Samedi. L'esprit
est à la fête. Il fait beau. Deux jeunes amoureux ont réuni parents et amis
pour prendre un engagement l'un envers l'autre. Mère Nature répand sa
bienfaisante chaleur et gratifiera les convives d'un coucher de soleil dont les
teintes chaudes annoncent des lendemains heureux.
Les
lendemains.
Tout
autour, les enfants courent et jouent. Les bébés sont cajolés et semblent
apprécier le cirque autour.
Et je pense
aux lendemains. Et j'hésite un peu.
Entre la
crainte et l'espoir, mon esprit vacille. Crainte que demain sera moins
ensoleillé pour ces enfants. Je parle du demain de 2050 et 2060 qu'ils
connaîtront. Espoir que demain ira mieux, en même temps. Ce sont les sourires
engagés que cette petite fille d'un an à peine distribuait sans restrictions
qui m'ont orienté vers l'espoir.
Et là,
je me demande ce que ça va prendre pour que cet espoir se manifeste vraiment?
Et il me revient cet état d'esprit ambiant qui me vire à l'envers.
Malgré
notre monde tellement aseptisé, je me lance!
Je l'ai
écrit souvent, nous sommes au sommet de la courbe du moi dans notre
société. Le moi qu'on n'arrête pas de définir. Et de redéfinir...Le moi
qui a été cultivé par les parents, évidemment. Un moi puissant. Qui
ramène tout à soi.
« J'peux-tu
vivre dans un safe space? Me semble que c'est la base! »
Le safe
space, je le comprends comme un endroit et/ou un moment dans lequel je ne
peux être agressé d'aucune façon.
Un
endroit et/ou un moment où le mot en « N » ne sera jamais prononcé,
même dans un cours d'histoire; où tout le monde m'acceptera exactement comme je
veux l'être, socialement comme sexuellement; où aucune microagression ne
m'atteindra, que ce soit de la part d'un professeur, d'un parent ou de qui que
ce soit, en fait.
Les
microagressions... J'ai entendu une personne affirmer qu'elle a subi une
microagression dès sa naissance alors que la sage-femme a eu le culot de
dire : « c'est un garçon!" "On peut-tu laisser un humain décider de
son genre ? », a-t-elle lancé.
Pour
moi, ce type de raisonnement est un point de bascule.
De toute
façon, un monde sans microagression, c'est synonyme d'un monde de licornes!
Deux éléments
me frappent d'emblée. Ne craignant que mon courage, je les nomme!
Premièrement,
cette fascination du moi qui victimise et prend toute la place. Comment peut-on se croire assez important pour
penser que tout s'adaptera à nous, incluant nos changements de comportements ou
d'opinions, sans préavis et en temps réel? Plus on se concentre sur notre moi
et plus il faut intensifier son statut de victime.
Mais
tout ça mène à un cul-de-sac, puisque c'est le moi qui décide de ce qui
l'agresse! Et il faut que ce moi se sente satisfait de la réaction de la
société envers son individualité précieuse. Si le moi a des doutes, il
en remet une couche. Et le moi se victimise encore plus au nom de ses
valeurs qu'il peut aussi moduler au gré de son ressenti! C'est pas beau, ça?
Deuxièmement,
je me dis que, quand un individu agit de la sorte, c'est qu'il vit dans un
cocon assez confortable pour que ses plus grands enjeux soient par rapport à sa
propre individualité.
À défaut
de quête collective, on y va pour une quête individuelle. Après tout, l'humain
est une bête qui cherche un sens...
Il
est où, l'espoir, il est où?
D'abord,
Je l'affirme : je suis un « inclusif ». Au point d'accepter de considérer
de bonne foi ce qui me heurte. Définir ce qu'on est demeure important pour
l'équilibre personnel. Mais cette quête n'est pas le seul élément qui importe.
J'ai pourtant l'impression que, dans plusieurs cas, ça prend tout l'espace.
Notre
monde fait face à enjeux qui deviennent moins théoriques de jour en jour. La
guerre s'invite un peu partout sur la Terre, l'environnement exprime ce qu'on
lui fait subir par des événements climatiques inédits, etc.
Face aux
enjeux, le moi excessif laissera pas mal de place au nous
essentiel. Une nécessaire solidarité s'imposera, apportant toute sa force dans
la recherche de sens qui nous anime. La nécessité viendra brasser la créativité
collective vitale qui semble dormir présentement. Et tout ça formera une
formidable recherche de sens collective.
Je demeure
craintif, mais j'opte pour le seul choix qui me semble possible : l'espoir.
Clin
d'œil de la semaine
Quand, à
cause de la souffrance qu'il incarne, on condamnera le mot guerre, on le
réduira au mot en « G ». Et on prétendra que, parce qu'on n'en parle
plus, elle n'existe plus...