Je l'ai écrit la semaine dernière dans cet espace. La
rentrée politique est bel et bien en cours. Au menu de la dernière semaine,
Bernard Drainville, notre ministre de l'Éducation à la larme facile, est aux prises
avec des problèmes de pénurie d'enseignants, Justin Trudeau plonge dans un
dossier qui n'est pas le sien de la crise du logement et Trump fait encore des
siennes aux États-Unis en se moquant du système de justice. Sur le plan local,
les villes poursuivent leurs rhétoriques sur leur manque de ressources
financières, pourtant, elle ne cesse d'élargir leurs champs de préoccupations
en finançant là-bas des paniers bébés, ici des subventions aux vélos
électriques. D'où vient cette idée un peu folle que l'assiette de la taxe
foncière serve à financer des programmes comme l'achat de vélos électriques
pour des biens nantis ? Nos taxes foncières doivent-elles servir à de telles
fins ? Comment expliquer que les villes qui veulent jouer le rôle de
gouvernement de proximité s'immiscent ainsi dans des programmes de soutien aux
personnes ? Le point sur l'évolution de nos impôts fonciers et de leur
utilisation.
Dépenses liées aux personnes vs
dépenses liées à la propriété
Les dépenses liées à la propriété et les dépenses liées aux
personnes sont deux catégories distinctes dans les finances municipales,
reflétant les différentes manières dont les municipalités allouent leurs
ressources budgétaires pour fournir des services et répondre aux besoins de la
communauté. Si l'on prend d'abord les dépenses liées à la propriété. On
constate que cette catégorie englobe les dépenses associées à la gestion et à l'entretien
des biens municipaux, tels que les infrastructures publiques, les bâtiments,
les routes, les parcs, les installations sportives, les réseaux d'eau et d'assainissement,
etc. Ces dépenses comprennent généralement les coûts de construction, de
rénovation, de réparation, d'entretien et d'amélioration des biens municipaux.
Les dépenses liées à la propriété visent à assurer que les infrastructures et
les équipements de la ville restent fonctionnels, sûrs et attrayants pour les résidents
et les visiteurs. Cela a constitué pendant longtemps le cœur de la vocation des
municipalités. Dis en terme simple, les villes sont là pour fournir de l'eau,
des voies d'accès et des installations publiques pour la pratique des sports et
des loisirs à leurs citoyennes et citoyens.
L'autre catégorie, les dépenses liées aux personnes, est celle qui
est associée aux services directs fournis aux résidants et aux membres de la
communauté. Cela peut inclure les coûts associés à l'éducation, aux soins de
santé, à la sécurité publique, aux services sociaux, aux loisirs, à la culture,
aux bibliothèques, etc. Les dépenses liées aux personnes visent à répondre aux
besoins et aux aspirations des citoyennes et des citoyens en offrant des
services et des programmes qui améliorent leur qualité de vie et leur
bien-être.
Il est important de noter que la répartition des dépenses entre
ces deux catégories peut varier d'une municipalité à l'autre en fonction des
priorités locales, des besoins de la communauté et des ressources financières
disponibles. Certains budgets municipaux peuvent accorder plus d'importance aux
dépenses reliées à la propriété pour maintenir les infrastructures en bon état,
tandis que d'autres peuvent mettre l'accent sur les dépenses liées aux
personnes pour fournir des services sociaux et éducatifs de haute qualité.
Avec le concept de plus en plus populaire de gouvernement de
proximité, les villes dépensent de plus en plus dans des secteurs liés aux
personnes. Cela est plus populaire auprès de la population sur le plan
électoral et cela répond en partie au désengagement de l'État québécois de ses
responsabilités en matière de services sociaux. En prime, il est reconnu que
les gouvernements les plus proches sont souvent plus aptes à gérer des services
de proximité avec sa population même si, c'est là que le bât blesse, cela n'est
pas accompagné des ressources financières adéquates. Ce qui vient accentuer la
pression sur les finances municipales et sur nos impôts fonciers.
La tendance des 25 dernières années
L'évolution des dépenses municipales au Québec au
cours des 25 dernières années se caractérise par une plus grande part liée
aux dépenses aux personnes plutôt que les dépenses plus traditionnelles liées à
la propriété.
Il est important de noter que les dépenses
municipales peuvent varier considérablement d'une municipalité à l'autre en
fonction de plusieurs facteurs tels que la taille de la municipalité, sa
population, ses priorités budgétaires et ses projets de développement. En
général, cependant, voici six tendances qui ont influencé l'évolution des
dépenses municipales au Québec sur une période de 25 ans : d'abord,
la croissance démographique et l'urbanisation. Les municipalités connaissent
souvent une croissance de la population et de l'urbanisation, ce qui peut
entraîner une augmentation des dépenses pour répondre aux besoins croissants en
services publics tels que l'eau, l'assainissement, les transports en commun,
les services de police et de pompiers, etc.
Le développement des infrastructures est aussi un
facteur important à prendre en compte. Au fil des années, les municipalités ont
peut-être dû investir dans la construction, la rénovation et l'entretien des
infrastructures telles que les routes, les ponts, les parcs, les bâtiments
municipaux, etc. Ces projets peuvent avoir un impact significatif sur les
dépenses.
De plus, il y a la croissance des besoins de la
population souvent due au désengagement de l'État québécois. Les besoins en
matière de services sociaux, tels que les programmes de logement abordable, les
centres de loisirs et les activités culturelles, peuvent évoluer en fonction
des besoins changeants de la population.
Comment ne pas évoquer l'inflation qui fait rage en
ce moment et qui est au cœur du débat public ? L'inflation peut entraîner une
augmentation des coûts opérationnels pour les municipalités, notamment en ce
qui concerne les salaires des employés municipaux, les coûts des contrats, des
fournitures et des infrastructures.
Enfin, il y a des projets spécifiques comme la Well
Sud. Des projets particuliers, tels que des initiatives de développement économique,
de revitalisation urbaine ou de durabilité environnementale, qui viennent également
influencer les dépenses municipales au fil du temps.
Le désengagement de l'État québécois a aussi joué un
rôle important. Les politiques de financement du gouvernement provincial
peuvent influencer les ressources financières disponibles pour les
municipalités. Des transferts de fonds ou des changements dans la formule de
financement peuvent avoir un impact sur les dépenses municipales. Sans compter
les pressions fiscales du milieu liées à des enjeux particuliers.
À la lumière de ces tendances lourdes, on comprend
que peu de villes peuvent échapper aux pressions sur leurs budgets et les choix
déchirants qu'elles doivent faire année après année pour contrôler l'augmentation
du compte de taxes de leurs citoyens. Il n'est pas étonnant que les villes
plaident pour de nouvelles sources de revenus et qu'elle demande au
gouvernement du Québec d'injecter plus de fonds dans les programmes qui leur
sont destinés. C'est aussi ce qui explique que les villes cherchent à taxer de
nouvelles choses comme les terrains vacants, les piscines ou encore le
stationnement sur rues.
Les choix qui sont faits
Même si l'on peut comprendre que les villes ne peuvent échapper à
ces tendances lourdes, nous pouvons tout de même contester certains choix qui
sont faits par nos élus. La question qui tue est la suivante : pourquoi
cette fuite en avant dans les dépenses liées aux personnes plutôt que de
recentrer leurs préoccupations et notre argent sur des dépenses liées à la
propriété ? Est-il essentiel de financer des vélos électriques, des couches
lavables pour bébé ou des programmes pour contrer la crise du logement ? Ces
questions devraient être au cœur des campagnes électorales municipales. Taxer
la propriété pour faire l'impasse sur le désengagement des paliers de
gouvernement supérieur n'est peut-être pas la solution du siècle. Après tout, à
la fin c'est nous qui payons et nous avons le droit de vouloir que les taxes
sur nos propriétés ne servent pas à financer des dépenses liées aux personnes.
Pourquoi donner 500 $ à des gens aisés pour qu'ils s'achètent des vélos électriques
à 5 000 $ ? Ce n'est pas le rôle de notre compte de taxes.