Jeudi dernier, j'étais au lancement privé, une façon de dire
alors que plus de 150 personnes étaient présentes, du livre de Monique
Gagnon-Tremblay qui rappelle les principaux événements de sa vie et surtout sa
carrière politique. Je dois vous avouer que j'ai un biais favorable pour cette
femme tenace et déterminée. J'ai été présent auprès d'elle tout au long de sa
longue carrière politique. Elle a représenté le comté de Saint-François à l'Assemblée
nationale du Québec pendant 27 ans. Donc, si vous n'aimez pas Monique
Gagnon-Tremblay ou si vous êtes incapables d'entendre parler du mot libéral, ne
lisez pas cette chronique. Témoignage personnel sur un personnage politique
exceptionnel du Québec.
Monique, une femme déterminée et
disciplinée
Celles et ceux qui se
donneront la peine de lire son autobiographie et ses mémoires politiques publiées
chez Septentrion et intitulé : Monique
Gagnon-Tremblay, une force tranquille. Mémoires politiques, découvriront
d'abord que le parcours de la femme qu'est Monique Gagnon-Tremblay épouse à
bien des égards le cheminement des femmes au Québec. D'abord, secrétaire de
notaire, elle devient notaire disant qu'elle était capable d'effectuer le
travail et d'en récolter les fruits plutôt que de faire le même travail pour
quelqu'un d'autre.
Pour parvenir à son objectif, elle a fait ses études les
soirs et fins de semaine puis elle a étudié à la Faculté de droit à
l'Université de Sherbrooke à une époque, comme l'a rappelé son ami Jean Charest
lors de son intervention jeudi soir, où les femmes ne pullulaient pas en droit.
Ses études terminées, elle a ouvert son propre bureau de notaire et s'est faite
la défenderesse des femmes grâce à ses liens avec l'AFEAS de l'époque.
Femme de caractère, Monique est profondément attachée à sa
famille. Elle a des relations tissées serrées avec ses sœurs, ses nièces et ses
neveux. Monique Gagnon-Tremblay a un profond respect pour les humains et elle
est toujours respectueuse de tous. Pour avoir travaillé avec elle et l'avoir eu
comme patron, je peux dire que même si elle était aussi exigeante avec nous
qu'avec elle, ce n'est pas elle qui aurait pu être accusée de harcèlement
psychologique ou d'abus envers ses employés et ses collaborateurs. Monique
avait un talent particulier pour aller chercher chez tout le monde le meilleur
d'eux même.
Monique, la députée et ministre
Monique Gagnon a été élue députée de Saint-François le 2 décembre
1985. Quelques jours plus tard, je fus embauché comme attaché politique pour le
bureau de comté avec Lise Drouin-Paquette. Comme nous n'avions pas de bureau,
nous avons commencé à travailler dans des bureaux temporaires. C'était
important pour Monique de se mettre rapidement au travail et de représenter les
gens de Saint-François afin de répondre à leurs besoins. Elle a pris très au
sérieux son rôle de député et elle s'est attelée à la tâche sans tarder. Elle
est aussi devenue ministre déléguée à la condition féminine, ce qui rendait le
travail de Lise Drouin-Paquette et moi encore plus crucial. Elle nous avait
donné des consignes strictes. Nous ne devions pas laisser plus de 24 heures
s'écouler avant de répondre à un électeur. Elle voulait être mise au courant
sur une base régulière de tout ce qui se passait dans son comté. Travailler aux
côtés de Monique Gagnon-Tremblay, la députée n'était pas de tout repos. Jamais
elle ne se reposait sur ses lauriers. Pour Monique Gagnon-Tremblay, le meilleur
remède à tous les problèmes ou aux maux c'était le travail. Avec elle, pas le
temps de se morfondre sur nos petits et grands problèmes même si elle faisait
toujours preuve d'une grande humanité.
Monique,
la première
Monique n'a jamais rien fait comme les autres. C'est une
femme énergique, déterminée et qui a toujours su faire preuve d'audace dans ses
dossiers. Elle est celle qui a déposé le premier plan d'action pour faire
avancer la cause des femmes au Québec. Elle a mis de l'ordre dans le dossier
des services de garde et fait adopter une des lois les plus progressistes du
Québec, la loi sur le patrimoine familial. C'est aussi Monique qui a inventé le
concept de régionalisation en immigration, qui a combattu le multiculturalisme
canadien avec son concept d'interculturalisme et elle est l'auteur de l'accord
McDougall-Gagnon-Tremblay qui venait donner plus de pouvoirs au Québec en
matière d'immigration venant ainsi remettre au goût du jour l'accord historique
Cullen-Couture. Monique a aussi signé une convention collective avec le front
commun syndical contre toute attente grâce à sa complicité avec Claudette
Carbonneau.
Ce n'est pas pour rien qu'il y ait eu autant de personnes
qui se sont déplacées jeudi soir pour venir célébrer Monique Gagnon-Tremblay.
Ses anciens chefs, Daniel Johnson et Jean Charest, l'ancien maire de Sherbrooke
Jean Perrault, d'anciens sous-ministres, de nombreux hauts fonctionnaires de
l'État québécois ainsi que de nombreux amis et collaborateurs avec lesquels
elle avait travaillé au cours de sa longue carrière politique. Ce n'est pas un
hasard si Monique Gagnon-Tremblay a été la première femme ministre des Finances,
la première femme présidente du Conseil du trésor, la première femme cheffe de
l'opposition. Monique a brisé de nombreux plafonds de verre et elle est en
partie responsable avec les Pauline Marois, Louise Harel, Claire
Kirkland-Casgrain du fait qu'aujourd'hui les femmes en politique sont près de
la zone paritaire. Une autre première à laquelle on peut associer Monique
Gagnon-Tremblay.
Monique, l'anti-star
Celles et ceux qui n'ont pas connu Monique Gagnon-Tremblay
de près, ne peuvent savoir combien elle était efficace, déterminée et qu'elle tenait
toujours ses engagements. D'une rigueur implacable, Monique ne se laissait
jamais décourager par l'ampleur de la tâche et elle n'acceptait pas facilement
un non de ses collègues. En région, les réalisations de Monique Gagnon-Tremblay
sont nombreuses. Elle a fait énormément pour assurer à Sherbrooke et à la
région plus que sa part en investissement dans tous les domaines. Un jour,
Yves-François Blanchet, alors député péquiste de Drummond, l'avait accusé de
favoritisme dans un dossier. Monique a rétorqué que si favorisé sa région
c'était du favoritisme, elle plaidait coupable. Au-delà des réalisations, il y
avait la manière Gagnon-Tremblay, les intervenants étaient régulièrement
brusqués s'ils ne s'entendaient pas entre eux ou si leur dossier n'était pas
rigoureux. Monique allait au front pour sa région, mais jamais avec un
tire-pois. Elle voulait gagner et cela la distingue encore aujourd'hui de
nombreux politiciens et de nombreuses politiciennes. Bien sûr, Monique n'est
pas une grande oratrice. Elle est le contraire d'une star. Comme l'a rappelé
Jean Charest lors de son intervention jeudi soir dernier, Monique a convaincu
bien des gens par l'exemple et non par ses discours. Pour Monique, l'essentiel
de sa pensée tenait à un vieux dicton : parlons peu, mais parlons mieux.
J'ajouterais que pour elle le maître-mot c'est action comme au cinéma.
Moi, je ne vous l'ai jamais caché, j'aime Monique
Gagnon-Tremblay. C'est une femme exceptionnelle que j'ai eu le privilège de
fréquenter et qui, malgré nos désaccords parfois, a toujours conservé de
l'affection pour moi. Je lui en suis reconnaissant et je suis très touché, car
pour moi Monique c'est une grande dame de la politique québécoise....