furieuses attaques de part et d'autre. Ce qui est
remarquable c'est que ce discours faisait du bien. Pas d'injures, pas de
calomnies, pas de mensonges, un discours un peu ennuyeux à la limite, mais qui
faisait du bien à entendre pour toutes celles et tous ceux qui croient à
l'importance de la démocratie.
Avec Joe Biden, nous réapprendrons les vertus des discours
sobres, véridiques, dénués d'injures et de quolibets envers les adversaires.
Pas de tweets durant la nuit, pas d'esclandres et une véritable préoccupation
pour les problèmes nombreux des gens qui vivent aux États-Unis. Fini les crises
d'égo et le narcissisme trumpien. Place au retour à la normale avec Joe Biden. Ça
fait du bien...
L'impact pour le Québec et le Canada
Pour nous, l'élection du démocrate Joe Biden se voudra un
retour à la normale dans nos relations. Cela ne fera pas disparaître nos
intérêts divergents dans des dossiers comme le bois d'œuvre, mais une chose
certaine, les faux motifs de sécurité nationale ne seront pas évoqués comme l'a
fait l'administration Trump à propos de l'acier et de l'aluminium. Ça signifie aussi que le nouvel accord de libre-échange
entre nos deux pays sera mis en vigueur avec respect pour ce qu'il contient.
Bien sûr, les démocrates de Joe Biden seront protectionnistes. Historiquement,
les démocrates ont toujours été plus protectionnistes que les républicains,
mais les clauses imposées par le Canada dans ses négociations avec l'équipe de
Trump sur la protection de l'environnement et des droits des travailleurs
viendront faciliter les choses avec la base démocrate.
On peut aussi s'attendre à des gains nets pour le Canada sur
le plan de ses efforts pour la lutte aux changements climatiques avec toutes
les conséquences positives et négatives. Cela signifie que si Joe Biden tient
parole, il mettra fin au projet Keystone XL, ce qui mécontentera l'Alberta
et les provinces canadiennes productrices d'énergies fossiles. Cela signifie
aussi que le pouvoir fédéral ne fera plus la guerre à l'État de la Californie
pour le marché du carbone auquel le Québec est étroitement associé.
Sur le plan de la pandémie, l'arrivée prochaine de Joe Biden
va rassurer les Canadiens quant à l'existence chez notre voisin du sud d'une
réelle stratégie pour combattre le virus. Ce qui devra à terme faciliter la
réouverture de nos frontières communes et normaliser les relations que nous
avons avec les États-Unis en matière de déplacements. Ce sont les snowbirds
qui seront les plus heureux. Mais bon, ce n'est pas demain la veille. Biden
arrivera en poste le 20 janvier et d'ici là on ne peut s'attendre à de
vigoureuses actions de Trump vis-à-vis de ce virus. La seule bonne nouvelle
c'est qu'un vaccin sera bientôt disponible. En attendant, la pandémie fait rage
aux États-Unis atteignant des nombres records de personnes atteintes et de
décès.
Enfin, en matière de politique étrangère, le retour au
multilatéralisme de notre voisin devra renforcer le rôle traditionnel du Canada
dans le monde. Le Canada pourrait être un véhicule efficace pour cautionner le
nouveau régime démocrate de Joe Biden auprès de la communauté internationale.
Le Canada redeviendra le pays meilleur ami des États-Unis. Ce qui pourrait
amener du vent dans les voiles de notre petite goélette qui navigue sur des
mers agitées depuis bientôt 3 ans.
Joe Biden ─ Président
Bien sûr, Joe Biden ne sera pas en poste avant le 20 janvier
prochain. D'ici là, Trump et les membres de son équipe de jusqu'au-boutiste
mettront à rude épreuve le processus de sélection des délégués pour certifier
le vote dans chaque état. Dès lundi dernier, Trump a lancé sa guérilla
judiciaire contre le résultat des élections. Il persiste à dire que l'élection
lui a été volée par la plus vaste opération frauduleuse de manipulation de votes
jamais vu dans l'histoire des démocraties. J'ai écrit cette chronique le
dimanche 8 novembre. Peut-être que depuis ce temps, Trump aura
retrouvé la raison et concédé l'élection, mais j'en doute fortement.
Cette guérilla judiciaire autour des résultats de l'élection
pourrait avoir des conséquences pour nous au Québec et au Canada si tout cela
tourne en violence voire en une espèce de guerre civile. La violence au sud de
nos frontières pourrait avoir des impacts chez nous notamment en matière de nos
échanges commerciaux et de l'ouverture de nos frontières. Il ne faut pas crier
au loup, mais il faut se garder une bonne dose de réalisme dans l'appréciation
de la situation politique aux États-Unis. Les États-Unis demeurent plus divisés
que jamais. Une guerre culturelle est en cours. Les tensions raciales sont à un
niveau inégalé depuis les années 60 où le combat pour les droits civiques
faisait rage. La pandémie tue des milliers d'Américains et les partis
politiques se campent sur leurs positions. Il faut féliciter les Américains d'avoir
élu un homme aussi expérimenté que Joe Biden pour tenter de dénouer les
nombreuses impasses dans la vie politique américaine. S'il y a quelqu'un qui
peut réussir ce défi quasi impossible, c'est bien le fils de Scranton, Pennsylvanie...