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  CHRONIQUEURS / L'Agora

Une très curieuse idée, une mauvaise idée point!

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La semaine dernière, le Regroupement des élus municipaux indépendants comparaissait devant une commission parlementaire sur la réforme de la Loi des élections municipales à Québec. La porte-parole du RÉMI, Sylvie Goneau, a proposé un retour en arrière important soit celui d'élire le maire d'une ville entre conseillers comme on le faisait au 19e siècle, plutôt que de l'élire au suffrage universel. Quelle curieuse idée!

La démocratie municipale

J'ai eu l'occasion de l'écrire ici par le passé, le gouvernement municipal et l'un des plus importants de nos vies. C'est sur cette scène que se prennent plusieurs décisions qui affectent notre vie quotidienne. Nous n'avons qu'à penser aux voies de circulation, à l'aménagement de nos quartiers, à la réglementation de la présence des commerces, aux équipements de loisirs et aux équipements sportifs. Nul ne contestera que ce gouvernement, cette administration, est au cœur de nos vies.

Il va de soi pour moi que nous puissions choisir au suffrage universel celle ou celui qui représentera notre ville et qui sera désigné pour la gérer. Choisir le maire d'une ville par les conseillers constituera un recul important sur les avancées démocratiques du Québec qui a pris le virage de la modernité au milieu du 19e siècle. Revenir à la situation qui prévalait au siècle dernier où à celui qui le précède est non seulement un recul démocratique, mais c'est surtout une grande porte ouverte à la collusion et aux magouilles de toute sorte. Que devrait promettre un futur maire à ses amis conseillers pour se faire élire? Des travaux plus importants dans son quartier, un poste rémunérateur ou que sais-je encore? C'est vraiment une très mauvaise idée et c'est surtout une mauvaise façon d'aborder le problème de la présence de partis et de candidats indépendants sur la scène municipale.

Les indépendants et la politique municipale

Le problème qui semble être posé par le regroupement des élus municipaux indépendants mérite quant à lui d'être soulevé. Le fait que des gens refusent de se joindre à un parti pour faire de la politique municipale ne devrait pas leur donner moins de moyens financiers ou en faire des représentants élus de seconde zone par rapport à ceux qui ont fait le choix d'être membre d'un parti. En ce sens, les recommandations du RÉMI quant à la possibilité pour un candidat indépendant d'avoir une colistière ou un colistier s'il se présente à la mairie sont une excellente suggestion à laquelle le gouvernement devrait donner suite. L'autre demande du RÉMI qui paraît tomber sous le sens c'est de donner des moyens financiers égaux aux élus municipaux pour des budgets de recherche ou d'action politique. Certes, si vous êtes membre d'un parti et que vous êtes nombreux à vous faire élire, vous aurez l'avantage du nombre et des économies d'échelle, cela va de soi, mais on devra s'assurer de donner des moyens aux élus qu'ils soient indépendants ou membres d'un parti.

Les partis politiques municipaux

Je comprends que pour plusieurs ce qui pose problème c'est l'existence même de partis politiques au plan municipal. On semble vouloir faire accréditer la thèse que la « ligne de parti » donne le pouvoir absolu au chef de parti, ce qui vient vicier pour ces gens le processus de politique municipale. Rien n'est plus loin de la vérité pourtant. Dans le système actuel, un maire n'a aucun pouvoir au fond. C'est la majorité du conseil municipal qui décide. Une ville ne parle pas uniquement par l'intermédiaire de son maire pour exprimer sa volonté, mais au moyen de ses résolutions. Dans ce contexte, je ne comprends pas l'argumentation voulant que le caractère d'un vote au suffrage universel du maire d'une ville puisse constituer un problème.

Reste la question des partis politiques municipaux. J'ai participé un temps à l'aventure du Renouveau Sherbrookois. Quand j'ai accepté de militer au sein de ce parti c'est parce que je croyais qu'un parti était la solution pour éviter que des ententes à la pièce puissent, comme ce fut le cas du choix de l'emplacement du Centre de foire au Plateau Saint-Joseph plutôt que dans l'Est, influer sur le choix des élus. Je croyais aussi qu'avec un parti on serait en mesure de mobiliser les gens sur la scène municipale. J'ai été déçu. Ce que je croyais possible ne s'est pas réalisé. Le parti supposément représente les vraies citoyennes et les vrais citoyens est devenu une machine électorale. La vie politique municipale a continué « more of the same ». Au moins si la présence d'un ou de plusieurs partis politiques municipaux permettait à des visions opposées de s'affronter sur l'avenir de notre ville, cela vaudrait la peine. Au lieu de cela, les partis politiques sont plutôt devenus des machines à élection. En ce sens, les partis sont un autre nom pour désigner une organisation électorale comme celle dont j'ai fait partie avec l'ex-maire de Sherbrooke, Jean Perrault.

Il n'y a pas de solutions miracles. Néanmoins, le gouvernement du Québec doit faire en sorte par ses lois que la joute politique soit équitable. De nombreuses réformes sont à l'ordre du jour. Voici quelques idées en vrac...

Des règles de jeu équitable pour tous

Il faut donc que le gouvernement, dans sa nouvelle Loi sur les élections municipales, s'assure que les règles du jeu permettent à la démocratie de s'exprimer pleinement et que chaque citoyen intéressé par la politique puisse participer pleinement au processus électoral.

Par exemple, c'est une excellente idée de permettre d'avoir des colistiers pour un candidat à la mairie. C'est aussi une idée incontournable que l'on donne des moyens financiers aux élus pour qu'ils s'acquittent de leurs tâches. De plus, il faudrait aussi qu'on limite les mandats de tout élu municipal à deux ou trois. Cela viendrait atténuer les possibilités de collusion et de magouille dans la gestion de nos municipalités et nos villes. On pourrait aussi interdire le cumul d'un revenu de pension avec la rémunération d'un élu et même envisager d'exiger que le travail d'un élu municipal soit à temps plein. On pourrait aussi financer à même les fonds publics les campagnes à la mairie afin d'éviter qu'un parti puisse avoir un avantage sur des candidats indépendants.

On peut avancer plusieurs idées pour favoriser la participation de citoyennes et de citoyens comme indépendants dans le processus électoral, mais nul besoin de retourner en arrière sur le plan de la démocratie en élisant nos maires comme on élit les papes, loin des yeux et du regard des citoyens. Élire le maire comme le suggère le RÉMI entre amis conseillers, c'est une très curieuse idée... Une très mauvaise idée point!


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