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La grande dame de la politique

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 12 octobre 2022

Jeudi dernier, j'étais au lancement privé, une façon de dire alors que plus de 150 personnes étaient présentes, du livre de Monique Gagnon-Tremblay qui rappelle les principaux événements de sa vie et surtout sa carrière politique. Je dois vous avouer que j'ai un biais favorable pour cette femme tenace et déterminée. J'ai été présent auprès d'elle tout au long de sa longue carrière politique. Elle a représenté le comté de Saint-François à l'Assemblée nationale du Québec pendant 27 ans. Donc, si vous n'aimez pas Monique Gagnon-Tremblay ou si vous êtes incapables d'entendre parler du mot libéral, ne lisez pas cette chronique. Témoignage personnel sur un personnage politique exceptionnel du Québec.

Monique, une femme déterminée et disciplinée

Celles et ceux qui se donneront la peine de lire son autobiographie et ses mémoires politiques publiées chez Septentrion et intitulé : Monique Gagnon-Tremblay, une force tranquille. Mémoires politiques, découvriront d'abord que le parcours de la femme qu'est Monique Gagnon-Tremblay épouse à bien des égards le cheminement des femmes au Québec. D'abord, secrétaire de notaire, elle devient notaire disant qu'elle était capable d'effectuer le travail et d'en récolter les fruits plutôt que de faire le même travail pour quelqu'un d'autre.

Pour parvenir à son objectif, elle a fait ses études les soirs et fins de semaine puis elle a étudié à la Faculté de droit à l'Université de Sherbrooke à une époque, comme l'a rappelé son ami Jean Charest lors de son intervention jeudi soir, où les femmes ne pullulaient pas en droit. Ses études terminées, elle a ouvert son propre bureau de notaire et s'est faite la défenderesse des femmes grâce à ses liens avec l'AFEAS de l'époque.

Femme de caractère, Monique est profondément attachée à sa famille. Elle a des relations tissées serrées avec ses sœurs, ses nièces et ses neveux. Monique Gagnon-Tremblay a un profond respect pour les humains et elle est toujours respectueuse de tous. Pour avoir travaillé avec elle et l'avoir eu comme patron, je peux dire que même si elle était aussi exigeante avec nous qu'avec elle, ce n'est pas elle qui aurait pu être accusée de harcèlement psychologique ou d'abus envers ses employés et ses collaborateurs. Monique avait un talent particulier pour aller chercher chez tout le monde le meilleur d'eux même.

Monique, la députée et ministre

Monique Gagnon a été élue députée de Saint-François le 2 décembre 1985. Quelques jours plus tard, je fus embauché comme attaché politique pour le bureau de comté avec Lise Drouin-Paquette. Comme nous n'avions pas de bureau, nous avons commencé à travailler dans des bureaux temporaires. C'était important pour Monique de se mettre rapidement au travail et de représenter les gens de Saint-François afin de répondre à leurs besoins. Elle a pris très au sérieux son rôle de député et elle s'est attelée à la tâche sans tarder. Elle est aussi devenue ministre déléguée à la condition féminine, ce qui rendait le travail de Lise Drouin-Paquette et moi encore plus crucial. Elle nous avait donné des consignes strictes. Nous ne devions pas laisser plus de 24 heures s'écouler avant de répondre à un électeur. Elle voulait être mise au courant sur une base régulière de tout ce qui se passait dans son comté. Travailler aux côtés de Monique Gagnon-Tremblay, la députée n'était pas de tout repos. Jamais elle ne se reposait sur ses lauriers. Pour Monique Gagnon-Tremblay, le meilleur remède à tous les problèmes ou aux maux c'était le travail. Avec elle, pas le temps de se morfondre sur nos petits et grands problèmes même si elle faisait toujours preuve d'une grande humanité.

Monique, la première

Monique n'a jamais rien fait comme les autres. C'est une femme énergique, déterminée et qui a toujours su faire preuve d'audace dans ses dossiers. Elle est celle qui a déposé le premier plan d'action pour faire avancer la cause des femmes au Québec. Elle a mis de l'ordre dans le dossier des services de garde et fait adopter une des lois les plus progressistes du Québec, la loi sur le patrimoine familial. C'est aussi Monique qui a inventé le concept de régionalisation en immigration, qui a combattu le multiculturalisme canadien avec son concept d'interculturalisme et elle est l'auteur de l'accord McDougall-Gagnon-Tremblay qui venait donner plus de pouvoirs au Québec en matière d'immigration venant ainsi remettre au goût du jour l'accord historique Cullen-Couture. Monique a aussi signé une convention collective avec le front commun syndical contre toute attente grâce à sa complicité avec Claudette Carbonneau.

Ce n'est pas pour rien qu'il y ait eu autant de personnes qui se sont déplacées jeudi soir pour venir célébrer Monique Gagnon-Tremblay. Ses anciens chefs, Daniel Johnson et Jean Charest, l'ancien maire de Sherbrooke Jean Perrault, d'anciens sous-ministres, de nombreux hauts fonctionnaires de l'État québécois ainsi que de nombreux amis et collaborateurs avec lesquels elle avait travaillé au cours de sa longue carrière politique. Ce n'est pas un hasard si Monique Gagnon-Tremblay a été la première femme ministre des Finances, la première femme présidente du Conseil du trésor, la première femme cheffe de l'opposition. Monique a brisé de nombreux plafonds de verre et elle est en partie responsable avec les Pauline Marois, Louise Harel, Claire Kirkland-Casgrain du fait qu'aujourd'hui les femmes en politique sont près de la zone paritaire. Une autre première à laquelle on peut associer Monique Gagnon-Tremblay.

Monique, l'anti-star

Celles et ceux qui n'ont pas connu Monique Gagnon-Tremblay de près, ne peuvent savoir combien elle était efficace, déterminée et qu'elle tenait toujours ses engagements. D'une rigueur implacable, Monique ne se laissait jamais décourager par l'ampleur de la tâche et elle n'acceptait pas facilement un non de ses collègues. En région, les réalisations de Monique Gagnon-Tremblay sont nombreuses. Elle a fait énormément pour assurer à Sherbrooke et à la région plus que sa part en investissement dans tous les domaines. Un jour, Yves-François Blanchet, alors député péquiste de Drummond, l'avait accusé de favoritisme dans un dossier. Monique a rétorqué que si favorisé sa région c'était du favoritisme, elle plaidait coupable. Au-delà des réalisations, il y avait la manière Gagnon-Tremblay, les intervenants étaient régulièrement brusqués s'ils ne s'entendaient pas entre eux ou si leur dossier n'était pas rigoureux. Monique allait au front pour sa région, mais jamais avec un tire-pois. Elle voulait gagner et cela la distingue encore aujourd'hui de nombreux politiciens et de nombreuses politiciennes. Bien sûr, Monique n'est pas une grande oratrice. Elle est le contraire d'une star. Comme l'a rappelé Jean Charest lors de son intervention jeudi soir dernier, Monique a convaincu bien des gens par l'exemple et non par ses discours. Pour Monique, l'essentiel de sa pensée tenait à un vieux dicton : parlons peu, mais parlons mieux. J'ajouterais que pour elle le maître-mot c'est action comme au cinéma.

Moi, je ne vous l'ai jamais caché, j'aime Monique Gagnon-Tremblay. C'est une femme exceptionnelle que j'ai eu le privilège de fréquenter et qui, malgré nos désaccords parfois, a toujours conservé de l'affection pour moi. Je lui en suis reconnaissant et je suis très touché, car pour moi Monique c'est une grande dame de la politique québécoise....



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