L'image du voisin a pris plusieurs aspects tant dans la
littérature qu'au cinéma. L'une des images les plus fortes est sans nul doute
celle que nous a laissé le génie du grand cinéaste canadien Norman McLaren.
McLaren a tourné, en 1952, un film expérimental à l'Office
national du film intitulé : « Neighbours
(Voisins) ». Utilisant la technique de la pixellisation, qui traite les
acteurs humains comme des objets filmés en stop motion, c'est-à-dire image par
image. L'histoire est simple. Deux voisins, vivant dans des maisons jumelles en
carton, cohabitent en paix jusqu'à ce qu'une fleur pousse sur la frontière
séparant leur jardin. Chacun revendiquant la possession de la fleur, se battent
et finissent par s'entretuer.
L'allégorie est parfaite pour mettre en scène les relations
du Canada avec notre puissant voisin du Sud, les États-Unis d'Amérique. Plongée
dans la compréhension des relations canado-américaines...
La relation
entre le Québec et les États-Unis
Dans l'histoire du Québec, les relations entre le Québec et
les États-Unis ont occupé une place importante. Des historiens comme Gérard
Bouchard et Yvan Lamonde en ont exploré plusieurs aspects dans leurs travaux
scientifiques. Si l'on veut faire bref et prendre de grands raccourcis sur les
précisions historiographiques, nous pouvons en retenir que les classes
populaires francophones et les gens d'affaires ont toujours voué une grande
admiration pour les États-Unis et la société américaine alors que nos élites
bien pensantes et le clergé trouvaient répréhensible cet engouement du peuple
pour les mœurs américaines.
Sur le plan politique et identitaire, les relations du
Québec avec les États-Unis ont toujours constitué un levier de négociation
depuis l'Acte de Québec consenti par l'Angleterre à la « Province of Québec »
à la suite de la conquête. C'est la peur du soulèvement de la population
canadienne-française qui a guidé la sagesse anglaise pour nous octroyer la liberté
de religion, le droit de parler notre langue et celui de conserver notre code
civil français.
Notre relation avec les États-Unis fut moins productive au
moment des rébellions de 1837-1838 de nos patriotes puisque les États-Unis ont
refusé de prendre parti dans notre conflit nous opposant à l'Angleterre. Au
moment de la naissance du Canada en 1867, nos libéraux radicaux avec en tête
Antoine-Aimé Dorion, prônaient notre rattachement aux États-Unis plutôt que cet
arrangement bricolé d'une fédération centralisée âprement défendue et promue
par John A. Macdonald et Georges-Étienne Cartier.
À notre époque, les relations avec notre voisin américain se
traduisent bien plus en termes de politiques économiques. La politique, sauf en
matière de politique étrangère pour le Canada, est aujourd'hui quasi absente de
nos relations avec les États-Unis. Pensons au traité de l'ALENA, le pipeline
Keystone, le problème du bois ouvré ou encore les ventes de notre électricité.
Un cadre géopolitique
sécurisé
Néanmoins, il ne faut pas mésestimer le fait tout simple que
le Québec, tout comme le Canada, font partie de l'Amérique et que nous pouvons
compter à la fois sur la puissance économique et militaire des États-Unis
d'Amérique. Il arrive souvent dans nos débats intellectuels que nous vilipendions
les politiques américaines sur tel ou tel aspect. Cela est sain pour la
démocratie mondiale ainsi que pour notre puissant voisin qui doit parfois se
faire rappeler qu'il n'est pas le seul maître à bord de notre planète.
Néanmoins, nous devons tout de même admettre en toute humilité que notre
prospérité et notre sécurité sont largement attribuables à notre appartenance à
l'Amérique et sont protégées par l'omnipuissance de notre ami et voisin :
Les États-Unis d'Amérique. « God bless América »...
C'est pourquoi nous devons être soucieux de l'état de la
démocratie aux États-Unis et des débats qui s'y déroulent.
Même si nous devons respecter la culture largement
différente de notre voisin, il apparaît qu'il sera utile que nous profitions de
notre statut d'ami précieux pour les sensibiliser à la question des
conséquences d'une trop grande libéralisation des politiques relatives à la
possession d'armes à feu. Nous pourrions aussi faire valoir notre amitié en
rappelant à nos voisins que les problèmes environnementaux nécessitent un coup
de barre important de tous les pays du monde, mais requiert surtout le
leadership des États-Unis d'Amérique. Enfin, nous pourrions chercher au moyen
de nos relations bilatérales à sensibiliser ce grand pays aux conséquences
délétères du fossé qui s'agrandit entre les riches et les pauvres.
Croire en
notre potentiel et faire la différence...
Probablement qu'en me lisant vous vous dites que je suis un hurluberlu.
Imaginez, croire que le Québec ou le Canada peuvent ensemble faire une
différence dans les politiques du pays le plus puissant du monde. Pourtant, je
suis plus que jamais convaincu que nous pouvons contribuer au changement
radical de politiques des pays capitalistes avancés. Cela requiert d'abord une
nouvelle politique canadienne en matière internationale et particulièrement concernant
son chapitre des relations canado-américaines.
J'en suis encore plus convaincu depuis la semaine dernière.
Alors que je jouais au golf en Floride en compagnie de deux golfeurs américains,
dont un qui se prénommait Keith, celui-ci m'a dit que les États-Unis d'Amérique
pouvaient remercier Dieu d'avoir comme voisin le Canada. Un pays habité par des
gens partageant les mêmes valeurs et le même système qu'eux. Il nous trouvait
cependant un peu trop « libérals ». Ce fut un plaisir de rencontrer
un Américain pure laine dire autant de bien de nous les Canadiens. Cela m'a
inspiré le sujet de cette chronique en me disant que nous pourrions essayer de
faire la différence pour la suite du monde et profiter de notre statut de bon
voisin...