Un scénariste se présente chez un
producteur associé à une grande chaîne de diffusion télé avec,
en mains, un script qui décrit l'accession au pouvoir et les
premières semaines d'un président coloré.
Rapidement,
dans l'histoire, les déclarations du candidat devenant président
se bousculent, plus grotesques et niaises les unes que les autres.
Dans le scénario, le président s'entoure de milliardaires qui
n'ont d'yeux que pour eux-mêmes et qui ont soudainement une
importance majeure dans le quotidien du pays. Ces milliardaires ont
tous un agenda plus ou moins caché : soit ils veulent
programmer les réseaux sociaux pour qu'ils diffusent de la fausse
information et favorisent résolument l'extrême droite, soit ce
sont des propriétaires d'immenses entreprises qui cherchent à
annuler toute restriction environnementale ou économique qui leur
coupe du profit.
Un des rêves du totalitaire président
élu est d'annexer le Canada et bien d'autres terres plus ou
moins lointaines. Il joue à la diplomatie mondiale comme des enfants
règlent des situations dans la cour d'école : le plus fort
fait plier les autres...
J'imagine que le personnage du
président est décrit comme un gros bonhomme au teint orange et très
accentué et qu'il est marié à l'incarnation d'une poupée de
porcelaine aux traits parfaitement lisses.
La série est
retenue par le producteur et, dans la description proposée aux
téléspectateurs, on retrouve ces phrases :
« ...
cette comédie désopilante intègre des éléments d'absurdité à
rendre jaloux les scénaristes de SNL*. Cette série est une
caricature plus grande que nature. Elle a le pouvoir de grossir à ce
point les traits de crayons qu'elle finit par nous faire décrocher
de la morosité politico-économique que nous vivons... »
Mais
le hic, l'affaire, c'est que ce n'est ni une série télé ni
une comédie. C'est la plate réalité.
Moins
comique, subitement.
Et
ce que je décris est la pointe de l'iceberg, puisqu'il est
permis et même avisé de croire que ce qui se passe en réalité est
bien plus grand que ce qui est montré.
La
nécessité toute personnelle de réagir
Boycotter,
ne pas boycotter, voilà la question qui est sur bien des lèvres ces
jours-ci.
Les arguments contre le fait de boycotter sont
nombreux : « L'achat que je ne fais pas sur Amazon ne
changera rien...faque... ». Ou encore : « Je connais
des personnes aux États-Unis. Elles nous aiment, je ne veux pas leur
faire de mal ! ». Et aussi : « Je préfère
ignorer ce qui se passe. Je ne veux pas donner d'importance à
Trump. »
Tout ça peut se défendre. Ce n'est pas mon
point de toute façon.
Pour moi, il est clair que,
psychologiquement, j'ai besoin de moduler une réaction. Ce que font
Trump et son groupe d'élite économique est abject. Ils méprisent,
insultent et intimident. Pour moi, ne pas réagir n'est pas une
option.
Mais
une réflexion s'impose sur la manière, cela dit.
Et
je pense que c'est une occasion de ramener encore une fois la
réflexion sur l'impact de nos gestes sur la consommation de
produits et/ou sur notre utilisation des médias sociaux.
Je
sais bien que notre société est bien trop démobilisée pour qu'un
grand mouvement uniforme se dessine et soit viable.
Mais
une simple remise en question de nos gestes quotidiens peut générer
en nous une prise de conscience saine qui pourrait nous guider pour
l'avenir.
Le choix de voyager autrement qu'aux
États-Unis pour le moment est valable et défendable, surtout si on
choisit l'exploration de notre propre pays.
Une amie me
confiait que, puisque la Californie est démocrate, elle se sent
mieux d'acheter des agrumes de là-bas. Ce que je constate, au-delà
du geste en tant que tel, c'est la réflexion comme consommateur
qui le précède.
Une réflexion que les milliardaires de
Trump tentent de nous empêcher de faire par tous les moyens.
Et
cette réflexion, si basique soit-elle, nous sera utile quand l'étau
d'une sorte de totalitarisme socio-économique se resserrera sur
l'Amérique (et ailleurs !) au cours des prochains
mois.
__________
Je
relis mon introduction et je me dis que je souhaiterais tellement que
ce qui se passe en vrai ne soit qu'une comédie trop accentuée et
de laquelle on jase au bureau en riant autour de la machine à
café.
Une sorte de P'tite vie américaine, en quelque
sorte...