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  CHRONIQUEURS / Deux mots à vous dire

Pelleter...toujours vers le même tas

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C'est peut-être moi qui suis émotif un peu trop, allez savoir... Toujours est-il que là, ça commence à bien faire.

Je le répète depuis des lunes, mais il n'en demeure pas moins que nous sommes installés dans un modèle de société qui ne prêche que par la performance. On a réussi à trouver des unités de mesure pour à peu près tout. Le pourcentage d'économies potentielles en lien avec tel système de chauffage par rapport à tel autre, le coefficient d'aérodynamisme qui fait en sorte que ma voiture consomme un peu moins, le taux d'absentéisme au travail, et tant d'autres encore.

Aujourd'hui, si ma performance n'entre pas dans un tableau Excel, je suis cuit. C'est comme ça. Les gestionnaires ont appris à tout mesurer, à benchmarquer, pour utiliser une expression latine (mmm...). Tout doit se comparer et se chiffrer. La seule valeur qui ait une valeur, c'est la valeur du chiffre, du taux, du coefficient, du ratio...

Pourquoi, alors, en serait-il autrement de nos bons gouvernements. Je pense encore à Harper. Spécialiste de la manipulation du message, il court-circuite allègrement tous ses ministres et impose les lignes de communication à sa guise.

Pour ce qui est du dossier de l'assurance-emploi, c'est pareil. Il ne faut pas se méprendre. S'il a modifié les règles sans consulter, ce n'est pas un oubli. Ni une démonstration de confiance en soi. C'est une opération vicieuse visant une chose, à mon avis, soit de mettre des chiffres de performance sur la table et dire, ultimement,aux électeurs : « moi, j'ai coupé dans les dépenses ».

Les principes qui régissent le travail saisonnier ne sont pas mauvais en soi. Ils permettent le maintien, voire la survie, de plusieurs types d'industries qui sont nécessaires, mais qui ne fonctionnent pas à l'année. C'est le cas de la pêche, de certains éléments de tourisme, de certains aspects de l'industrie du bois, bref, c'est une sorte d'appui collectif qui permet, entre autres, de s'assurer que l'employé compétent et formé va pouvoir revenir lorsque la haute saison se pointera. C'est aussi une façon d'appuyer, toujours collectivement, des travailleurs dans des situations précaires, permettant une certaine stabilité des familles et de leur évolution.

Si l'objectif des troupes de Harper était de réduire des abus potentiels de certains contribuables trop gourmands, il ne fallait pas changer la loi, mais mieux appliquer celle qui est en vigueur.

L'objectif n'était pas là du tout.

À coups de dizaines (voire des centaines) de millions de dollars, le gouvernement Harper mousse son fameux plan de croissance économique. Des campagnes télé et imprimées qui n'arrêtent pas d'inonder les ondes, de noircir le papier et d'embêter l'internaute. Avec tout cet argent dépensé pour rien, il faut bien montrer que ça rapporte! Un des tableaux intéressants pour démontrer la performance et le génie supposé de tout ce plan, c'est le taux de chômage. Donc, à défaut de créer le nombre d'emplois qu'on voudrait, on coupe les prestataires de l'assurance-emploi en resserrant les règles. Mais ne soyons pas dupes. Si le prestataire de l'assurance-emploi n'y a plus accès, il se retournera, sporadiquement vers l'aide sociale. Et l'aide sociale ne relève pas du fédéral, mais de chacune des provinces. Donc, on se fout des conséquences de nos gestes, du moment que la dépense est réduite pour notre palier de gouvernement. Le reste, vous savez...

L'enjeu est simple : Harper souhaite montrer un beau bulletin aux électeurs. Pour ce faire, il n'est pas gêné du tout de pelleter les responsabilités dans la cour de l'autre palier de gouvernement. Ultimement, celui-ci verra à transporter, comme ça s'est fait rien qu'en masse, des responsabilités dans la cour des municipalités.

Comme ça, chacun dit qu'il a bien fait son travail, qu'il n'a pas augmenté les impôts. Non, mais il en a pelleté un bon bout dans la cour de l'autre. Et le tas se tasse tout le temps. Mais le tas, en bout de piste, c'est le même contribuable qui doit s'en occuper.

Ça devient franchement exécrable. Surtout quand je reçois, comme les autres canadiens l'ont reçu, une feuille par la poste qui m'explique que, somme toute, pour ce qui est de l'assurance emploi, rien n'a vraiment changé. Pourquoi une réforme, si rien ne change? 

C'est ça manipuler un message. Et comme leur chef, les ministres de Harper le font avec une joie et une satisfaction évidentes. 

Clin d'oeil de la semaine

Moi aussi, je pourrais remettre un beau bulletin si c'était moi qui contrôlais les étoiles du cahier...

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