Le temps, celui qui marque le rythme de nos jours, a des vertus reconnues depuis des lunes! On dit du temps qu'il passe, qu'il fuit, qu'il arrange les choses.
Le temps arrange les choses. Vraiment ? Je n'y crois pas.
Un événement chamboule nos vies. La mort d'un proche est un bon exemple. Je parle ici de la mort qui frappe brutalement. Sans crier gare. Sans qu'on puisse s'y préparer. La mort de son enfant, de son conjoint ou sa conjointe alors qu'on a de jeunes enfants. De notre meilleur ami qui se donne rendez-vous avec la mort. Je parle de celle-là, la "tough", la dure. Celle qui blesse d'un coup. Celle qui fait que la lumière s'éteint. Et qu'elle ne se rallume pas. Pas complètement. Pas comme avant, en tous les cas.
Comme ce n'est plus la même lumière ambiante, il faut refaire ses repères. Et rien n'est simple.
Et là, au milieu de nos peines, de notre colère, de notre déroute, un proche nous accoste. Rempli de bonne volonté, mu par le désir d'alléger notre peine, il risque cette phrase, croyant un peu naïvement qu'elle aidera, qu'elle portera une dose de sérénité: « t'en fais pas trop, le temps arrange les choses.»
Rien de méchant. Mais dans cette douleur du moment, voilà que le message ne passe pas très bien.
Il va faire quoi, le temps? À part passer. À part fuir. Il va arranger les choses?
Non.
Le temps n'a pas de pouvoir bien précis à ce niveau.
À la limite, le temps devient un filtre. Un filtre qui fait en sorte de trier les souvenirs. Qui fait en sorte d'amenuiser ce qui était troublant.
Le temps est un filtre. Mais un filtre qui n'est pas autonettoyant. Un filtre qui ne fonctionne que si on l'active. Et qu'on l'entretient. Quand on a l'impression qu'un train nous a frappé, que l'équilibre ne revient pas de soi, que tout en nous semble cassé, ça se peut qu'on doive chercher des appuis. De l'aide.
Je pense à tout cela cette semaine. Un ami rappelait les cinq ans de la mort de sa fille. De belle manière. Ses yeux sont rivés sur la vie qui continue. Il y travaille. Il s'adapte encore à la lumière de sa vie qui a tant changé.
Et je me disais que pour bien filtrer les choses, le temps a besoin d'aide. Il a besoin de solidarité. Besoin de chaleur humaine. Besoin d'espoir. Le temps a besoin de phrases, même malhabiles, prononcées par un ami attentionné. Le temps a besoin que les gens autour prennent de leur temps et le donne, même sans rien dire.
Le temps n'arrange rien.
Au mieux, il filtrera les bons moments pour faire en sorte que l'espoir gagne sur le désespoir...
Clin d'oeil de la semaine
Dans le cas de Trump, le temps n'arrange rien du tout...