Le milieu politique est ce qu'il est. Les motivations pour
se lancer dans l'arène varient. Certains candidats veulent s'impliquer, changer
les choses. D'autres cherchent de la visibilité. D'autres encore sont carrément
opportunistes.
Mais une chose demeure. Et les élections d'avril 2014 ne
feront visiblement pas exception : une élection, c'est une game. Un jeu.
Avec des règles souvent absurdes. Avec des stratèges souvent sans scrupules.
L'important, c'est de gagner. À tout prix. Un point, c'est
tout. Tous les moyens pour gagner étant valables, en période électorale, on ne
se gêne pas. Tous les coups sont permis. Comme au hockey, on peut dire que
c'est dommage, mais les commotions cérébrales font partie de la game. Les
dirigeants le veulent ainsi. Alors on ne va pas s'arrêter à une petite
commotion verbale en période électorale! La game, c'est la game!
En période électorale, ce sont les stratèges qui décident de
tout. La date des élections qui est choisie en fonction d'éviter à Madame
Marois et à son mari de s'expliquer publiquement sur des allégations de
favoritisme est un bel exemple. Et il y en a d'autres. On a dit à M. Couillard
d'être moins cérébral et plus mordant. « Je déteste ce
gouvernement », martèle-t-il depuis. Et il enchaîne avec l'engagement des
engagements : « On va créer 250 000 emplois au cours de notre
premier mandat ». Depuis une dizaine d'années (minimum!) il se crée, bon
an, mal, environ 50 000 emplois au Québec. Si on tient pour acquis qu'un
mandat légal ne dépasse pas 5 ans, le compte y est. Entre cela et ne rien dire,
il n'y a pas de différence.
Quant à M. Legault, la pensée magique semble colorer tous
ses propos. Cette semaine, il nous a qu'on pouvait être aussi riche que les
autres provinces. Cela se fait en baissant les impôts et les taxes. Où
coupera-t-on? C'est vague dans son propos. « Come on, on est plus fiers
que ça », s'écrie-t-il.
Pour moi, il n'y a plus qu'une manière de voir les choses: il
faut vivre la campagne électorale sans suivre la game. Si les politiciens
comptent se livrer à de stériles attaques pour bien manipuler le vote, il nous
faut, en tant qu'électeurs, prendre la distance qu'ils refusent de prendre
quand ils jouent la game.
J'ai fait l'exercice de la boussole électorale. ( www.boussoleelectorale.ca )
Intéressant.
On prend quelques minutes (je dirais 15 minutes, si vous
vous attardez un peu à voir les options) et vous vous intéressez aux enjeux.
Vraiment intéressant.
Dans la game électorale, les chefs des partis (et ils sont
tous pareils là-dessus) font le pari que vous ne vous intéresserez pas à leur
plateforme électorale. À leur programme. Les spécialistes en communication (et
ils sont légion!) jouent la même carte : les électeurs n'ont pas le temps
de lire les programmes. En plus, ils évaluent que l'électeur moyen veut se
faire dire que tout va changer mais que lui, personnellement, ne sera pas
touché. Il est là, le pari des partis.
Faire l'exercice de la boussole électorale, c'est accepter
de se positionner personnellement en lien avec des enjeux. C'est se donner le
devoir de ne pas juste se fier à des chefs programmés pour dire telle et telle chose,
jour après jour, dans un ordre étudié. C'est se donner le devoir de ne pas voter
en se disant simplement : « Lui (ou elle), il m'énarve! »
Faire l'exercice de la boussole électorale, c'est se donner
le droit de ne pas jouer la game comme les chefs veulent qu'elle se joue.
Je suis sûr que les choses vont changer en politique. Mais cela
se fera lentement. Au gré du renouvellement des forces en présence. Au gré
aussi d'une population qui devra reconnaître, un de ces quatre, que le pacte
fiscal actuel ne tient pas la route. Que la pensée magique ne rassure plus.
Mais il ne sera pas question de cela cette année. Pour avril
2014, il faut s'intéresser aux élections, mais, surtout, ne pas se fier qu'aux
manchettes du jour. La manipulation du message y est trop forte et présente
pour faire en sorte que ce soit crédible. Manipuler le message, par exemple,
c'est prétendre que l'arrivée du Docteur Barrette réglera tout. En faisant
équipe avec le Docteur Couillard et le Docteur Bolduc, ils vont tout régler?
Les deux derniers ont géré le système de santé pendant dix ans et tout reste à
faire. Simplement prétendre que Barrette va tout changer, c'est manipuler un
message en évitant de traiter du problème de fond.
Si les chefs font le pari de la game traditionnelle, il nous
appartient de leur démontrer que nous n'avons pas perdu la boussole.
Clin d'œil de la semaine
Emprunté librement à Joël Le Bigot : plutôt qu'un
médecin pour comprendre les besoins en santé, ça ne devrait pas être un malade
qui dirige le système?