À moins d'un an des élections au Québec, toutes les formations politiques se positionnent. Les commentateurs de la chose politique accordent beaucoup d'attention aux manœuvres des libéraux, des péquistes et des caquistes, mais on évoque plus rarement ce qui se passe du côté des solidaires. Pourtant, cette jeune formation politique est très active. Elle pose souvent des gestes audacieux et elle fait preuve de beaucoup d'habiletés stratégiques et tactiques.
Il s'agit de voir comment ils se sont implantés dans plusieurs régions en se servant du levier municipal. Ici à Sherbrooke, cette mouvance a même réussi à faire élire une conseillère et l'une de ses candidates du parti Sherbrooke citoyen sera la candidate de Québec Solidaire dans Sherbrooke. Tout cela mérite que l'on cherche à mieux comprendre ce qui motive Québec solidaire et surtout comprendre les idées et les projets qui sont portés par les membres de cette formation politique. Tentative d'appréhension de la réalité de Québec solidaire.
D'où vient Québec solidaire?
Faisons appel à Wikipédia pour bien comprendre les origines de Québec solidaire :
« Québec solidaire est le fruit de la fusion en 2006 de deux entités politiques de gauche au Québec : l'Union des forces progressistes, parti fondé en 2002, et Option citoyenne fondée en 2004. Les principaux porte-parole des deux organisations, Amir Khadir et Françoise David, sont devenus les premiers porte-parole du nouveau parti. Dès novembre 2004, les exécutifs de l'Union des forces progressistes et d'Option citoyenne avaient entamé des pourparlers en vue d'une fusion. À la fin de l'année 2005, en réponse au manifeste Pour un Québec lucide, un document appelant à s'attaquer collectivement au fardeau de la dette publique du Québec, plusieurs personnalités, dont les principaux dirigeants d'Option citoyenne et de l'UFP, Françoise David et Amir Khadir, signent le Manifeste pour un Québec solidaire . Le nom de ce manifeste est finalement repris lors du Congrès de fondation du nouveau parti : l'Union des forces progressistes et Option citoyenne deviennent "Québec solidaire". »
Ici, il est important de rappeler que l'Union des forces progressistes regroupait les partis politiques suivants : le Parti communiste du Québec, le Nouveau parti démocratique du Québec, le Parti de la démocratie socialiste, le Rassemblement pour l'Alternative progressiste et l'Union des forces progressistes du Québec. Ces partis de gauche et d'extrême gauche se sont réunis avec Option citoyenne de Françoise David.
Regroupement de gauche, les solidaires ont marqué l'imagination par de nouvelles façons de faire de la politique et surtout par le charisme de ses leaders originaux, Amir Khadir et Françoise David. Madame David avait offert une performance digne de mention lors du débat des chefs à la dernière élection en mars 2014. Québec solidaire s'est aussi doté d'orientations claires qui se distinguent nettement des autres formations politiques : son programme repose sur les mots suivants : écologiste, progressiste, sociale-démocrate, féministe, altermondialiste et pluraliste. Bref, de la tarte aux pommes pour bien des gens qui partagent ces valeurs. Néanmoins, un examen attentif des orientations précises du programme politique que l'on peut retrouver sur leur site Web permet de mieux apprécier les véritables intentions de cette jeune formation politique.
Les orientations de Québec solidaire
La première orientation majeure de Québec solidaire est de s'opposer à l'économie libérale et au capitalisme. Non pas comme les sociaux-démocrates péquistes qui voulaient que l'État joue un plus grand rôle, mais plutôt en nationalisant de larges pans de l'économie québécoise : « Le système capitaliste produit les inégalités sociales, les destructions environnementales et renforce le sexisme et le racisme en maintenant de nombreux groupes et de nombreuses personnes dans la pauvreté. Dans l'élaboration du présent programme, Québec solidaire s'est donc donné un double objectif : viser la démocratisation de l'économie et revaloriser le rôle de l'État comme acteur de transformations sociales ».
En toute justice, il faut reconnaître que le programme de Québec solidaire laisse une certaine place à l'entreprise privée, les PME, mais il ne cache pas que c'est une transition, car l'objectif avoué est de : « Québec solidaire vise, à long terme, la socialisation des activités économiques. Ce processus de transformation sociale reposera, notamment, sur une économie publique forte (secteur des services publics, société d'État et nationalisation de grandes entreprises dans certains secteurs stratégiques) et sur une économie sociale à promouvoir et à développer (coopérative, secteur communautaire, entreprise d'économie sociale). » (Loc. cit.)
Nationaliser les banques et hausser le salaire minimum
Québec solidaire veut notamment nationaliser le secteur financier et réduire le rôle des banques dans l'économie. « Afin de concurrencer avec les banques privées et ainsi fournir des services de proximité et abordables pour la population, il est proposé d'instituer une banque d'État, soit par la création d'une nouvelle institution, soit par la nationalisation partielle du système bancaire. Réglementer le système banquier ─ considéré comme un service public ─ afin que les banques commerciales reviennent à leur fonction première d'intermédiation entre l'épargne et le crédit, que la spéculation, notamment sur les devises, soit interdite et que les frais administratifs imposés aux clients soient adéquatement contrôlés. » (Loc. cit.)
De façon générale, Québec solidaire veut hausser le salaire minimum; étatiser de larges pans de l'économie; abolir l'automobile comme mode de déplacement privilégié en faisant la promotion du transport en commun électrique; revoir les modèles familiaux; faire du Québec un pays pluraliste et de nombreuses autres idées en matière de mines, de forêts, d'immigration, de lois du travail. Je vous invite à aller sur le site de Québec solidaire et à lire leur programme.
Transformer le Québec et abolir le capitalisme
À dire vrai, les militantes et les militants de Québec solidaire ont accompli du bon boulot et ils sont prêts à mettre en œuvre un programme ambitieux qui transformerait à tout jamais le Québec. Les porte-parole actuels de Québec solidaire Manon Massé et Gabriel Nadeau-Dubois ont le sens de la formule et ils savant capter l'attention des médias avec des formules-chocs qui font la joie des commentateurs politiques. Québec solidaire sait aussi comment rejoindre la jeunesse et utilise de façon fort efficace les nouveaux médias et les réseaux sociaux. À témoin, cette idée d'assemblée de cuisine partout au Québec en utilisant comme outil de mobilisation le Web et les médias sociaux. Ils sont aussi habiles à s'associer à des gens représentant des secteurs économiques qu'ils veulent nationaliser, mais qui sont réputés pour avoir du cœur comme cette association avec l'homme d'affaires Peter Simons. Il y a aussi cette idée de lancer une pétition demandant le renvoi du ministre libéral Gaétan Barrette sur leur site afin de recueillir des renseignements utiles à se construire une base de données en prévision du prochain scrutin.
Facilité d'indignation, capacité de rejoindre la jeunesse et fort d'une tradition militante de mobilisation, Québec solidaire peut être un adversaire redoutable dans les milieux urbains et/ou l'on retrouve une jeunesse scolarisée. Un gouvernement Québec solidaire n'est pas pour demain, néanmoins il faut savoir avant de se laisser séduire par les ténors de Québec solidaire que ce que recherchent ces militantes et militants est de transformer profondément le Québec, d'abolir le capitalisme et de modifier en profondeur les rapports sociaux ambiants. C'est peut-être une bonne idée d'abolir le capitalisme au Québec. Il vaut mieux néanmoins savoir avant plutôt qu'après que l'un des objectifs de QS c'est de nationaliser les dépanneurs de Couche-Tard...