J'ai eu 16 ans. Les plus malins diront : « Tu t'en souviens? T'as de la mémoire! » Bien oui, je m'en souviens, même si ça fait longtemps.
C'était en 1977. À 16, j'habitais sur la rue Denault. J'étais à la fin du secondaire, dans un séminaire dont on avait peint les murs de couleurs vraiment étonnantes : de longues bandes de rouge et de jaune pour rappeler les couleurs des équipes sportives de l'alma mater. Ouf! C'était une époque où les couleurs étaient festives, la mode spectaculaire, les cheveux des gars étaient nécessairement longs (sauf si on était dans l'armée).
Le Parti Québécois venait de prendre le pouvoir. Les grandes réformes se préparaient. Avec le recul nécessaire pour avoir une vision historique des choses, le premier mandat du Parti Québécois de René Lévesque a probablement été le plus prolifique du dernier siècle.
Les temps changeaient, pour reprendre l'expression. Les jeunes désertaient les églises. Ou ils disaient le faire et y allaient discrètement pour ne pas déplaire aux parents... D'ailleurs, j'ai vraiment eu l'impression que le dernier grand mouvement des jeunes pour leur église s'est déroulé quand on fait des messes à gogo et qu'on organisait des gospel nights dans les églises.
16 ans. Je venais d'obtenir mon permis de conduire. J'avais suivi les cours chez Auto école Vel. J'ai appris au volant d'une rutilante Datsun B210 vert lime. Les cours faits et réussis, j'ai attendu le matin de ma fête pour avoir mon permis. Quel beau cadeau!
Je me souviens avoir demandé à mon père si je pouvais conduire sa voiture. Je veux dire la conduire seul. Partir avec... Depuis que j'avais 15 ans, quand on quittait pour aller chez un oncle une tante (c'était l'époque où on allait faire un tour d'auto et où il n'était pas nécessaire d'appeler pour aller faire un tour chez quelqu'un...), imaginez que je démarrais la voiture et j'avançais et reculais dans la cour en attendant le chauffeur. Mon père, en l'occurrence. Il n'a jamais rien dit contre cette habitude que j'avais...
Papa a refusé que je conduise sa voiture avant l'âge de 18 ans. « Pourquoi? J'ai mon permis! » « Ta sœur et ton frère -mes aînés- n'ont pas conduit avant 18 ans, alors, c'est comme ça. » « Oui, mais papa, j'ai vérifié et ça ne leur pose pas problème! »
J'ai appris l'équité de mon père, je crois bien.
À seize ans, j'en étais à ma deuxième année chez Écono, un libre service de la rue Bowen Sud où j'étais pompiste. Pompiste dans un libre service... C'était comme ça!
À la radio, le disco se frayait un chemin jusqu'à nos oreilles. La boule en miroir prenait la place des feux de camp...
J'avais 16 ans. À l'école, on parlait beaucoup de politique. Vraiment beaucoup. Claude Charron était ministre. Il n'avait qu'une douzaine d'années de plus que nous! Mon ami Alain Gilbert militait pour Rodrigue Biron, de l'Union Nationale. Belle époque, quand même!
Nos débats étaient intéressants.
Mais aurions-nous été prêts à voter, à 16 ans?
Si, à l'âge de 16 ans, je suis assez vieux pour conduire une automobile, je dois bien pouvoir voter, non? Mais si je commets un crime, je ne suis pas assez vieux pour être traité, par les tribunaux, comme un adulte...
À 16 ans, on sait tout sans savoir. Certains ne vieillissent pas, cela dit... Est-ce qu'il faut savoir faire sa chambre avant de voter? La génération actuelle est-elle plus mature que dans mon temps? Peut-on voter via une Xbox? Je badine, mais quand même...
Je propose ceci : que les 18 ans et plus s'affairent à rendre plus crédible la chose politique. Quand l'engouement sera intense, on verra bien s'il faut toucher à l'âge permis pour voter... Il est là, le défi. Le débat.
Clin d'œil de la semaine
Withney Houston avait 14 ans quand j'en avais 16. Elle est morte. Déjà. Quelque part, un body guard se cherche du travail...