Paradoxalement, on sait qu'un spectacle est bon quand les mots pour le dire ne viennent pas si aisément.
- - T'as aimé ça?
- - Wow! C'était hot! Vraiment... Ouf! Wow!
Vous voyez le genre.
Par une belle soirée de juillet, ma blonde a eu l'idée de créer un groupe et d'acheter des billets pour voir Omaterra, le grand spectacle de l'eau. Il faisait une chaleur toute estivale. Assez, en fait, pour apprécier un éclaboussement, accidentel ou non... La bonne humeur est au rendez-vous. La bière fraîche est bonne. Tout est en place.
J'ai été impressionné par les dispositifs techniques. La splendeur des images et le jeu des acrobates. Les prouesses faites dans des conditions difficiles. Impressionnant!
Et pourtant...
On sait qu'un spectacle est moyen quand les mots tentent de justifier qu'on a aimé ça, alors que notre intonation trahit un doute.
- - T'as aimé ça?
- - Ben , le numéro des pingouins était vraiment bien. Et puis la fille qui nageait dans un filet d'eau aussi. Honnêtement, c'était pas pire, finalement...
Pas pire. Mais pas wow...
Moi, j'ai décroché rapidement quand j'ai compris que l'histoire était basée sur une série de clichés gros comme ça et dont l'objectif était de livrer une morale infantile sur l'utilisation, à la maison, de l'eau potable. Des clichés comme quoi? Le gars qui arrose son asphalte. Le gars est gros. Il est méchant, aussi. Il est le mal. Et sa voisine, Madame Qui-lave-tout-tout-le-temps, c'est le bien. Et le bien gagnera. Et, tous, on devrait être de meilleurs citoyens le lendemain matin. Une autre sensibilisation à se faire enfoncer au fond de la conscience avec, comme toile de fond, un monde semblable à celui de Caillou....
Pour moi, l'équation aurait dû être plus simple : le spectacle est en été. L'été, c'est les vacances. Épatez-moi et montrez-moi des tableaux festifs où l'eau est reine. Un numéro de pingouins sur la banquise? Oui! Une fantasmagorie de nageurs qui s'élancent dans les filets d'eau, le tout supporté par des effets de lumière et des images chaleureuses? Parfait. Vous savez, juste une série de tableaux débridés, heureux, où tout baigne dans une eau que tout le reste met en valeur. L'eau devient une fête visuelle, sonore et magique! Pas besoin d'une histoire qu'on cherche à imposer et expliquer par le biais de nombreuses interruptions narratives... Tout ça pour mettre la table à une morale somme toute un peu gnan-gnan...
N'essayons donc pas de programmer l'intelligence du spectateur. Faisons la fête, simplement! Chercher à imposer une morale dans ce contexte vient tuer l'affaire.
Et puis, tiens, si vous vouliez absolument faire une morale, on aurait pu insérer un slam à la David Goudreault. Du genre,
L'eau c'est la vie, c'est clair.
On gaspille la vie, le plus clair du temps.
Alors, c'est le temps, c'est clair.
Le danger est là, vivant, présent.
S'éclairent les consciences, c'est le temps, c'est clair.
L'eau claire, on se voit dedans,
Mais quand la source même menace nos enfants,
Il faut voir ce qu'on peut faire,
Surtout voir que la source, c'est nous, c'est clair...
Vous voyez le genre...Imaginez maintenant ce slam bien tourné et bien livré!
Je disais donc que, pourtant, tout était là. Qualité des interprètes, talent incroyable à la vidéo, acrobates agiles et professionnels... Prouesses personnelles souvent exceptionnelles. Mais pas de wow collectif.
Revenu chez-moi, je n'ai rien dit. Je n'allais pas être celui qui découragerait son voisin d'y aller. Je n'ai pas nui. Je le jure. Mais j'étais à un wow près de pouvoir aider pas à peu près, par exemple!
On sait qu'un spectacle va marcher quand, sans même y penser, on en parle à tout le monde le lendemain...
Bientôt, une conférence de presse annoncera la suite des choses pour Omaterra. Je m'attends déjà à ce qu'il soit dénoncé que les sherbrookois ont choisi de ne pas aller au spectacle, qu'on a de la misère à voir grand à Sherbrooke, que c'était pourtant bon, qu'on sabote toujours tout, etc... Pour ma part, je ne me plains pas du fait que j'ai contribué à payer le spectacle de mes taxes en plus d'acheter mon billet. En fait, je ne me plains pas du tout. Je dis simplement que je n'ai pas le goût d'entendre un post mortem accusateur. Si c'est le cas, je vous le dis : ne cherchez pas, c'est de ma faute.
C'est tellement plus simple ainsi...
Clin d'œil de la semaine
Fin du conflit entre la ville de Sherbrooke et ses cols bleus...
- - Bon, finalement, le col vient de se dilater...
- - La suite, Docteur?
- - Le repos arrangera tout...