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Prendre parti…

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Daniel Nadeau Par Daniel Nadeau
Mercredi le 6 novembre 2024

Pour ou contre les partis politiques sur la scène municipale. Cette question semble diviser nos politiciennes et nos politiciens locaux, mais laisse totalement indifférente la population qui vote. Ce débat a eu un écho lors d'une dernière séance du conseil municipal où on a débattu de l'opportunité ou pas de permettre la pratique vécue, notamment à Montréal où un candidat à la mairie peut avoir un siège si la personne qu'il a choisie comme colistier gagne ses élections. Le débat s'est sans surprise campé dans des positions tranchées entre élus indépendants et membres de Sherbrooke citoyen.

L'organisation politique d'une ville est un levier essentiel pour une gouvernance efficace et participative. À Sherbrooke, comme dans d'autres municipalités, les partis politiques sont censés représenter les citoyennes et les citoyens et œuvrer pour le bien commun. Cependant, plusieurs critiques émergent quant à la pertinence des partis politiques municipaux. Personnellement, j'étais jadis plutôt favorable à l'idée. Aujourd'hui, mon point de vue sur cette question a évolué et je suis un peu dubitatif devant la présence de partis politiques à Sherbrooke. Cela mérite réflexion.

Ferment de fragmentation politique

Tout d'abord, il convient de souligner que les partis politiques ont généralement pour objectif d'unir des groupes d'individus autour d'une vision commune. Cependant, à Sherbrooke, la diversité des opinions et des enjeux locaux semble contredire cette approche. La ville est caractérisée par une population variée, avec des besoins et des préoccupations qui diffèrent selon les quartiers. Les partis, avec leurs plateformes souvent rigides, ont parfois tendance à cantonner les citoyennes et les citoyens dans des catégories prédéfinies, ce qui peut mener à une polarisation.

Cette fragmentation politique signifie que les discussions au sein du conseil municipal peuvent rapidement devenir des confrontations idéologiques. Les débats qui devraient porter sur des sujets vitaux pour la communauté peuvent être détournés en querelles entre clans politiques. Loin de favoriser le dialogue et la concertation, les partis peuvent alimenter le ressentiment et la méfiance entre leurs membres, ce qui est contradictoire avec l'idée de démocratie locale.

Le danger du clientélisme

Un autre aspect préoccupant des partis politiques municipaux à Sherbrooke est le risque de clientélisme. En s'appuyant sur des groupes d'appui propres à chaque parti, les élus peuvent être tentés de favoriser certains intérêts au détriment d'autres. Les décisions peuvent alors être influencées par des promesses électorales, plutôt que par une recherche de solutions objectives au bénéfice de l'ensemble de la population.

Ce phénomène est particulièrement visible dans des contextes où les enjeux locaux deviennent des instruments de pouvoir. Les partis peuvent manipuler le lien entre les élus et les usagers pour asseoir leur influence, créant ainsi un système où les intérêts particuliers priment sur le bien commun. Cette situation engendre une dissonance entre les intérêts politiques et les véritables besoins de la population.

Les caractéristiques démographiques de Sherbrooke

Autre problématique en lien avec la présence des partis, la composition de la population de Sherbrooke. Nous le savons, 25 % de la population de Sherbrooke est étudiante. Parmi cette population jeune, il est normal de retrouver plus de dynamisme, de militantisme et d'idées novatrices qui ne sont pas toujours partagées par la majorité des citoyennes et des citoyens. La dynamique d'un parti politique vient amplifier le phénomène de la mainmise d'un groupe particulier sur le processus électoral, en l'occurrence, dans mon propos, celui de la jeunesse étudiante. Cela n'est pas un problème en soi, mais c'est ce qui explique qu'à Sherbrooke, un parti politique comme Québec solidaire par exemple exerce une entreprise sur une ville aussi conservatrice que Sherbrooke. Ce dynamisme d'une jeunesse militante, jointe à l'apathie de la population pour la démocratie municipale, conduit à une sorte d'affaiblissement de cette dernière.

Une démocratie affaiblie

Le rôle des partis politiques est souvent clair : promouvoir la participation citoyenne et enrichir le débat démocratique. Pourtant, en concentrant le pouvoir entre les mains de quelques groupes, ils peuvent plutôt contribuer à éloigner la population des processus décisionnels. À Sherbrooke, cela est d'autant plus vrai dans un contexte où la méfiance envers les institutions est croissante. Les citoyennes et les citoyens peuvent se sentir délaissés et relégués à une place de simples spectateurs dans une démocratie qu'ils pensent de moins en moins participative.

En fait, cette dynamique peut créer un cercle vicieux où l'abstention se généralise, faisant que ceux qui restent mobilisés ne représentent qu'une portion restreinte de l'électorat. Ainsi, le véritable enjeu de la démocratie locale devient la légitimité des décisions prises, et non leur pertinence ou leur adaptation aux besoins de la communauté.

 

La solution : une démocratie participative

Par mon propos, je ne refuse pas l'innovation, mais il faut aller plus loin dans l'idée de la mise en œuvre d'une démocratie participative. Pour pallier les écueils des partis politiques traditionnels, des alternatives comme la démocratie participative devraient être envisagées. Ce modèle donnerait un plus grand pouvoir aux citoyennes et aux citoyens pour définir leurs propres priorités et contribuer activement à la gestion de leur communauté. À Sherbrooke, cela pourrait se traduire par des assemblées citoyennes, où des personnes choisies par tirage au sort pourraient débattre des enjeux locaux sans affiliation partisane, garantissant ainsi une représentation plus authentique des différents segments de la population.

Un tel modèle encouragerait des échanges constructifs, valorisant la collaboration plutôt que la confrontation. En réunissant des personnes d'horizons divers autour d'une table pour examiner des problèmes communs, la ville pourrait renforcer son tissu social tout en forgeant des solutions collectives. Cela représenterait un véritable pas en avant vers une démocratie qui respecte et intègre les voix de toutes et de tous.

L'échec de Sherbrooke citoyen

Le paysage politique municipal est souvent considéré comme un microcosme des enjeux plus larges qui touchent la société dans son ensemble. À Sherbrooke, un des partis qui a fait parler de lui ces dernières années est Sherbrooke Citoyen. Son échec teinte mon opinion sur l'à-propos des partis politiques à Sherbrooke.

Sherbrooke Citoyen a été fondé sur la promesse de revitaliser la scène politique locale en se distanciant des partis traditionnels. L'objectif était de représenter la population de manière plus authentique, en incorporant leurs préoccupations dans les décisions politiques. Porté par des idéaux de démocratie participative, Sherbrooke citoyen a tenté d'inclure des mécanismes permettant une meilleure participation de la communauté dans la gouvernance locale. En ce sens, son émergence a été accueillie avec optimisme, notamment par celles et ceux qui souhaitaient voir un changement dans l'approche politique.

À l'analyse, cependant, les réalisations de Sherbrooke citoyen sont mitigées. D'une part, le parti a réussi à attirer l'attention sur certains enjeux cruciaux, tels que le développement durable, la transparence budgétaire et la lutte contre les inégalités sociales. Des initiatives de sensibilisation mises en place sous son mandat ont permis d'impliquer une partie de la population dans des débats sur des questions importantes pour la ville. Par ailleurs, le parti a également pu proposer des alternatives aux projets municipaux controversés, suscitant un débat sur l'urbanisme et l'aménagement du territoire.

D'autre part, les résultats concrets des promesses faites sont, pour le moins, incertains. Les attentes élevées qui ont accompagné la création de Sherbrooke citoyen n'ont pas toujours été réalisées. Beaucoup de personnes se sentent déçues par le manque de suivi et d'aboutissement des projets annoncés, notamment en matière d'infrastructures communautaires, de services publics et de participation citoyenne.

La réponse des citoyennes et des citoyens face à Sherbrooke citoyen a varié considérablement. Au départ, un sentiment de renouveau animait les discussions autour du parti. Cependant, l'enthousiasme initial a été terni par des critiques de la part de personnes qui remettent en question la capacité du parti à transformer ses idéaux en actions concrètes. Selon plusieurs sondages, une partie importante de la population juge que les promesses de Sherbrooke citoyen demeurent largement non réalisées.

Cela en dit long sur la perception à long terme du parti dans l'esprit des électeurs. Le fait que des citoyennes et des citoyens expriment de la frustration devant la lenteur d'actions concernant des enjeux urgents est révélateur. La question de la représentation devient alors cruciale : Sherbrooke citoyen a-t-il véritablement écouté les voix des communautés, ou s'est-il embourbé dans ses propres visions idéologisées ? Je crois pour ma part que Sherbrooke citoyen a été un échec. Ce fut plus un groupe de pression porté au pouvoir qu'un parti de gouvernance.

Les partis politiques à Sherbrooke ?

En fait, l'existence de partis politiques sur la scène municipale à Sherbrooke me laisse un peu froid. C'est comme posséder un marteau dans son coffre d'outils. Celui-ci peut servir à construire une maison ou être utilisé comme arme offensive contre ses voisins ou sa famille. Le marteau n'est ni bon, ni mauvais, c'est l'utilisation qui en est faite qui prête à conséquence. C'est pourquoi mon jugement sur l'importance de miser sur des partis politiques à Sherbrooke est teinté par l'échec de Sherbrooke citoyen. Je penche aujourd'hui plus sur des modèles de participation citoyenne de façon organisée, sur un modèle à inventer pour respecter le pouvoir de nos élus.

Les partis politiques, plutôt que d'embrasser une approche démocratique inclusive, risquent de fragmenter la société et de créer des clivages néfastes. La nécessité d'un changement vers une démocratie participative, où les citoyennes et les citoyens prennent la parole dans la prise de décision, se fait de plus en plus pressante. Une telle approche pourrait non seulement renouer avec la confiance de la population, mais aussi favoriser un développement harmonieux de la communauté en servant réellement le bien commun. C'est pourquoi je pense que nous ne devons pas prendre parti...



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