Comme peuple, nous sommes très jeunes. Même pas 500 ans...
Je ne sais pas trop à quel moment de son histoire un peuple devient adulte. À vue de nez, je dirais que nous en sommes à l'adolescence. Depuis un petit bout. Et pour un bout.
Notre enfance nous a quittés lentement, sur une dizaine d'années, à partir de 1960. Jusque-là, pourtant, l'enfance se passait bien. Enfin, pas si mal.
Notre mère l'Église prenait soin de tout. L'infinie bonté des gens du sacerdoce était enseignée dans des bouquins d'histoire, ma foi, biaisés. Si le Bon Dieu est bon (et son nom le dit, alors...), suivre son enseignement ne pouvait qu'être bon. Et si ce qui est bon pour un individu doit nécessairement être bon pour un peuple, ben, bingo! On ne peut que sortir gagnants! Dérangez pas vos cartes en cas d'erreur! Le bingo ne sortira d'ailleurs que tard des églises!
L'enfant que nous étions trouvait le réconfort dans les jupes de notre mère l'Église. Si on suit une recette à la lettre pour que la pâte à pain lève, pourquoi en serait-il autrement pour notre société?
Puis, l'adolescence a montré ses premiers signes. On a commencé à mettre en perspective l'autorité parentale. Tout en reconnaissant que beaucoup de bon travail avait été fait en éducation et en santé, voilà qu'on réalisait, l'adolescence nous brassant les hormones, que l'éducation et la santé devaient se retrouver dans un milieu plus neutre. On a commencé à bâtir un modèle de société plus universel. Un modèle dans lequel la religion relève de l'individu et où l'État relève de la collectivité.
Mais l'ado demeure un ado. Et on n'est pas sortis de notre adolescence! Alors, on avance, on recule, on tourne un peu à gauche et puis à droite. Et la classe politique, tout aussi adolescente, s'exprime en mono syllabes, évitant les discussions et les échanges, privilégiant plutôt la répétition de phrases apprises, phrases destinées à camoufler ce que l'on fait en laissant voir que tout est correct. Comme un bon ado, le politicien finit par pogner les nerfs quand sa courte réponse est insuffisante.
Nous sommes un grand ado collectif.
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Allez savoir si c'est parce qu'il faisait vraiment très noir, mais voilà que l'arrivée de Justin Trudeau semble garrocher des effets lumineux réconfortants tout autour. On verra pour la suite, mais je retiens une chose : le changement de garde, mené par un être d'une génération nouvelle, fait du bien. La langue de bois se ramollit, devient plus souple. Assumer ses réponses devient une option, semble-t-il.
Et cela est juste et bon (oups, l'ado vient de faire un pas dans son enfance!)
Au Québec, l'année a été difficile. Au lendemain de son élection d'avril 2014, le PM Couillard avait promis une approche ouverte, respectueuse. Il s'était décrit comme un être de chaleur et d'ouverture. Je me souviens m'être dit que ce serait le fun. Les choses ne se sont pas passées comme ça, malgré notre goût d'y croire.
Vu de même, il semble que Justin Trudeau, sans le promettre nommément, soit en train de faire ce que Philippe Couillard avait promis de faire, sans le faire nommément... C'est dans l'application qu'on détermine la valeur d'une idée. Pas dans sa présentation.
Nous avons vécu une année austère où l'argent manquait cruellement. Où la responsabilité supérieure dictait des coupes qu'on continue pourtant de nier. L'ado n'admet pas ses mauvais coups, il les cache. C'est connu.
2015 est arrivé sans qu'on ait les moyens de l'assumer, nous disait-on. Mais, magie de Noël aidant, les « grandes réformes » ont porté des fruits au point de faire en sorte que plus d'un milliard de dollars sont apparus, juste à temps pour redonner un peu à la fonction publique et beaucoup aux médecins.
C'est ben faite, pareil, non?
Ce qui est bien, au fond, c'est qu'il me semble qu'on est en train de changer notre vision de la politique. Qu'on commence à se dire qu'il faut s'impliquer, s'en occuper. Qu'il y a une gauche et une droite. Et un centre. Pas juste du rouge ou du bleu. Et un bien commun à considérer.
Me semble qu'il y a, là-dedans, une promesse de lumière plus forte.
Espérant que ce ne soit pas qu'une promesse d'ado.
Espérant que l'âge adulte soit plus proche que loin...
Clin d'œil de la semaine
« Heille, Tu m'as dit que tu ferais ça! »
« Ben oui, je vas le faire, à un moment donné, là, capote pas... »