Nous vivons des temps difficiles. Nos dirigeants doivent prendre des décisions quotidiennes lourdes de sens et chercher dans chacune d'elles à maintenir le fragile équilibre entre la santé publique et nos vies et l'ordinaire de nos vies. Depuis le début de la crise de la Covid-19, les différents gouvernements ont fait ce qu'ils pouvaient dans les circonstances pour préserver la vie de chacun d'entre nous.
Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau et celui du Québec, François Legault, ont été présents et ils ont pris les décisions qui s'imposaient. On peut dire la même chose des autres gouvernements des provinces et des principales villes au Québec. On note le rôle très actif de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, qui doit gérer une ville qui est le site central de la pandémie au Canada.
En ce qui me concerne, j'ai pris le parti de ranger l'esprit critique dans le garde-robe, car en temps de crise, il faut se serrer les coudes et faire face ensemble à l'ennemi. Ce qui ne signifie pas pour autant que l'on ne peut pas critiquer l'une ou l'autre des décisions qui ont été prises par nos différents gouvernements. Il y aura un temps pour faire le bilan et celui-ci n'est pas encore venu. Globalement, nous pouvons dire que la crise de la Covid-19 a plutôt été bien gérée au Canada et au Québec à quelques exceptions près. De manière générale, on peut se féliciter du leadership de nos dirigeants élus. Dans toute affirmation, il y a toujours des exceptions. L'une d'elles c'est la Ville de Sherbrooke.
Nonobstant le travail efficace et approprié d'organismes paramunicipaux comme Sherbrooke Innopole ou Commerce Sherbrooke, la Ville de Sherbrooke et nos élus ont failli lamentablement à la tâche de gérer cette crise inédite. L'absence de leadership du maire de Sherbrooke et sa gestion déficiente de la crise de la pandémie sont une honte. Réflexion sur l'absence de leadership à Sherbrooke...
Les principes de base d'une gestion de crise
Le premier principe à respecter dans la gestion d'une crise c'est de communiquer les informations en temps réel et en toute transparence en évitant la confusion du message. Cela est important afin que les gens qui regardent plus attentivement leur leader en temps de crise puissent avoir confiance en la parole de leur dirigeant. Si l'on ment à ses employés ou à la population ou qu'on tente de présenter les faits sous un meilleur jour, on met en péril sa crédibilité et celle de son institution. En cette époque où la communication fait foi de tout, les gens vont très vite repérer les demi-vérités ou les mensonges, ils ne sont pas stupides. Le dirigeant va aussi perdre la confiance de ses employés et il sera incapable de préserver sa capacité d'influence sur son organisation et auprès de la population.
Communiquer c'est aussi écouter. Il est donc important de communiquer une raison d'être qui servira de guide aux employés tout en laissant à chacune et à chacun une marge de manœuvre qui permet une certaine flexibilité sur les manières d'y parvenir. Écouter ses employés et ses cadres est très important dans une gestion de crise. Souvent, c'est être un mauvais leader que de faire la sourde oreille aux personnes qui ont de meilleures idées que nous.
Un autre principe important c'est d'être à l'écoute des gens et d'être sensible à leurs préoccupations en cherchant à répondre favorablement à leurs besoins ou sinon à expliquer pourquoi cela n'est pas possible. Ce principe est au cœur de la stratégie de communication du gouvernement Legault dans cette crise.
Il faut aussi mettre de l'avant son équipe. Il faut se rappeler une vérité, c'est qu'un dirigeant n'est jamais aussi intelligent que l'ensemble des gens sous sa responsabilité. Il ne faut pas hésiter à puiser dans cette expertise, cela rend le dirigeant plus crédible et plus efficace en temps de crise. L'exemple qui vient en tête pour illustrer ce qu'il ne faut pas faire est la gestion de crise de Donald Trump où l'on peut le voir dans ses conférences de presse dire une chose et son contraire, contredire ses experts et surtout annuler la portée des messages qu'ils cherchent à livrer dans ses commentaires sur son fil Twitter. Fil Twitter où il se livre à des techniques de diversion en se fabriquant des ennemis sous de fallacieux prétextes comme l'histoire du laboratoire secret de Wuhan en Chine.
Enfin, il faut profiter de la crise pour consolider les loyautés en tablant sur une accélération du changement qu'induit une crise sur nos habitudes et surtout ne pas s'isoler du milieu et garder ses antennes bien ouvertes avec les principaux leaders de la communauté. Il faut surtout se préoccuper du sort des autres et non pas de son organisation.
Le cirque ordinaire du maire Lussier
D'aucune façon, je ne voudrais faire croire que la Ville de Sherbrooke ne fait rien pour ses entreprises, pour ses commerces et pour sa population. Dire cela serait une fausseté. Je vois Sherbrooke Innopole s'activer, en tant qu'entreprise commerciale, je reçois de l'information régulière de Commerce Sherbrooke, nos corps policiers sont présents sur le territoire pour assurer le bon ordre et le respect des consignes de la santé publique.
Ce que je note cependant c'est le leadership défaillant du maire de notre ville et de nos élus. Ce que l'on peut lire à leur sujet serait risible si l'heure n'était pas aussi grave. Débats oiseux sur les huis clos ou non, retenue de l'information, absence de données sur l'impact de la crise actuelle sur l'état de nos finances, débats malencontreux sur la gouvernance des organismes paramunicipaux en pleine pandémie, il faut le faire. Messages contradictoires et aucune direction claire sur l'après-pandémie. Les parcs seront ouverts ou fermés, y aura-t-il des mesures particulières pour le transport en commun, les projets de construction seront-ils retardés ou non ?
Notre Ville bien sûr se fait le relais des programmes gouvernementaux des gouvernements du Québec et du Canada, mais dans son champ d'expertise à elle, pas de sons et pas d'images si ce n'est que des messages contradictoires. Un exemple parmi tant d'autres, les orientations de Destination Sherbrooke pour les prochaines années se concentreront sur le tourisme d'affaires. Allo Houston. S'il y a une chose certaine dans le contexte actuel, c'est que nous sommes très loin du temps où l'on réunira dans une salle des gens pour tenir un congrès ou des rencontres d'affaires. Le tourisme d'affaires est peut-être une orientation souhaitable, mais pas dans un avenir prévisible.
Une occasion manquée...
Faire preuve d'un réel leadership dans l'époque que nous vivons c'est gérer la crise bien sûr en allant au plus urgent, mais c'est aussi préparer l'avenir. Quel avenir pour notre ville dans l'après-pandémie ! Cet avenir ne peut se décider en vase clos entre élus, mais avec les parties prenantes de tout le territoire. Des technologies diverses de rencontres virtuelles comme Windows Team, Zoom ou encore GoToMeeting permettraient de réunir les parties prenantes de notre développement économique et de tracer les lignes de notre avenir qui ne sera plus le même que celui que nous envisagions il y a quelques mois à peine. On aurait pu s'attendre à ce que ce rôle de leadership pour dessiner notre avenir soit pris en charge par le maire de notre ville. C'est son rôle, c'est lui le coq de notre village. Chose certaine, Jean Perrault ou Bernard Sévigny aurait géré cette crise autrement et j'ai la conviction qu'ils seraient déjà à l'œuvre pour bâtir notre avenir de concert avec tous les intervenants de notre milieu.
Au lieu de cela, nous avons droit à ces chicanes de gouvernance et à des débats stériles sur l'accès à l'information et sur le refus de donner accès à la population à l'état réel de nos finances publiques dans le sillon de cette crise qui est du jamais vu pour l'humanité. Je ne veux pas me faire trop critique, mais cette situation doit être dénoncée dans l'espoir d'assister à un revirement de situation. Notre ville et notre maire ont un rôle important à jouer et ils doivent le jouer. Il en va de notre avenir. Le maire et nos conseillers élus doivent prendre acte qu'il y a tout un monde entre gérer une crise ou en créer une. À eux de prendre le taureau par les cornes. À Sherbrooke, on doit faire la différence entre gérer ou créer une crise...