Vous avez déjà sans doute eu des discussions avec votre entourage et vous avez déjà sans doute entendu les mots « société », « compagnie », « société en nom collectif », « entreprise », « société en commandite ». Plusieurs de ces termes se ressemblent et veulent dire la même chose, mais d'autres non. Au fil des prochaines chroniques, nous apprendrons à les distinguer.
Pour commencer, il est important de savoir que le mot société est venu remplacer le mot compagnie, il y a de cela quelques années. Avant février 2011, ces deux termes signifiaient deux choses différentes : on utilisait le terme « compagnie » lorsque celle-ci avait été incorporée au Québec (charte provinciale) et on utilisait plutôt le terme « société » lorsqu'on parlait d'une incorporation au Canada (charte fédérale). La présente chronique ne portera que sur les sociétés provinciales, puisque c'est ce que nous rencontrons le plus fréquemment au Québec.
En fait, depuis le 14 février 2011, toute compagnie autrefois constituée au Québec, en vertu de la partie IA de la Loi sur les compagnies est devenue une société par actions régie par la Loi sur les sociétés par actions. Beau cadeau pour la St-Valentin! Et évidemment, toute société constituée depuis ce temps est une société par actions régie par la même loi. Nous reviendrons dans une prochaine chronique sur les obligations que cela a pu engendrer pour les sociétés (anciennement compagnies) déjà existantes ou à être créées.
La présente chronique vous expliquera « qui » est une personne compétente pour la constitution de votre société. Pourquoi un juriste et non un comptable ou autre professionnel qui touche de près ou de loin à votre société? En vertu de la Loi sur le Notariat et de la Loi sur le Barreau, seuls les notaires ou les avocats peuvent :
(...) préparer et rédiger une convention, une requête, un règlement, une résolution et tout autre document de même nature se rapportant à la constitution, l'organisation, la réorganisation ou la liquidation volontaire d'une personne morale régie par les lois fédérales ou provinciales concernant les compagnies, ou à l'amalgamation de plusieurs personnes morales ou à l'abandon d'une charte (...)
Ce qui signifie qu'un comptable, ou un autre professionnel qui n'est ni avocat, ni notaire, ne pourra pas procéder à l'incorporation de votre société, car ce geste constitue une pratique illégale de la profession de notaire ou d'avocat et encours la possibilité d'une poursuite pour avoir posé ces gestes.
La constitution de votre compagnie comporte plusieurs étapes et chacune d'elle s'accompagnera de conseils juridiques adaptés à votre situation, d'où l'importance de réserver ce domaine à des juristes. Cela vous assurera d'avoir eu toutes les informations nécessaires, et que l'organisation juridique de votre société sera adaptée à vos besoins. De plus, le travail de votre notaire et du comptable est complémentaire; bien que l'incorporation soit réservée aux juristes, ces derniers travaillent très souvent en étroite collaboration avec votre comptable ou votre fiscaliste afin de s'assurer que ce qui sera mis en place respectera les objectifs fiscaux que vous avez déterminés.
Dernier petit mot qui pourrait toucher ceux qui souhaitent s'incorporer par eux-mêmes, parce que oui, c'est possible. Il est dangereux et imprudent de le faire, car un non-initié ne peut pas penser à tout ce qui est important dans une incorporation, ne rien oublier et surtout adapter les documents en conséquence. Le capital-actions contient-il suffisamment de catégories? Est-ce qu'il y a lieu de faire une réservation de nom? Avez-vous fait l'organisation juridique? Avez-vous déposé les annexes accompagnant la charte et particulièrement ceux qui touchent les restrictions au transfert de titres? Avez-vous produit la déclaration initiale au Registraire des entreprises du Québec? Une incorporation se doit d'être personnalisée et si des erreurs importantes sont commises, cela nécessitera des corrections dans le futur. Vous comprendrez donc que si vous souhaitez le faire par vous-mêmes pour économiser des frais, vous vous ferez tôt ou tard rattraper pour la correction et ces frais seront, et je parle par expérience, beaucoup plus élevés que si vous aviez fait affaire avec un juriste dès le départ.
Dans une prochaine chronique, nous regarderons ensemble les différentes étapes qui sont nécessaires pour constituer une société. Vous serez à même de constater que ce n'est pas si simple et surtout, que cela ne se fait pas en criant « ciseaux »!