Enfin! Nous y sommes. Dans moins d'une semaine, nous irons
aux urnes nous choisir un nouveau gouvernement. La campagne a été palpitante.
Elle fut la plus longue de l'histoire du Canada, mais aussi l'une des plus
intéressantes. Nous devons maintenant choisir pour lequel des partis ou des chefs
nous allons voter.
Pendant cette lutte électorale de tous les instants entre
les différents partis, on a eu droit à de nombreux sondages et on a beaucoup
parlé de vote stratégique. Si ces questions étaient si importantes, c'est que
la vraie question de cette élection est relative à la volonté fortement
majoritaire des Québécoises et des Québécois de se débarrasser du gouvernement
conservateur de Stephen Harper. La question de l'urne, la question que vous
vous poserez avant de faire votre marque sur le bulletin de vote est, quel est
le meilleur parti ou le meilleur candidat qui permettra de nous débarrasser du
gouvernement de Stephen Harper? Question simple, mais réponse complexe.
Cela se complique davantage par le fait élémentaire que la
question de l'urne au Canada n'est pas la même. Chez nos compatriotes du Canada
anglais, la question de l'urne est plutôt sur le meilleur véhicule de
changement. Le parti libéral de Trudeau ou le NPD de Tom Mulcair?
Quoi qu'il en soit, comme on le dit en politique, « le
jello semble pas mal pris ». Les choix sont faits, il ne reste qu'à les
faire connaître.
Se
débarrasser du gouvernement Harper
J'ai consacré de nombreuses chroniques dans Estrieplus à
dire tout le mal que je pensais du gouvernement Harper. J'y ai souvent dénoncé la
« harperisation du Canada ». J'ai déploré la politique étrangère
guerrière du Canada, les politiques antisociales du gouvernement de Stephen
Harper, le caractère voyou de ce gouvernement en matière d'environnement, son
parti pris pour une société de Loi et d'ordre au détriment d'un code criminel
faisant place à la réadaptation, le penchant du gouvernement réformiste de
Stephen Harper pour la monarchie et le mépris d'Harper pour la science, nos
institutions parlementaires et la Cour Suprême du Canada. La cause est entendue
depuis longtemps pour moi et j'ose espérer que cela est largement partagé par
mes compatriotes du Québec et du Canada. Battre Stephen Harper à tout prix est
donc la question de l'urne. Mais changer pour qui?
Le parti
libéral de Justin Trudeau
S'il est facile de s'entendre sur l'objectif, ce l'est moins
pour ce qui est de l'alternative. Au Québec, par exemple, nous avons tous en
mémoire l'héritage du Parti libéral du Canada. Un héritage qui est parsemé
d'attaques contre les droits du Québec comme nation. La Loi des mesures de
guerre de 1970, le rapatriement unilatéral de la Constitution contre la volonté
du Québec en 1982, le référendum de 1995 où le gouvernement du Canada n'a pas
respecté les règles de notre Assemblée nationale et la Loi sur la clarté.
Sur le plan économique, on ne peut oublier les coupes
sauvages de Paul Martin dans les transferts fédéraux aux provinces, coupes qui
jouent aujourd'hui un rôle majeur dans nos problèmes budgétaires et qui se
traduisent par le régime d'austérité du gouvernement du Québec. On ne peut
oublier facilement le problème du déséquilibre fiscal.
Il est vrai que le Parti libéral de Justin Trudeau est un
nouveau parti, a un nouveau leader, mais le discours entendu dans la présente
campagne électorale n'a pas fourni la preuve que le parti n'est pas le même qui
a bafoué les droits du Québec avec beaucoup d'arrogance. Par contre, Justin
Trudeau a mené une excellente campagne et il a mérité notre estime. De tous les
chefs en présence, c'est lui qui incarne le mieux le changement tant par ce
qu'il est que par ce qu'il propose. Justin Trudeau apparaît donc comme un choix
valable pour nous débarrasser du gouvernement Harper.
Le NPD de
Thomas Mulcair
Le Nouveau parti démocratique et son chef ont mené une
excellente campagne. Les propositions
du NPD sont nettement à la faveur du monde ordinaire, comme le disait Jack
Layton. Les engagements pris dans cette campagne en faveur des familles, des
travailleurs et des femmes sont à l'honneur du NPD qui propose un véritable
changement de paradigme aux Canadiennes et aux Canadiens.
Avec Tom Mulcair comme chef, le NPD a recentré son discours.
Le discours étonnant de Mulcair sur l'importance de l'atteinte de l'équilibre
budgétaire en est l'illustration la plus convaincante. D'autre part, le NPD n'a
jamais été appelé à former le gouvernement du Canada. Cela peut être attrayant
d'essayer du neuf pour les électeurs tannés des vieux partis bleus et rouges.
Où le bât blesse du point de vue québécois, c'est que le NPD
apparaît encore comme le parti centralisateur par excellence. Son désir de
contribuer au mieux-être des plus faibles et des plus pauvres l'amène à
empiéter sur les responsabilités des provinces. Il y a bien sûr la Déclaration
de Sherbrooke, qui reconnait le droit des provinces de se retirer sans condition
et avec pleine compensation des initiatives fédérales, mais cela n'empêche pas
de noter les velléités de ce parti d'empiéter dans le champ des responsabilités
des provinces.
Thomas Mulcair a mené une excellente campagne et il a
démontré la profondeur de ses convictions dans le faux débat sur le niqab. Il a
accompli un travail impeccable comme chef de l'opposition. À ce titre, il
mérite la confiance des électeurs non seulement du Québec, mais aussi du
Canada. C'est un excellent choix pour remplacer Stephen Harper.
Le Bloc de
Gilles Duceppe
Ceux qui me lisent régulièrement ne seront pas étonnés
d'apprendre que le Bloc n'est pas un choix que je considère. Je ne suis pas
souverainiste. Je trouve normal que les souverainistes votent pour le Bloc tout
comme je trouve aussi dans l'ordre des choses qu'un fédéraliste ne vote pas
pour le parti de Monsieur Duceppe.
Loin de moi l'idée de ne pas reconnaître l'immense talent
politique de Gilles Duceppe. Si jamais le Bloc obtient un seul siège au Québec,
ce sera à cause du brio de Gilles Duceppe. Néanmoins, nous n'en sommes plus là.
Le Québec a besoin de participer pleinement à la fédération canadienne pour la
faire évoluer. Le temps de l'obstruction et de la défense exclusive des
intérêts du Québec sans tenir compte des besoins des autres régions du pays est
révolu. Monsieur Duceppe et le Bloc ne sont pas une alternative valable de
changement pour celles et ceux qui voient l'avenir du Québec au sein du Canada.
Par contre, les souverainistes doivent voter pour le Bloc. Voter contre ses
convictions fondamentales ce n'est pas un vote stratégique, c'est de la
putasserie. Les souverainistes doivent voter pour le Bloc. Si Harper gagne,
tant pis...
Le choix du
19 octobre
Le 19 octobre, nous devons choisir notre gouvernement. Nous
sommes nombreux à vouloir nous débarrasser du gouvernement abominable de
Stephen Harper et de ses valeurs rétrogrades par rapport aux nôtres, au Québec.
Deux choix s'offrent à nous, le parti libéral de Justin Trudeau et le NPD de
Tom Mulcair. Comme l'indiquent les sondages de la dernière fin de semaine, la
lutte est serrée entre conservateurs et libéraux et le NPD semble avoir été
abandonné en Ontario par de nombreux électeurs. Cela veut-il dire qu'il faille
voter libéral pour battre Harper? Non. Cela signifie plutôt que quoique nous
votions, nous aurons droit à un gouvernement minoritaire, ou libéral, ou
conservateur. Ce qui nous permet de voter selon nos convictions ou nos
préférences.
Je sais que c'est difficile de choisir. Voici les choix que
je ferais dans les circonscriptions suivantes : dans Sherbrooke, Pierre-Luc
Dusseault du NPD; dans Compton-Stanstead,
Marie-Claude Bibeau du parti de Justin Trudeau; dans Brome-Missiquoi, le libéral Denis
Paradis; dans Richmond-Arthabaska,
Myriam Beaulieu néo-démocrate et
finalement dans Mégantic-L'Érable, Jean-François
Delisle du parti de Thomas Mulcair.
L'important, c'est d'aller voter...
Mes choix sont liés à un mélange de convictions et de
préférence. Votre choix devrait faire de même. Fiez-vous à votre instinct et à
vos convictions. L'important, c'est que vous alliez voter. Et si vous ne gagnez
pas votre élection, ce n'est pas grave. Il est fort probable que nous
retournions voter d'ici 18 mois, ou même avant, car les Canadiens éliront un
gouvernement minoritaire. La meilleure stratégie, c'est de voter pour vos
convictions et vos préférences. Et si celles-ci vous amènent à voter vert ou
pour un candidat indépendant comme Benoit Huberdeau dans Sherbrooke, allez-y! Faites-vous
plaisir, mais votez... Décidez vous-même de la question de l'urne!