Votre cousin Jérémy vient vous raconter ses misères.
Il y a quelques jours, le chien de son amie de cœur l'a griffé au visage, il a perdu un œil. Cela faisait quelques jours qu'il avait emménagé chez elle.
Le matin de l'accident, le chien a demandé à sortir, Jérémy lui ouvre la porte. Un peu plus tard, il appelle le chien, mais ce dernier, un bullmastiff, semble coincé sous la galerie.
Votre cousin sort de la maison, se rend sous le portique, se penche et au même moment, le fils de son amie appelle le chien. Ce dernier sort et accroche l'œil de Jérémy avec une griffe.
Question : L'amie de cœur de Jérémy est-elle responsable des agissements de son chien?
L'article 1466 C.c.Q. se lit comme suit :
« Le propriétaire d'un animal est tenu de réparer le préjudice que lui a causé un animal, soit qu'il fût sous sa garde ou sous celle d'un tiers, soit qu'il fût égaré ou échappé.
La personne qui se sert de l'animal en est aussi, pendant ce temps, responsable avec le propriétaire. »
Pour répondre à cette question, il faut au départ déterminer si Jérémy est une personne « qui se sert du chien ». Pour ce faire, l'individu doit en avoir la garde. C'est ainsi qu'une personne qui accepte de nourrir un chien, de le garder afin de rendre service au propriétaire, ne sera pas considéré comme une personne « utilisant » un animal.
Cependant, la Cour d'appel du Québec a déjà considéré dans l'affaire Lessard c. Morrow [2003] R.R.A. 39, qu'une personne habitant avec le propriétaire d'un chien, alors que ce propriétaire s'était absenté pour quelques jours, avait pris soin dudit chien, avait pris une marche quotidienne, l'avait nourri, brossé et transporté dans sa voiture, cette personne a été considérée comme ayant un véritable pouvoir de contrôle sur le chien, même si elle ne recevait aucune rémunération.
Dans le cas qui nous occupe, Jérémy n'est pas le gardien ni l'usager de l'animal, il ne joue pas avec le chien, ni ne se promène pas avec lui, il ne le nourrit pas.
Pour éviter sa responsabilité, l'amie de Jérémy doit démontrer une faute de la part de ce dernier, par exemple que Jérémy ait provoqué le chien. Il faut qu'elle fasse la preuve de cette provocation avec un ou des témoins qui auraient vu Jérémy défier le chien par exemple.
En l'absence d'une telle preuve, l'amie sera donc responsable du comportement de son chien.
Quand vous êtes propriétaire d'un animal, vous en assumez toute la responsabilité, il vaut mieux détenir une assurance, ce qui couvrira les dommages occasionnés par votre animal.
Dans le cas proposé aujourd'hui, l'amie de cœur a été condamnée à payer 100 000,00 $ pour le préjudice subi. Il est à remarquer que la victime n'a cependant pas présenté de preuve concernant sa perte de capacité de gain (Gilbert c. Provost, Cour supérieure le 14 octobre 2015).
Au plaisir.