Été 2014. Après un long hiver difficile, un printemps pluvieux et un été qui n'en finit plus de se faire désirer, l'esprit ne semble pas à la fête comme c'est notre habitude. Cette année, il semble qu'il n'y aurait pas fête au village. Pourtant, nous avons plusieurs raisons d'avoir l'esprit à la fête.
Chasser la morosité...
La Commission Charbonneau tire à sa fin et elle semble avoir mis au jour les stratagèmes les plus communs qui constituaient le système qui permettait à quelques-uns de s'enrichir aux dépens de plusieurs autres grâce à la collusion et à la corruption. Certains seront déçus. Il n'y aura pas de justice à la tronçonneuse et nous n'aurons vraisemblablement pas droit à l'exécution publique de notre ex premier ministre, le mal-aimé Jean Charest, pour égayer notre été et prolonger nos fêtes d'automne. Tout au plus, nous aurons droit au récit de nos dérapages et à la démonstration de notre cécité collective vis-à-vis nos affaires communes. Drapés dans une pseudo-vertu de peuple élu, meilleur que les autres, nous sortons de cette commission Charbonneau privés de nos illusions. Il faut néanmoins conserver l'essentiel et garder notre idéal : la vie démocratique c'est comme l'amitié ou l'amour, cela demande du soin et de l'attention pour demeurer en santé. La bonne nouvelle c'est que nous aurons été capables de dénoncer et de rendre public cette réalité. Il y a de quoi s'en réjouir...
Le temps de payer nos factures
Je l'ai évoqué dans ma chronique précédente, nous sommes à la fin du banquet et il faut régler la facture qui sera salée pour certains. Depuis plusieurs années, nous avons vécu au-dessus de nos moyens et nous drapant de bonnes intentions et nous avons refilé la facture à ceux qui nous suivent en dotant le Québec d'une dette déraisonnable et en multipliant les interventions de l'État dans tous les domaines. Pour faire chic, nous avons camouflé cela dans une vertu inattaquable. Le Québec est la société la plus juste en Amérique du Nord. Le paradis fiscal des familles. Or, tout cela était acheté à crédit. La bonne nouvelle c'est que nous allons être obligés d'aller au-delà de nos illusions et de briser ce mur rassurant pour remettre notre bateau à flot. Il y a de quoi fêter. Le réalisme et le sens des responsabilités, cela mérite d'être souligné, non?
Je sais. Nous aurons droit à un automne chaud. Nous assisterons au défilé des incompris et des laissés pour compte. À commencer par les employés syndiqués des municipalités du Québec qui nous ont fait leur printemps érable à eux le temps d'une manifestation spectaculaire à Montréal. Permettez-moi de noter le surréalisme de la scène où nos vaillants sapeurs-pompiers allument des incendies plutôt que de les éteindre sous le regard bienveillant et compréhensif des forces de l'ordre. En prime, croyez-le ou non, l'ineffable Gabriel Nadeau-Dubois a donné son appui à ces ennemis d'hier non sans leur rappeler leurs actes violents du dernier printemps à l'endroit de nos filles et de nos fils étudiants. Il y a de quoi en rire, ne trouvez-vous pas?
Un nouveau gouvernement
En avril dernier, les Québécoises et les Québécois se sont donné un nouveau gouvernement majoritaire. Sur ce sujet, il est difficile d'atteindre l'unanimité parmi mes lecteurs. Certains sont tristes des résultats alors que d'autres pavoisent. Néanmoins, je trouve que nous avons au moins une grande raison de nous réjouir du résultat des dernières élections. En fait, cette raison est la même que celle que nous devions avoir au soir de la victoire de Pauline Marois et du parti québécois en 2012. À deux reprises, le Québec a rejeté la plus détestable façon de faire de la politique celle de la « wedge politics ». Vous savez cette politique qui vise à diviser l'électorat sur un enjeu particulier en fortifiant sa base électorale. C'est la politique du petit calcul électoral, comté par comté. La politique qui fait de la mathématique électorale le Dieu de l'action plutôt que le bien commun.
En 2012, les Québécois ont dit Non à cette façon de faire de la politique à Jean Charest et aux libéraux qui opposaient la stabilité politique qu'il représentait à la rue incarnée par Pauline Marois, les étudiants et les groupes sociaux qui les appuyaient. En 2014, les Québécois ont aussi dit non à cette même façon de faire de la politique à Pauline Marois et au PQ qui ont tenté de nous diviser sur la base de la religion et de notre origine nationale au nom de la pureté de la race. Un recul majeur sur le nationalisme accueillant qui nous caractérise.
Le rejet de cette façon de faire de la politique qui nous vient de nos voisins américains est une très heureuse nouvelle. Il y a de quoi danser en quadrille dans les chaumières...
Samedi soir à Saint-Dilon...
Au-delà de tout, il y a plusieurs raisons de fêter le Québec cette semaine. Nous sommes près de huit millions d'habitants d'un territoire riche de possibilités. Nous parlons français et notre État, la province de Québec, a fait de cette langue l'outil commun de nos échanges et de notre vie collective. Nous sommes riches d'une grande histoire et d'un périple exemplaire dans un milieu difficile pour construire cette société originale en Amérique du Nord.
Nous avons tous les atouts et les outils pour maintenir ici en Amérique une société francophone, dynamique, originale, créative et juste. Nous sommes des parlants français d'Amérique, des descendants d'Amérindiens et des gens de toute la planète qui ont choisi ce territoire pour y vivre, y travailler et s'y épanouir.
Nous sommes des Québécoises et des Québécois et ce soir il y a fête au village.
Bonne fête Québec!