Difficile,
ces temps-ci, de passer une journée sans entendre parler d'indice des prix à la
consommation, de récession plus ou moins profonde, de variation des titres
boursiers, de la hausse du taux directeur servant à fixer les taux d'intérêt,
etc.
« C'est
dissile », dirait M. Legault.
Les
analystes se perdent en conjectures, le second défaisant la thèse du premier.
Et vice versa.
Au cœur
de tout ça, la banque. Ou les banques. Incluant les Caisses Desjardins,
évidemment.
D'unité
de mesure facilitant le troc de marchandises, l'argent est devenu bien plus que
ça.
Gérée
par la science économique, l'unité monétaire facilitatrice a modifié sa
vocation. Elle est devenue l'unité qui mesure la réussite, le succès, le
respect, le statut social et quoi d'autre?
Et la
banque est au cœur de tout ça.
Le mot
banque désigne donc cet endroit qui facilite et organise les transactions
d'argent pour faire tourner l'économie.
Une
banque est aussi un endroit où on vient centraliser des unités pour en
favoriser la redistribution ensuite. Ainsi, on parlera d'une banque de données
en informatique, d'une banque de temps de vacances au travail, et autres
exemples du genre.
La
banque alimentaire
Les
banques alimentaires existent depuis des décennies, voire des siècles. Elles ont
été créées pour répondre à des besoins ponctuels. Elles apparaissent lors de
catastrophes naturelles, lors de l'arrivée massive d'immigrants à la suite d'un
événement extraordinaire dans leur pays d'origine. On a aussi connu la "soupe
populaire", entre autres, lors de la grande dépression qui a suivi la crise
de 1929.
Le
principe de la banque alimentaire est de regrouper en un même endroit toute la
nourriture disponible pour ensuite la redistribuer aux plus nécessiteux.
La
pertinence, dans ces contextes d'urgence, n'est pas à discuter vraiment.
L'autre
jour, je circulais sur la rue Roy, à Sherbrooke. J'y ai vu l'entrepôt de la
Fondation Roch-Guertin. Je suis assez vieux pour me rappeler de l'origine de
cette Fondation. Monsieur Guertin animait une émission de type ligne ouverte
sur les ondes de CHLT 63.C'était en 1982. Les taux hypothécaires frôlaient les
20%. Peu avant la période des Fêtes, plusieurs personnes ont témoigné de leur
désarroi par rapport à l'approvisionnement en nourriture à la veille de Noël.
Dans un
élan qui le caractérisait bien, Monsieur Guertin a lancé le défi à ses
auditeurs de regrouper le plus de denrées non périssables qu'il était possible
de le faire.
Je me
souvenais de tout ça en regardant les installations modernes et immenses, 40
ans plus tard...
Ce qui
était né de l'idée d'une banque alimentaire pour que « personne ne manque
de nourriture au temps des Fêtes », est devenu une nécessité permanente.
Je me
souviens aussi de Claude Forgues, qui oeuvrait à Centraide Estrie et qui rappelait,
avec justesse : « les besoins alimentaires, ce n'est pas juste pour
la période entre Noël et le Jour de l'an. C'est plutôt pour la période entre le
Jour de L'An et Noël! »
L'autre
jour, donc, donc, j'ai arrêté ma voiture quelques instants pour repenser à tout
ça, sur la rue Roy.
C'est
tellement anormal que tant de structures soient devenues permanentes pour que
la distribution de la nourriture se fasse minimalement.
Les
banques alimentaires d'urgence sont devenues une urgence permanente. Et elles
ne cessent de grandir, propulsées par des besoins grandissants.
Au même
moment, à la radio, j'entendais parler d'une promotion des supermarchés Métro. Des
dizaines de milliers de dollars à gagner en épicerie...
La même
chaîne d'alimentation qui affirmait devoir remonter les prix pour assurer une
rentabilité minimale, alors que la direction était occupée à calculer les
profits records engrangés. À la fin de l'exercice, ces mêmes dirigeants ont le
loisir de calculer les bonis records qui leur ont été versés cette année.
Et je me
fais ces constats: les banques alimentaires d'urgence se font permanentes; l'augmentation
du panier d'épicerie touche les 11%, alors que l'indice des prix à la
consommation est à 6,8%; les chaînes d'alimentation engrangent les profits;
« Travailler fort » ne suffit plus si on gagne moins de 20 $ l'heure,
alors, imaginons si on gagne le salaire minimum de 14,25$ l'heure (15,25$ à
partir de mai).
Une fois
cela dit, je serai très difficile à convaincre que tout va bien dans notre écosystème
économique.
Clin
d'œil de la semaine
Quand les produits sans nom
deviennent un luxe, c'est la situation qui est sans nom...