Surprise cette semaine. Par le biais du bureau de son mari, madame Laureen Harper a envoyé une lettre au président iranien, Mahmoud Ahmadinejad. Elle y dénonçait le fait qu'une femme iranienne, reconnue coupable d'adultère, risque la peine de mort par lapidation.
Vous comprendrez que ma surprise ne se situe ni dans le fait que madame Harper porte le nom de son mari ou encore que l'information soit dispensée à partir du bureau du premier ministre. Tout ça n'a rien de surprenant. Par contre, qu'elle prenne position dans un dossier de cette nature me surprend. Et j'applaudis.
Ma colère ne concerne donc en rien le geste de madame Harper, ni l'extraordinaire stupidité de la possibilité de mise à mort de l'Iranienne en question. Elle concerne autre chose. Et je dois vous dire que j'ai attendu avant d'écrire sur le sujet. Je voulais me tester. Voir si j'allais me calmer. Mais non. Pas du tout. Je vous parle donc d'Omar Khadr.
Je ne cherche surtout pas à faire de Khadr un martyre. Loin de là. Je ne sais pas exactement ce qui est arrivé sur le terrain. Mais je sais certaines choses, cela dit.
Je sais que, d'abord, c'est un citoyen canadien. Né ici. C'est comme ça. Et à ce titre, il a des droits. Mais le gouvernement fédéral ne semble pas le voir ainsi. On l'a laissé à Guantánamo, cette prison volontairement située hors territoire, permettant aux Américains de se soustraire aux normes régissant, entre autres, la torture.
Je sais aussi que Khadr était adolescent au moment de l'agression mortelle qu'on lui reproche. Il avait 15 ans. C'était un enfant de la guerre. Ça aussi, ça ne compte plus, subitement. Et le fédéral là-dedans? Le silence. Ce type de silence qui semble cache une sorte de « ben bon pour lui ». Vous me trouvez méchant, vraiment? Jamais autant que l'attitude de notre gouvernement. Je reçois le message qu'il y a des sortes de Canadiens et que quelqu'un décidera ceux qui sont de la bonne sorte...
Je sais aussi qu'on a fait parader Khadr devant un cirque militaire qui devait déterminer sa peine. La femme du soldat est venue raconter pendant 45 minutes combien son mari était un homme bon. Les enfants de la victime ont reproché à Kadhr d'avoir anéanti leur relation avec le papa qu'ils n'auront pas vraiment connu... Cette mascarade, bien que touchante, était complètement déplacée. Nous sommes au tribunal, pas à Oprah Winfrey! Eh! Puis, bordel, ils étaient à la guerre. La guerre! Les Américains n'ont tué personne, j'imagine? A-t-on fait écrire une lettre aux enfants des soldats ennemis pour dire qu'ils ont de la peine?
Mais, visiblement, la vie d'un Américain a bien plus de valeur que n'importe quelle autre...
Vous voyez, je suis en colère. Et parfois, je fais dans le sarcasme dans ces moments-là. Ce grand peuple américain qui s'admire tant, celui-là même qui vient de donner une jambette à son nouveau président et s'apprête à vivre un grand virage à droite, ce grand peuple qui n'en finit plus d'imprimer de l'argent pour redémarrer une économie que Bush a largement contribué à massacrer, ce grand peuple, donc, a décidé de frapper, avec hargne, sur un jeune homme qui avait 15 ans au début du sale traitement... Courageux, le grand peuple américain! Et tout ça, pendant que le gouvernement Harper regarde ailleurs, faisant semblant qu'il ne voit rien. Pitoyable. Khadr est Canadien. S'il a gaffé, qu'il paie ici de ce qu'il a à payer. Point.
Je prends donc ce qui me reste de calme et je vous demande, simplement, madame Harper, si vous ne pourriez pas écrire à votre mari pour dénoncer le fait qu'il n'a lui-même rien dénoncé...
Clin d'œil de la semaine
En Amérique, on dit d'une personne qui réussit qu'il ou elle est homme ou femme de carrière. S'il fallait régler à coups de pierre chaque cas d'adultère, les carrières seraient peut-être plus vides...