Un ami à moi bourlingue tout son saoul à travers le vaste monde. Sa vie est un grand voyage. Il ne parle jamais de son dernier voyage, mais bien du plus récent. Et du suivant. Le « dernier » n'est pas encore dans les cartons! Quand il jase voyage, il ne parle de la destination que pour donner un repère.
Parce que la destination est beaucoup moins importante que la démarche qui nous y amène. La démarche, c'est ce long fil conducteur qui motive les voyages. C'est une quête plus ou moins définie. Une démarche qui va d'une destination à l'autre. La démarche chemine. La destination n'est pas une fin en soi.
Évidemment, je parle ici de voyages qui ne sont pas des formules « tout inclus » où seuls le plaisir et la destination comptent. Ce n'est pas mal, nenon, c'est juste autre chose.
Plusieurs voient cet ami comme un bourlingueur un peu marginal. Si être marginal signifie ne pas marcher dans la trace commune, ça se peut. Pourtant, il ne vit pas en marge. Pas du tout.
Il met en lumière l'importance de la démarche devant mener à une destination.
C'est en jasant avec cet ami qu'un constat s'est imposé dans ma tête : dans notre vie en société, on a abandonné la démarche au profit d'une solution. On demande à nos politiciens des solutions de type « tout inclus ». Parce qu'on ne veut pas d'une démarche longue.
Et c'est là que tout dérape
On donne à M. Couillard le mandat de s'occuper des « vraies affaires » sans lui demander ce que c'est, pour lui, les vraies affaires. En plus, il sait très bien qu'on ne s'en occupera plus une fois qu'il sera élu. Donc, qu'il aura les coudées franches une fois l'élection close !
Ça donne quoi? Un exemple parmi tant d'autres, la réforme de la santé mitraillée, non consensuelle et directement issue d'une idéologie hyper centrée sur un ministre dominant et moralisateur.
À un autre niveau, ça donne quoi?
Ça donne l'élection d'un Trudeau qui promettait une démarche menant à une révision du modèle électoral et qui se retire en disant, avant même d'en parler, qu'il n'y a pas de consensus. Il impose une solution en lieu et place: le statu quo. Pour moi, c'est grave de renier ainsi une promesse pourtant porteuse.
Ça donne aussi l'élection d'un Trump qui tente d'imposer des solutions toutes pensées et dignes d'une dictature idéologique, tout en escamotant les démarches collectives.
Ça donne des exemples comme le gouvernement Harper qui avait annulé l'appui financier aux scientifiques et à leurs recherches fondamentales. Cette solution imposée était faite au nom de l'économie d'argent immédiate, mais elle avait surtout le « mérite » de boycotter le message que l'environnement se porte mal. Si on ne sait plus que l'environnement va mal, ça veut dire qu'on n'a plus de problèmes environnementaux, donc, que tout est réglé, non ?
La vie publique est une démarche. Pas une imposition de solutions toutes faites et prémâchées. Il n'y a pas de solution unique, de modèle de politicien-sauveur. Tout cela est une utopie qui nous réconforte dans notre « je-m'en-foutisme » collectif.
Hey, l'ami bourlingueur, si vraiment tu vis dans la marge, c'est peut-être qu'on devrait considérer que la marge a une valeur. Que la démarche vaut toujours plus que la destination...
Clin d'œil de la semaine
Monsieur Couillard, l'épouvantable cafouillage sur la 13, lors de la tempête de neige récente, c'est une « vraie affaire », ça ?