Avez-vous suivi la dernière convention républicaine ? Il est
d'ailleurs curieux que les Québécois et les Canadiens accordent autant
d'importance à la politique américaine. Il est vrai que nous entretenons des
liens économiques et commerciaux substantiels avec notre voisin du sud. Cela
justifie-t-il pour autant que l'on accorde une si grande importance à cet
événement politique d'un pays étranger au nôtre ? C'est à croire que si nous
avions le droit de voter, le taux de participation électorale serait plus élevé
que celui de nos villes et villages.
Quoi qu'il en soit, l'élection américaine
à la présidence sollicite notre attention. Ne nous privons pas alors de la
commenter. Radioscopie d'un tissu de faussetés érigées en discours politique
républicain.
Un spectacle télévisuel pour les
heures de grande écoute
J'ai été un spectateur attentif à la convention républicaine
tout au long des quatre jours de la semaine dernière où celle-ci s'est déployée
aux heures de grande écoute américaine. J'ai suivi cette convention
principalement sur les ondes de CNN
et Fox News ainsi que de nos chaînes à nous RDI, LCN et leur équivalent au Canada anglais. Vous ne serez pas
étonné que j'aie été happé par la différence de traitement entre CNN et Fox News. La guerre
amorcée entre les rouges et les bleus sous fond d'un pays plus divisé que
jamais se livre aussi par ces deux médias à l'heure de grande écoute.
De cette convention, il y a peu à dire si ce n'est que nous
avons eu droit à une infopublicité républicaine qui mettait en vedette la
réalité alternative de Donald Trump. Le contraste avec le même exercice fait
par les démocrates la semaine précédente était on ne peut plus saisissant. Deux
discours, deux Amériques. Dans ce genre d'événements, nous sommes habitués à y
retrouver des discours aux accents partisans et de constater que les
protagonistes en présence ne cherchent qu'à mettre en valeur leurs bons coups.
C'est de bonne guerre. Sur le plan purement de la critique en matière de
scénarisation et de réalisation, la convention républicaine a la meilleure note
ne serait-ce à cause de la qualité du feu d'artifice de jeudi soir dernier et
du caractère grandiose du lieu choisi pour le discours du président sortant. La
Maison-Blanche étant un lieu magnifique chargé de significations pour le
lancement d'une campagne présidentielle. La descente du grand escalier par
Donald Trump accompagné de sa femme Melania était un grand, moment télévisuel.
La bonne nouvelle c'est que désormais grâce à Donald Trump, tous les futurs
candidats à la présidence cherchant à se faire réélire pourront compter sur ce
lieu pour magnifier leur image. Ceux-ci diront merci à Trump d'avoir
démocratisé en partisanerie ce lieu symbolique des États-Unis.
Si le spectacle a été réussi sur le plan de la forme, cela
est moins vrai sur le plan du contenu.
Des discours surréalistes en temps de
crise
D'abord, le discours qui a été tenu par les divers orateurs
au cours de ces quatre longues journées a réuni ce qu'il y avait de pire aux
États-Unis. On y a entendu les discours pro-vie, les discours concernant les
armes à feu, la rhétorique contre les méchants gauchistes, les dénonciations
des manifestations pacifiques, la mise en exergue de la violence des villes
démocrates en faisant de ces derniers des complices des anarchistes, les
discours quant à la sécurité et contre l'environnement, la démonisation de la
Chine et de l'immigration. Bref, les thèmes chers à Donald Trump ont été
amplement couverts et pour l'essentiel il les a repris dans son trop long
discours de 62 minutes jeudi soir dernier.
La pandémie de la COVID-19, ce virus chinois nous dit Trump a
été présenté comme chose du passé et on a insisté sur le fait que le président
par son attitude a contribué à sauver des millions de vie notamment en
interdisant les voyages avec la Chine et surtout par sa mobilisation des
milieux de la santé qui vont trouver, foi de Trump, un vaccin efficace avant la
fin de l'année. Heureusement pour lui que le vote est prévu pour le 3 novembre.
Il n'y aura donc pas la preuve tangible de cette autre fausseté avant la tenue
du scrutin. D'ailleurs, dans la foule présente dans les jardins de la Maison-Blanche
estimée à plus d'un millier de personnes, on peinait à retrouver des gens
arborant un couvre-visage. Un déni de réalité qui cadrait bien avec le discours
voulant que la pandémie soit derrière et que le président Trump l'avait terrassée.
Enfin, on aurait remarqué que peu de républicains enracinés
dans le parti depuis plusieurs décennies étaient présents. L'absence du seul
président républicain encore vivant George W. Bush a été remarquée.
La réalité des faits alternatifs de
Trump est devenue la réalité politique américaine
Le Washington Post qui a relevé toutes les faussetés
contenues dans le discours du président jeudi soir n'a pas chômé. Ce n'est pas
vrai que les États-Unis font davantage pour tester leur population que tous les
pays d'Europe ensemble comme il est faux que le taux de décès attribués à la
pandémie sont les plus faibles dans le monde. Les États-Unis arrivent au 11e
rang sur 20.
Ce n'est pas vrai non plus que sous Trump, la communauté
afro-américaine a eu droit à une avancée plus grande que sous tout autre
président mis à part la présidence d'Abraham Lincoln qui a aboli l'esclavage.
Les démocrates n'ont pas espionné la campagne électorale de Trump, mais le FBI
s'est inquiété des relations de Michael Flynn avec l'URSS. D'ailleurs, ce
dernier a été forcé de démissionner de son poste de conseiller à la sécurité
nationale 24 jours après sa nomination pour ne pas avoir dit la vérité aux
membres du Sénat lors de sa comparution pour obtenir ce poste. Il est aussi
faux que Joe Biden est resté silencieux sur la violence des émeutiers. Biden a
dénoncé la violence, mais il a dit comprendre pourquoi elle existait. Ce qui
n'est pas la même chose. Faux aussi que Biden veuille cesser la production
pétrolière, il veut que les États-Unis contribuent comme tous les pays du monde
à la réduction des gaz à effet de serre. Je pourrais poursuivre longtemps, mais
à quoi bon, ce président ment comme il respire et cela est avalisé par ses
partisans et sa chaîne d'information Fox
News. Parfois, les mots sont
impuissants à combattre les faussetés et l'endoctrinement quasi religieux des
partisans de Trump.
Vivement les élections...
Deux grands constats émergent de ces conventions politiques
à la présidence américaine à quelques mois de l'élection. Le premier, c'est que
l'Amérique n'a jamais été aussi divisée. Ce n'est pas nouveau, mais à chaque
élection à la présidence, les candidats des deux partis s'efforçaient de
rassembler les Américains, pas de les diviser. C'est ce qui distingue Trump de
tous les autres candidats républicains avant lui.
Le second constat et cela n'est pas une bonne nouvelle pour
celles et ceux qui croient à la démocratie, la défaite de Trump n'est pas
obligatoirement synonyme de son départ de la présidence. Il est plausible que
celui-ci cherche à se maintenir au pouvoir malgré une défaite électorale aux
mains du démocrate Biden. Il a déjà commencé à préparer les esprits. On
comprend difficilement qu'une grande démocratie comme celle de nos voisins
américains soit aussi près d'une nouvelle forme de dictature. Pour Trump,
défendre l'Amérique contre les communistes est une mission. La politique pour
Trump c'est une affaire de famille...