« Danger,
danger! »
J'entends
encore la voix du robot dans l'émission Perdus dans l'espace. Je sais,
je trahis mon âge, mais bon. Pour tout dire, j'ai vu des reprises,
essentiellement. La diffusion américaine s'est terminée en 1968. J'avais 7 ans.
À vos calculettes, tout le monde, pour connaître mon âge!
La série
annonçait un surpeuplement de la Terre en 1997! Une expédition devait trouver
un autre endroit pour vivre.
Quand le
danger montrait le bout de son nez, voilà que le robot sortait ses bras de sa
coquille et les agitait de haut en bas en répétant « danger, danger »
avec l'émotion monotone d'un robot!
Quand on
y regarde de plus près, ses bras ont probablement inspiré le tuyau de sécheuse
flexible tant la ressemblance est frappante.
Surpeuplement
en 1997
Nous
sommes en 2020. Bientôt (et vivement!) 2021...
La
planète est pas mal chargée d'humains et ceux-ci peuvent se déplacer avec une
aisance toute moderne sur toute l'étendue du territoire. Des mouvements
migratoires sont observés de plus en plus. Parfois provoqués par le chaos de
certaines sociétés, parfois motivés par la volonté de certaines familles
d'améliorer leur sort et parfois sollicités par d'autres pays pour pallier les
problèmes de main-d'œuvre, entre autres.
Dans une
société comme la nôtre, l'arrivée de gens appartenant à différentes cultures entraîne
des ajustements. Et qui dit ajustements, dit aussi dérangements.
Difficiles
ajustements
Notre
quotidien se voit bousculé par cette mixité nouvelle. Le Québécois dit de
souche en est encore à bâtir sa confiance en soi, celle-ci ayant été étouffée
par des années de règne social religieux, que déjà, il doit apprendre à
partager son quotidien et son territoire.
On s'aperçoit
vite que le triste « qu'y restent chez eux s'y veulent pas vivre comme
chez nous » ne suffit plus...
On veut
tout et son contraire. On veut d'un état laïc. La pratique religieuse n'est
plus l'ombre d'elle-même. Mais on tient à certaines traditions.
Pas
simple tout ça...
Danger
de survoltage intense
Imaginez
que vous êtes immigrant. Et que vous arrivez ici. On vous a bien expliqué que
le Québec est un état de droit laïc, qu'il y a une parité (souhaitée, du moins)
entre les hommes et les femmes. Que le genre sexuel ne différencie plus les
gens non plus, etc.
Vous
débarquez et vous voyez l'éclat de Noël dans les visages et dans le déploiement
des décorations!
On parle
d'un état laïc, mais tout s'arrête à Noël! « Touchez pas à ma
crèche! », hurlent certaines personnes qui viennent à peine de se rappeler
que c'est de la naissance d'un Christ sauveur dont il est question!
Nous, on
le comprend. C'est juste qu'au-delà de la religion, la « souche »
voit les fêtes religieuses comme des repères dans son année. On se voit à
Pâques et à Noël, mais on célèbre bien peu le religieux qui se cache derrière
la chose.
Allez
expliquer ça à quelqu'un dont la souche cherche à prendre racine en terre
nouvelle : « on est dans un état laïc, mais Noël pis Pâques, c'est
sacré (!) pour nous... Pis non, c'est pas pareil comme tes fêtes religieuses à
toi... »
Pas
simple, je disais.
Le
survoltage, tout cela étant, est plus probable que jamais.
Ce qui
m'effraie, c'est notre incapacité à discuter des enjeux. Comme si le moindre
changement était un échec pour la souche! « Y vont toute nous
enlever! »
Vous
savez, cette façon de devenir juste émotifs lorsqu'on discute entre nous?
Petit, on me disait « on ne devrait jamais parler de politique lors des
rencontres de familles aux Fêtes ». Sauf, bien sûr, si tout le monde était
d'accord!
Le cocktail
est dangereux : il faut répondre à des questions de certains immigrants
alors qu'on a de la misère à s'expliquer avec le beau-frère!
En plus,
nous sommes sous pression. Pression de la Covid-19, pression aussi dans le
discours entourant le racisme. Il semble que quelqu'un ait décidé, quelque
part, que rien, par rapport au racisme, n'est discutable. Mais que tout est
condamnable sur-le-champ. C'est devenu épidermique.
Je
continue de croire que tout doit demeurer discutable. Tout. La religion, le
racisme, tout! Je crois que seule la communication bâtit des ponts. Il ne faut
jamais arrêter la communication. Le pont de Québec est tombé deux fois avant
d'être complété. Il faut persévérer.
Vivre
dans une même maison quand la famille est élargie demande de la compréhension mutuelle.
Mutuelle.
Comme dans à deux sens, deux voies. Comme dans aller-retour.
Moins de
« respecte-moi ». Plus de respectons-nous.
Clin
d'œil de la semaine
On aura
grandi quand on comprendra que de ne pas voir les choses de la manière que
l'autre ne signifie pas qu'on doive haïr l'autre pour autant...