Faut-il croire celles et ceux qui nous annoncent depuis le
résultat de l'élection partielle dans Saint-Henri─Saint-Anne, la mort prochaine
du Parti libéral du Québec ? Je ne peux répondre à cette question avec
certitude. Je me méfie des oracles. Nous devons tous être circonspects avec ces
jugements ex cathedra prononcés par les professionnels du commentaire. Le Parti
québécois et Paul St-Pierre Plamondon pourront témoigner du fait que ce n'est
pas parce que les commentateurs décrètent la mort d'un parti politique que cela
est nécessairement la réalité. Réflexions libres sur la suite des choses pour
le Parti libéral du Québec.
Les
partis politiques, des outils, pas une fin en soi...
Il faut aussi rappeler avec René Lévesque que les partis
politiques sont des outils, des moyens, mais pas une fin en soi Dans ses
mémoires, l'ancien grand premier ministre du Québec que fut René Lévesque
laisse voir son dédain pour les partis politiques. Il écrit : « Pour moi, tout parti politique n'est au fond qu'un mal
nécessaire, un de ces instruments dont une société démocratique a besoin
lorsque vient le moment de déléguer à des élus la responsabilité de ses
intérêts collectifs. Mais les partis appelés à durer vieillissent généralement
assez mal. Ils ont tendance à se transformer en églises laïques hors desquelles
point de salut et peuvent se montrer franchement insupportables. À la longue,
les idées se sclérosent et c'est l'opportunisme politicien qui les remplace. »
(René Lévesque, Attendez que je me rappelle..., Montréal, Québec Amérique,
2007, 608 p.)
Je ne sais pas s'il faut suivre
René Lévesque dans sa vision du rôle d'un parti politique, mais une chose est certaine,
rien n'est moins sûr pour un parti politique que de jauger ses chances de
survie sur ses réalisations passées. Les partis politiques sont des outils qui
servent à lutter pour le pouvoir et à s'en emparer pour faire triompher une
vision des choses, un ensemble de valeurs, un certain ordre de marche pour
organiser les affaires collectives dans une direction donnée. Sans partager le
cynisme de René Lévesque sur les partis politiques, je suis cependant en accord
avec un élément fondamental de sa pensée que j'ai citée précédemment soit qu'à
la longue un parti politique peut se scléroser et n'être plus que le lieu de
l'expression de l'opportunisme politicien. Ce qui donne comme résultat un parti
politique qui prend des positions et affirment sa vision du monde sur la base
de sondages plutôt que de ses valeurs ou d'une vision du monde partagée par des
militants déterminés comme nous en retrouvons au Parti québécois et chez Québec
solidaire.
Comme exemple d'un parti politique
fondé sur l'opportunisme politicien, on ne peut trouver mieux comme incarnation
de cette idée que la Coalition avenir Québec. Dirigé par un souverainiste qui a
renoncé à ses idées et peuplé de gens aux visions opposés, la Coalition avenir
Québec comme le dit bien son nom n'est pas un parti politique, mais bien une
coalition de gens opportunistes qui ne veulent que diriger le Québec. Ce n'est
pas en soi une mauvaise chose, la CAQ a fait quelques bonnes choses comme
gouvernement, mais aussi de très mauvaises notamment dans le rayon de ce que
l'on nomme l'identitaire. Le nationalisme revanchard à tout crin, les discours
suspects sur l'immigration sont des exemples de ces mauvaises choses incarnés
notamment par la Loi 21. Mais tout cela aura une fin. L'éventuel départ de
François Legault de la politique, il n'est pas éternel, révélera des ruptures
importantes au sein de l'actuelle coalition de caquistes et il y a de grandes
possibilités que cette coalition ne survive pas au départ de son timonier et
fondateur. C'est à ce moment qu'il sera important pour les Québécoises et les
Québécois d'avoir des partis politiques qui veulent s'emparer du pouvoir sur la
base d'une vision du monde que nous partagerons. Dans cette foulée, je trouve
important que le Parti libéral du Québec soit l'une de nos options le temps
venu. Pour cela, il faudra cependant que ce parti se ressaisisse et redevienne
quelque chose comme le grand parti qu'il a été pour le Québec au cours de son
histoire.
La descente aux enfers des libéraux
Mais me direz-vous, le PLQ n'est
qu'à 4 % dans les sondages chez les francophones. Il a perdu un bastion
libéral dans Saint-Henri─Saint Anne, il a été retranché sur l'île de Montréal
au lendemain de la dernière élection et il n'est pas en cheville avec la
défense du fait français et de l'identité québécoise. En plus, c'est un parti canadian
et en plus il a été un nid de corruption. Ah la belle affaire ! Dire une
fausseté et la répéter devient dans notre monde actuel une vérité, hélas !
Voyons cela d'un peu plus près.
Le Parti libéral du Québec a commis une erreur impardonnable au
lendemain de la dernière élection en nous faisant découvrir l'existence d'une
obscure troisième vice-présidence à l'Assemblée nationale et en favorisant le
départ de sa cheffe et députée de Saint-Henri─Sainte-Anne, madame Dominique
Anglade. La meilleure cheffe que le PLQ pourrait se trouver dans les moments
difficiles qu'il vit c'est Dominique Anglade. Femme, issue des minorités
visibles, ingénieure et dédiée au développement économique. Dominique Anglade
était une excellente cheffe pour les libéraux. Le sort en a décidé autrement.
Les erreurs ont tendance à se multiplier. La défaite aux partielles est la
sanction des libéraux de Saint-Henri─Sainte-Anne pour avoir poussé en dehors du
jeu leur député que plusieurs appréciaient. Dites-moi si vous aviez voté pour
Dominique Anglade parce que vous étiez libéral et que vous vouliez que la cheffe
du PLQ soit à l'Assemble nationale, auriez vous été empressé de rééditer votre
geste pour des gens qui ont poussé votre choix hors de l'Assemble nationale ?
Poser la question c'est un peu y répondre. Ne croyez-vous pas ?
Répéter une
fausseté et elle deviendra vérité
Puis, cette idée, ce mensonge mille fois répété que le Parti
libéral du Québec a été un lieu de corruption politique sous Jean Charest est
l'une des idées accréditées les plus fausses de notre espace public. Pour fins
de mémoire, après des millions et des millions de dollars dépensés en enquêtes,
après des enquêtes policières aussi longues qu'inutiles, jamais on n'a pu
prouver que les libéraux aient joué dans le film du narratif d'un parti
corrompu et du chef déchu. Jean Charest a été lavé de tout soupçon par la
justice et ses officiers et on continue de répéter à satiété que les libéraux
de Charest se sont vautrés dans la corruption. Ce qui est faux, quoi que l'on
puisse en dire. Il est faux aussi de dire que le gouvernement Couillard a mis
le Québec à feu et à sang à la suite de ses politiques d'austérité. Il est vrai
qu'il y a été fort pour redresser la barque, mais la relative opulence
d'aujourd'hui de notre gouvernement est directement tributaire de l'action
budgétaire énergique du gouvernement Couillard. Cela à mes yeux était une
erreur, tout comme de s'être débarrassé de Dominique Anglade, ce qui ne
signifie pas pour autant que les libéraux n'ont plus leur raison d'être.
Que faire
maintenant ?
Si vous êtes un électeur intéressé à la chose politique, il est
vraisemblable que vous soyez peu intéressé en ce moment par l'avenir des
libéraux. Il est probable que comme des milliers d'électrices et d'électeurs
vous soyez de celles et de ceux qui croyez que le gouvernement Legault est un
bon gouvernement et que l'alternative est soit le Parti québécois ou Québec
solidaire dépendamment que vous soyez fervent d'un pays ou d'une société juste.
Dans tous les cas de figure, rares seront les électeurs qui croient à
l'importance des libéraux pour l'avenir du Québec. Pourtant, si vous croyez aux
libertés individuelles, à la justice sociale, à l'importance de l'entreprise
privée, à l'égalité entre les hommes et les femmes et surtout à une vision
équilibrée du développement du Québec, vous ne pouvez pas faire l'économie
d'entendre le point de vue des libéraux. Si vous croyez important de reformer
le Canada sur de nouvelles bases pour créer un véritable fédéralisme où les
droits des nations acadiennes, québécoises et des Premiers Peuples, le Parti
libéral du Québec doit devenir une option. Le Parti libéral du Québec a encore
un avenir, mais cet avenir passe par un Québec dans un nouveau Canada...