Je ne sais pas trop, en fait, si
l'expression citoyen corporatif est correcte. Mais ce n'est pas grave
dans le contexte de cette chronique.
De mémoire, c'était en secondaire IV.
Chose sûre, c'était au Séminaire de Sherbrooke. J'avais un cours
d'IV.E. Initiation à la vie économique. Un cours donné par Réal
Collard. J'avais saisi, je crois bien, les grands principes de notre
système économique. Sans trop savoir pourquoi, j'ai retenu
l'expression citoyen corporatif. À l'époque, je n'avais pas
la moindre idée de ce que ça pouvait bien être, mais bon. Je l'ai
retenue quand même.
Je viens de vivre un week-end chargé.
Chargé de belle façon, devrais-je préciser. Vendredi, j'ai animé
la remise des prix hommage aux bénévoles de l'arrondissement
de Jacques-Cartier. La source latine du mot bénévolat est
benevolus. Bonne volonté. Une bonne volonté qui se mesure
par des dizaines, voire des centaines de petits gestes utiles qui
rendent, à différents niveaux, des services à autrui. Je me dis
souvent que, sans ces gestes de bonne volonté, de bénévolat, le
tissu social serait affaibli énormément.
Ce qui me fascine, c'est le bénévolat
gratuit. Gratuit au sens pur du terme. Gratuit jusque dans le fait
que rien n'est attendu en retour. Parfois, on pose des gestes qui ont
une belle valeur, sans recevoir d'argent en retour, mais sachant très
bien que nous en retirerons une visibilité ou un avantage
stratégique quelconque. Ce type de bénévolat est louable. Mais pas
gratuit complètement.
Aujourd'hui, je rends un hommage tout
personnel à celles et ceux qui posent des gestes gratuits. Aux
citoyens qui font une différence dans leur milieu. Qui n'ont pas
plus de temps que vous et moi, mais qui en donnent quand même!
Hommage, donc, à ces citoyens qui agissent selon leur conscience
sociale et communautaire.
Pour moi, toute entreprise a le devoir
de faire de même. De devenir un bon citoyen corporatif. Et, non, je
ne fais pas dans la pensée magique.
Pour assurer sa pérennité, une
entreprise est balisée. Des balises qui entrent dans un tableau
Excel. Un tableau qui se définit au fil des équations qu'on
insère dans ses cases. Celles-ci viennent établir l'ultime équation
de la rentabilité. S'il demeure vital que l'entreprise soit
rentable, pour moi, l'ultime est ailleurs. Il est clair qu'une
entreprise est, et doit demeurer, un citoyen corporatif. Avec une
conscience affichée et assumée.
Si l'on reconnaît une entreprise saine
à sa performance dans le tableau Excel, je crois que cette
même entreprise prend un envol particulier quand elle excelle hors
du tableau. Quand elle pose des gestes, dans sa communauté, quand
elle vient rendre un service à autrui. La fibre de l'entreprise s'en
trouve enrichie et le sentiment de fierté et d'appartenance des
membres du personnel s'en trouve augmenté. L'utilité même de
l'entreprise est valorisée.
Dans une société où la performance
est mesurée de tous les côtés, je crois qu'il est sain d'inclure
la notion de bénévolat dans les actions des entreprises. Plusieurs
le font déjà. J'ai entendu des exemples probants lors du gala de la
Chambre de commerce de Fleurimont, samedi. J'en suis sorti grandi et
positivement influencé.
Une entreprise est un citoyen
corporatif. Et doit l'être pour maintenir l'équilibre de notre
système économique. Et la raison est simple : le système
économique est tellement étroitement lié à la vie de la
communauté que si le premier trébuche, la deuxième tombe. Un
citoyen corporatif doté d'une conscience ne limitera pas ses
actions à la simple idée d'accumuler des profits.
Mais, surtout, évitons le piège qui
consisterait à tenter de comptabiliser ce temps, ces gestes, cette
conscience proactive de notre entreprise. Cela lui enlèverait, d'une
part, la noblesse de la gratuité, mais bien plus grave encore, cela
ramènerait la notion à un ratio de performance. Un ratio qui se
veut, au départ, un indicateur, mais qui devient vite une vérité
absolue... Et qui finit par faire taire, ultimement, la conscience
sociale et communautaire.
Clin d'oeil de la semaine
Quand on les remercie publiquement,
plusieurs bénévoles sont gênés par les feux de la rampe. Ils sont
plus mal à l'aise que bien des témoins à la Commission
Charbonneau, imaginez! Pourtant, ce sont des bénévoles au sens
noble, pas des bénévoleurs...