Dans le brouhaha du retour de notre classe politique, souventes fois nous sommes emportés par l'actualité du jour, les faits divers ou une crise politique qui se succèdent nous faisant oublier des choses essentielles. C'est notamment le cas avec le projet de loi no 40 du gouvernement Legault qui vise à abolir les élections scolaires, les commissaires scolaires.
Tenant à une idée du programme politique de l'ex-ADQ de Mario Dumont, le gouvernement Legault s'entête, et son ministre de l'Éducation, Jean-François Roberge s'en fait le thuriféraire, et présente son projet de loi no 40 comme une panacée alors qu'il n'apporte aucune amélioration notable sauf de brasser des structures pour des motifs idéologiques.
Le projet de loi no 40 n'aidera en rien à la réussite éducative des élèves et sera plutôt une occasion d'une plus grande centralisation encore du réseau de l'éducation tout en faisant disparaître un palier démocratique qui agit comme contrepoids utile à la volonté toute puissante de la machine du ministère de l'Éducation et du ministre. Le projet de loi no 40 est un mauvais projet qui doit être retiré.
L'Estrie se mobilise
Le 24 janvier dernier, de nombreuses personnalités de la région dont l'ancienne mairesse de Lac-Mégantic, Colette Roy-Laroche, l'homme d'affaires sherbrookois Jocelyn Thibault, l'ex-président de la Conférence économique régionale, Maurice Bernier, le maire de Weedon et président du comité Ose le Haut, Richard Tanguay ainsi que le président de la chambre de commerce et d'industrie de Sherbrooke, Réjean Caouette se sont levés pour signifier au gouvernement leur opposition à ce projet de Loi qui vise à abolir les commissions scolaires. Des hommes et des femmes qui n'ont d'autre intérêt que la préservation d'un palier démocratique et qui ont à cœur la réussite des élèves, notre relève, notre avenir.
Il a été rafraîchissant de voir que ces personnalités ne se sont pas laissées berner par la rhétorique gouvernementale qui veut faire croire que rien ne changera avec ce projet de Loi à part les dépenses inutiles liées aux élections scolaires et le gaspillage des commissions scolaires. Depuis le dépôt de ce projet de loi, le gouvernement Legault a fait preuve de beaucoup de mépris envers ces femmes et ces hommes dévoués qui consacrent beaucoup de temps à l'administration de la chose scolaire. Un mépris injustifié de la part du ministre Roberge qui viendra un jour le hanter. De nombreuses associations, des groupes et personnes s'opposent à ce projet de loi no 40. Le ministre Roberge en fait peu de cas, mais il devrait s'interroger puisque tous les partis d'opposition à l'Assemblée nationale s'opposent à son projet de Loi. Lorsque l'on est seul à avoir le pas, c'est peut-être que l'on fait fausse route.
Le projet de loi no 40 : un projet bâclé et improvisé
Le projet de loi no 40 présentement à l'étude à l'Assemblée nationale est un projet de loi improvisé, bâclé et qui souffre de nombreuses lacunes. Le gouvernement Legault doit retirer ce projet de loi et mettre en place une vaste consultation de toutes les parties prenantes afin de décider de l'avenir de nos structures scolaires. Nous croyons que la réussite éducative de nos enfants mérite mieux qu'un brassage de structure et nous souhaitons que le gouvernement agisse en fonction de leurs intérêts plutôt que de s'enfermer dans une logique de « je suis le plus fort parce que j'ai obtenu une majorité de sièges à l'Assemblée nationale. »
Réparer ce qui n'est pas brisé
Le projet de loi no 40 cherche à réparer ce qui n'est pas brisé. Le gouvernement fait fausse route. Plutôt que de s'attaquer aux vrais problèmes de l'éducation qui sont la pénurie d'enseignants, le manque de ressources professionnelles de soutien, l'inadéquation des locaux et la bureaucratisation accrue, le gouvernement choisit d'engager les forces vives du milieu dans de stériles luttes de pouvoir et de structures qui n'ont rien à voir avec la réussite éducative de nos enfants. Présenté sous de fausses représentations, le projet de loi no 40 ne donnera pas lieu à de réelles économies et en plus il viendra violer le principe de « pas de taxation sans représentation » tout en discriminant les francophones eu égard aux anglophones. Le projet de loi no 40 est un mauvais projet de loi qui constitue une vaste opération de centralisation du gouvernement Legault comparable à celle réalisée par l'ex-ministre Gaétan Barrette en Santé et Services sociaux aux dires même du principal intéressé.
Qui plus est, le projet de loi no 40 constituera une perte nette pour tous les intervenants du milieu. Une perte de stabilité dans le réseau et les écoles avec en trame de fonds la négociation et le renouvellement des conventions collectives. Une perte d'imputabilité politique locale au profit d'une centralisation ministérielle mise en œuvre à distance par des fonctionnaires. Une perte d'équité politique au profit d'une standardisation administrative. Une perte d'influence citoyenne et de pouvoir des régions où il n'est pas rare de faire des choix « non rentables » sur la base des valeurs partagées et d'une bonne connaissance du milieu. Une perte d'un contrepouvoir démocratique, celui des commissions scolaires, à celui du ministre omnipuissant dans le réseau de l'éducation et surtout un recul inacceptable pour les femmes en politique. Le palier scolaire est le seul palier politique ayant atteint la parité hommes-femmes au Québec et au Canada en plus d'être un tremplin reconnu pour les femmes qui veulent s'investir en politique.
Abolir les commissions scolaires : une fausse bonne idée
Abolir les commissions scolaires sans avoir réfléchi aux conséquences et surtout sans avoir accepté d'en débattre avec les principaux intéressés est une fausse bonne idée. Si demain, après que le gouvernement Legault aura passé le rouleau compresseur de sa majorité et employé le bâillon pour faire adopter son projet de loi, nous nous réveillons avec un réseau d'éducation encore plus centralisé et plus mal en point, nous pourrons dire que nous l'avions prédit.
Qui plus est, supprimer le palier scolaire c'est supprimer un palier démocratique où les femmes sont majoritaires. Dans une société qui ne cesse de dire que l'on veut que les femmes prennent plus de place, c'est improductif de venir ainsi abolir une structure où elles sont majoritaires en tant qu'élues.
Les députés de la CAQ de la région et nos élus municipaux qui ne l'ont pas fait doivent manifestement prendre position dans ce dossier. Nos députés locaux doivent prendre la parole et défendre nos structures démocratiques et ainsi joindre leurs voix aux hommes et aux femmes de chez nous qui se sont levés contre ce projet de loi. Le ministre de l'Éducation et le gouvernement Legault doivent reculer dans leur intention d'abolir les commissions scolaires et d'entreprendre un dialogue avec tous les intéressés sur l'avenir de notre réseau scolaire.
Il faut dire Non au bâillon et Oui à la démocratie et inviter le gouvernement Legault à cesser de brasser des structures pour ses idées fixes...