Votre
psy vous l'a dit souvent. Vos proches aussi : « Définis tes attentes
et tu verras, tout se mettra en place.»
C'est à
ça que je pensais après cette entrevue accordée par Émile Proulx-Cloutier sur
le plateau de Pénélope dernièrement. Il parlait éducation. Il a joué dans
« Trente vies » et abordait
la question des attentes que nous avons envers le système scolaire.
Parenthèse.
J'ai
tout de suite accroché au mot « attentes ». S'il est une virgule dans
laquelle je m'accroche souvent, au fil de mes réflexions, c'est bien celle des
attentes. Comme dans une phrase : une virgule qui vient isoler un mot, le
débarquer du flot des autres, le mettre en évidence, mais sans arrêter
complètement la phrase. Point.
Les
attentes, ça, on en a. De toutes les sortes.
Dans une
économie basée presque exclusivement sur la consommation, les publicitaires
définissent leurs actions en mettant en valeur les attentes du client. À
tout prix, satisfaire les attentes du client. Et le client, lui (c'est vous et
c'est moi), est submergé d'offres toutes plus exclusives les unes que les
autres, des offres ciselées sur ce qui est prétendu être "nos attentes".
Et, invariablement, il y a cette incitation à acheter, ce « call to
action » à la fin du message. D'abord, vendre le « look and
feel » du produit ou service et revenir avec un « call to
action » qui aidera le client à satisfaire ses attentes. Voilà l'équation
du bonheur moderne. (Parenthèse dans la
parenthèse : je sais que c'est énervant de parler publicité en utilisant
des termes en anglais, mais il semble que pour être de son temps, en publicité,
il faut utiliser plein de formules en anglais. C'est rare, un publicitaire qui
s'exprime en français d'un bout à l'autre. C'est pourtant une de mes attentes.
Mais bon).
Nous
sommes des consommateurs et des contribuables aux attentes élevées. Si on exige
de moi une performance dans mon boulot comme dans ma vie pour faire ma place en
société, je peux bien avoir des attentes envers tout et rien, non? Merde, ce
qu'on exige de moi, je peux l'exiger aux autres, non?
Fin de
la parenthèse.
Émile
Proulx-Cloutier continue son exposé : l'éducation n'a pas le statut qui
correspond aux attentes qu'on a envers elle.
« Définis
tes attentes et tu verras, tout se mettra en place». Les attentes, c'est bien
beau, effectivement, mais encore faut-il se donner les moyens d'atteindre nos
objectifs. Et là, on tombe dans la pensée magique. On fait entrer l'éducation
dans l'équation mathématique qui régit notre gouvernement : il faut
soustraire des coûts et diviser des effectifs (vivement les fractions) tout en
répondant adéquatement aux attentes des parents.
C'est
aussi possible et utile que de lancer un message dans l'univers sans rien faire
après.
Avoir
des attentes, c'est bien beau. Mais il faudra s'arrêter et constater. Le
gouvernement claironne que nous sommes en état d'assainissement des finances
(il a cessé de parler d'austérité même s'il en applique les principes) et dicte
ses règles. La réflexion est où? Nulle part. On a décidé des actions à prendre
au nom d'un système économique sans définir nos attentes légitimes par rapport
au système d'éducation, entre autres. On applique « les vraies
affaires » sans avoir discuté des « vraies affaires ».
D'un
côté, on regarde l'assiette des revenus de l'État sans se demander si l'équité
n'imposerait pas une contribution plus grande de grands joueurs économiques,
pendant que de l'autre, on coupe partout égal, nonobstant les besoins réels.
Le
fédéral pellette dans la cour des provinces qui pellettent dans la cour des
municipalités.
Au bout,
il n'y a qu'un contribuable qui gère le tas.
Et on se
fait élire en disant répondre aux attentes de ce contribuable.
C'est
drôle, mes attentes sont autres...
Clin
d'œil de la semaine
Ce n'est
pas dans la salle des attentes que le bon diagnostic va tomber...
*qu'on
devrait appeler instruction, l'éducation se donnant à la maison, il me semble