Personne ne peut rester insensible à la dérive des
manifestations étudiantes de l'UQAM cette dernière semaine. On ne peut non plus
cautionner les événements antidémocratiques qui ont eu cours en marge des
assemblées générales du Cégep du Vieux-Montréal.
Le mouvement étudiant qui a
connu de meilleures années apparaît aujourd'hui comme gangrené par la main mise
d'une minorité « d'anarchistes jusqu'au-boutistes » sur ses
destinées. Il est temps, plus que temps, que les étudiants reprennent le
contrôle de leur vie démocratique. On ne peut tout excuser au nom de la
jeunesse et du combat de la « méchante austérité ».
Ce dont il est question aujourd'hui, ce n'est pas un débat
entre valeurs différentes, mais bel et bien d'un détournement de notre vie
démocratique au profit d'une vision anarcho syndicale que Marx et Engels
appelaient la maladie infantile du communisme au 19e siècle. Regards
critiques sur le mouvement étudiant québécois.
Retour sur
images
À la fin des années 1970, le mouvement étudiant ainsi
que les organisations populaires et syndicales avaient fait l'objet de
kidnapping de leur raison d'être par les organisations d'extrême gauche de
différentes obédiences par ce que l'on a, par la suite, qualifié de stratégie
d'entrisme. Les militants des groupuscules d'extrême gauche avaient pris le
contrôle des différentes organisations étudiantes populaires et syndicales. À
cette époque, des leaders étudiants avaient repris le contrôle de leurs
organisations en boutant dehors les radicaux gauchistes qui contrôlaient leurs
débats et leurs vies démocratiques. Aujourd'hui, il faut que les étudiants qui
croient aux valeurs démocratiques reprennent leur bien et s'investissent
collectivement pour reprendre le contrôle de leur vie démocratique.
Redonner du
sens
Je suis partisan de l'exercice de la démocratie au sein des
organismes étudiants. J'ai moi-même été un produit de cette vie associative et
cela m'a formé à mes droits civiques et m'a conduit à m'impliquer dans la vie
politique. Le problème n'est pas que l'on puisse retrouver chez les étudiants
des partisans de l'anarchie ou des gauchistes pressés, mais plutôt que ces
derniers évacuent par des moyens pour le moins discutables le courant modéré
omniprésent parmi la communauté étudiante.
Les étudiants, comme les citoyens, ont des opinions très
variées sur les faits de notre vie en société. On retrouve parmi cette
communauté une pluralité d'opinions de droite et de gauche et surtout beaucoup
de pas d'opinions. C'est bien là le drame. La nature ayant horreur du vide, les
militants purs et durs profitent du désintérêt de la majorité des étudiants
pour s'emparer de leur organisation.
S'il est évident que la judiciarisation actuelle du conflit
étudiant résulte de la culture de l'individualisme et du consumérisme, il n'en
demeure pas moins que l'on peut paralyser la vie de nos institutions
d'éducation et priver une majorité de citoyens de leur droit à vaquer à leur
occupation sous de fallacieux prétextes comme le combat de l'austérité où de la
civilisation des hydrocarbures. Il y a un endroit dans une société libre et
démocratique pour mener ces combats et c'est l'arène politique au sens large,
incluant l'espace public où se déploie l'action des mouvements syndicaux et sociaux :
la rue.
Se
réapproprier notre vie démocratique
Une tâche immense nous attend tous. Nous devons tous
ensemble nous réapproprier notre vie démocratique. Il faut investir les partis
politiques, les mouvements sociaux. Il faut débattre collectivement de ce que
nous voulons comme avenir. Notre vouloir-vivre ensemble a besoin d'une cure de
santé et nous avons le devoir de mettre bien haut dans nos priorités les
valeurs démocratiques qui fondent notre vie en société. Il faut, plus que
jamais, dénoncer les truismes maladifs comme celui voulant que la violence de
l'État et de ses forces de l'ordre légitiment les actes de vandalisme d'une
minorité de têtes brûlées.
Oui, il faudra un jour revoir la Loi sur la reconnaissance
des associations étudiantes et baliser les manifestations de ses diverses
actions possibles. Le temps n'est cependant pas à la tenue de ces débats
fondamentaux pour l'avenir de la vie démocratique étudiante. Le temps se prête
plutôt à l'implication accrue des étudiants dans la vie de leurs associations
afin d'expurger de ses rangs cette minorité active et opiniâtre qui cherche à
instaurer à demeure une culture de voyous étrangère à notre identité profonde
de Québécois.