Nous ne pouvons mieux traduire à notre avis le scepticisme et l'incrédulité des citoyennes et des citoyens envers leurs élus que les paroles de la chanson « Attends-moi petit gars » de notre plus grand poète et troubadour national, Félix Leclerc qu'il a écrite en 1962 :
« La veille des élections
Il t'appelait son fiston
Le lendemain comme de raison
Y'avait oublié ton nom.
Attends-moi, ti-gars,
Tu vas tomber si je suis pas là
Le plaisir de l'un C'est de voir l'autre se casser le cou... »
Ils ont peut-être oublié nos noms, mais là, nous sommes dans la période où ils se souviendront de nous, car de nombreuses femmes (pas assez à mon avis) et de nombreux hommes chercheront à nous convaincre de leurs visions et de leurs compétences pour obtenir notre confiance et devenir ainsi conseillers ou maires de l'une ou l'autre des 1 476 municipalités ou villes du Québec. 1 475 plutôt puisque pour les raisons que nous connaissons les gens de Lac-Mégantic ne voteront pas cette année. La question est toujours la même, mais elle se pose avec plus d'acuité cette année : les gens iront-ils voter en grand nombre? À combien s'établira le taux de participation aux élections municipales en 2013?
Les effets de la Commission Charbonneau
Les élections du 3 novembre prochain se dérouleront cette année avec pour toile de fond les révélations lourdes de sens qui ont été faites tout au long de 2012 à la Commission Charbonneau. Il est vrai que ces révélations de collusion, de corruption et de banditisme ont touché plus la ville de Montréal et celle de la ville de Laval, mais la suspicion de la population envers leurs élus n'a jamais été aussi grande. Le lien de confiance entre les représentés et leurs représentants n'a jamais été dans notre histoire aussi ténu. La grande interrogation que nous pouvons avoir à l'endroit des scrutins municipaux qui se tiendront partout à Québec en novembre prochain est la suivante : quels effets auront les révélations faites à la Commission Charbonneau sur le taux de participation aux prochaines élections municipales tout particulièrement à Montréal et à Laval, mais aussi ailleurs au Québec?
Scepticisme, chialage et désengagement
Face à cet incroyable gâchis de notre tissu démocratique, plusieurs attitudes sont possibles. Il y a d'abord l'attitude la plus répandue qui est celle du cynisme absolu et du désengagement total de la vie démocratique municipale. Celle où l'on se défile de nos responsabilités en se motivant par des certitudes telles que « plus ça change, plus c'est pareil », que de toute façon « ce sont tous des pourris » et tutti quanti. Une autre attitude possible c'est le désintérêt total où l'on ne veut pas parler ou, pire encore, entendre parler de politique en disant que ce n'est qu'un lieu de chicanes et de débats inutiles tout en maugréant contre la mauvaise qualité des services et le trop haut niveau des taxes. Ces attitudes sont de loin les plus répandues et ils expliquent éloquemment les taux de participation avoisinant les 40 % aux élections municipales. Ce désintérêt collectif pour les affaires de la Cité a permis à de nombreux affairistes et gens cupides de faire main basse sur nos avoirs collectifs à leur profit à notre plus grand détriment. Comme l'avait dit dans un autre temps et autre contexte, l'ancien premier ministre du Québec, Jean Lesage, « Il est temps que cela change... »
Pour une autre façon de faire de la politique
J'ai souvent entendu par le passé des gens dire qu'il faut que la politique change, qu'il devrait y avoir d'autres façons de faire de la politique. Cela est fondamentalement possible surtout avec le nouveau monde de possibilités que nous offrent les moyens de communication de notre époque où la mobilité et l'accessibilité sont les maîtres mots. Il est vrai que la présence aujourd'hui dans nos vies des chaînes d'information continue, des médias sociaux et de plus en plus d'initiatives citoyennes nous permettent d'entrevoir de nouvelles façons de vivre ensemble notre vie démocratique. On doit cependant admettre sans grands débats que ces nouveaux moyens peuvent aussi avoir des effets pervers conduisant à la spectacularisation de l'Information et à des débats anarchiques frôlant souvent le mépris, la haine et la discrimination.
Ce qui est plus important encore que les outils dont nous disposons ou des réformes que nous pouvons apporter à nos institutions démocratiques c'est notre volonté de nous occuper de nos affaires et d'accepter le fait tout simple, mais si riche de sens, que nous vivons en communauté et que cela mérite notre engagement et notre intérêt. Vivre ensemble c'est accepter que nos idées ne soient pas toujours celles qui sont retenues par la majorité ou par nos vis-à-vis. Appartenir à une communauté cela signifie aussi que nous devons nous intéresser à l'Autre et à des sujets qui dépassent largement nos intérêts individuels. Une grande vérité s'impose à nous lorsque nous réfléchissons à la qualité de notre vie démocratique c'est que plus nous nous impliquons, plus les citoyennes et les citoyens s'investissent dans le processus politique moins il y a place pour des petites cliques qui prennent en otage nos institutions à leur seul profit. C'est cela la grande leçon que nous devrions retenir des audiences et des révélations qui ont été faites à la Commission Charbonneau.
Votons massivement le 3 novembre prochain
Je n'ai pas de réponse à ma question du début sur les effets qu'auront les révélations faites devant la Commission Charbonneau concernant la collusion et la corruption dans le monde municipal. Je souhaite cependant que le 3 novembre prochain, les citoyennes et les citoyens de partout au Québec se lèvent et votent massivement aux prochaines élections municipales. Cela constituera le meilleur antidote au cynisme ambiant et cela enverra un message fort aux gens cupides qui croient qu'ils auront encore accès, une fois la poussière retombée, à nos ressources collectives pour leurs fins personnelles. Mesdames, messieurs, des milliers de femmes et d'hommes honnêtes se présenteront devant vous dans les prochaines semaines en toute humilité pour solliciter votre confiance. Faites en sorte que leurs énergies et leur dévouement dont nous avons tant besoin trouvent un écho dans votre vote le 3 novembre prochain.
La démocratie véritable a besoin de vous et le Québec en a bien besoin par les temps qui courent...
Tweet de la semaine
« Après les campagnes électorales, il faut faire des machines à laver des mots salis et du raccomodage des mots déchirés » dans Bernard Pivot, Les tweets sont des chats, Paris, Albin, Michel, 2013, p.33.
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