C'est là toute la magie de mon lecteur de musique. Je l'appelle affectueusement Bidule. Comme le spectre de mes goûts est large, plusieurs styles de musique se croisent sur le lecteur. Bidule peut passer de Brassens à Metallica en quelques secondes et je ne suis pas dérouté. Au fond, quand je demande à Bidule de me chanter des chansons, j'ai souvent un comportement de femme enceinte : le mélange des goûts, ça ne me fait pas peur!
Cette semaine, j'étais dans la voiture à écouter un (autre) reportage sur la tuerie à l'Hebdo Charlie, quand j'en ai eu marre. J'en ai un peu contre cette fascination à étirer la présence en ondes pour répéter, en boucle, qu'on n'a plus rien à dire, mais qu'on se sent l'obligation de rester en ondes parce que c'est grave. Je demande donc à Bidule de chanter, en mode aléatoire. Sûrement inspiré par l'Univers, comme le croient mes amis plus ésotériques, voilà qu'il joue la chanson de Claude Dubois, « Si Dieu existe ». Comme ça. Il n'y a pas de hasard, me diront ces mêmes amis...
Pour moi, ce qu'on a vécu cette semaine n'a rien à voir avec la religion. Cela a à voir avec le pouvoir. Une guerre éternelle, née en pleine nuit des temps et qui perdure. C'est le combat de la terreur. De celui qui manipule l'autre pour contrôler le monde. La fascination des bons et des méchants des "Super héros".
Cette fois, c'est le prophète Mahomet. Ça a déjà été la recherche de la race pure et les bras levés devant Hitler. Les visages de la justification changent, mais la motivation demeure : une question de pouvoir et de soumission.
Cette semaine, nous étions tous Charlie. Sans connaître vraiment l'hebdomadaire dont il est question. Mais, au moins, nous avons réagi. Au moment où Raif Badawi recevait ses 50 premiers coups de fouet pour des commentaires jugés haineux contre le prophète et le Royaume, nous sommes devenus Raif. J'ai été touché par ce mouvement.
Au moins, on a réagi, me suis-je dit. On a réagi à l'attaque contre une liberté, celle de l'expression. Il a fallu des morts pour qu'on réagisse. Parce qu'ici, au Canada, quand le gouvernement de Stephen Harper muselle le droit de parole des scientifiques pour mieux contrôler une idéologie de droite, on ne dit rien.
Là, au moins, on a réagi.
Et on a le droit de le faire. Vous voyez, théoriquement, je ne devrais pas être flagellé pour ce que j'écris. Et pour le fait que je pense ce que j'écris.
Le vrai enjeu, il est là. Le pouvoir ultime, pour qu'il s'applique bien, nécessite que le reste du monde ne pense pas. La stratégie de l'État islamique, ce groupe radicalisé, est d'imposer, par toutes sortes de méthodes, des pensées dans la tête de ses fidèles. Quand les idées sont là, on a plus à penser. Tout est déjà formaté.
La tuerie de Charlie et les coups de fouet de Raif, ça n'a rien à voir avec la religion. Ça a à voir avec le pouvoir. Celui qu'on impose par tous les moyens. Et l'Histoire foisonne d'exemples.
J'ai donc souri en entendant chanter Dubois. Si Dieu existe... Puis, je me suis demandé qui j'étais, moi. J'ai écrit « je suis Charlie » et « je suis Raif ». C'était une saine réaction momentanée. Mais moi, là-dedans, je suis qui? « Je suis François ». Un être qui croit en des valeurs comme la solidarité, l'équité et la transparence. Mais qui est bien conscient que tous ses actes ne concordent pas toujours avec ces valeurs. Je suis un imparfait qui, tant bien que mal, garde le cap sur des valeurs inclusives.
Et je me disais, à la fin de la toune, que l'Homme naît bon. Il apprend les comportements hostiles au cours de sa vie. Au fil des millénaires, Il a démontré qu'il est assez stupide pour organiser sa propre destruction. On dirait qu'Il n'apprend pas.
C'est là que Bidule m'a rappelé à la réalité du moment. Il a lancé Brassens : « Le temps ne fait rien à l'affaire, quand on est con, on est con ».
Ce doit être l'Univers qui manipule Bidule.
Clin d'œil de la semaine
Je suis... découragé. Mais pas abattu.