À vos tablettes électroniques ou vos calepins de notes, je vous donne la recette ultime du repas tout aussi ultime : la sauce à spaghetti.
Mais non, je ne vous donnerai pas de recette. Mais non... De toute façon, ça contient bien trop d'ingrédients, une sauce à spaghetti!
Je goûtais une nouvelle sauce, ces jours-ci. Une sauce préparée par une amie. Qui tient la recette de sa belle-mère. Oui, oui, ça peut marcher, aussi, une sauce à spaghetti de la belle-mère. Après tout, avant d'être une belle-mère, elle a été une mère! Et c'est toujours la recette de sa mère qui est la meilleure. Au risque de faire chicanes dans le couple.
Pour moi, la sauce à spaghetti, c'est tellement plus qu'une série d'ingrédients et de'instructions! La mémoire olfactive étant la plus puissante, dit-on, je n'ai aucun mal à me rendre, dans le dédale de mes souvenirs, sur la route de mon enfance. J'entrouvre la porte de la maison et l'odeur est là. Celle de la sauce à spaghetti. Celle qui annonce un petit bonheur. Celle qui réconforte.
Je me souviens d'une journée où mon corps ne « feelait» pas bien du tout. Au souper, enroulé dans les couvertures de mon lit, je me disais que je ne mangerais pas. Me semble que rien ne me tentait. On devrait écouter son corps, dans ces conditions, non? C'est ce que j'ai fait. J'ai avisé maman que je n'allais pas manger. Que je « feelais » encore un peu croche. J'ai quitté ma chambre pour aller à la salle de toilettes et là, elle m'a surpris. Comme en flagrant délit. L'odeur de la sauce à spaghetti. Ne serait-ce que pour déjouer la terrible injustice qui me guettait (celle de ne pas pouvoir manger de spaghetti), j'ai défié mon corps et je me suis présenté à table.
Hey, bien, c'est confirmé, le spaghetti guérit aussi.
La sauce à spaghetti (ou une autre recette marquante), c'est plus qu'un repas. C'est un repère. C'est la maison. La sécurité qu'elle représente. C'est l'endroit où on sait qu'on a une place. L'endroit où pas grand-chose ne peut nous arriver.
Comme plusieurs, j'ai retranscrit la recette de sauce à spaghetti de maman. Mais maman a cette manie de souvent préciser ses quantités par le mot « au goût ». Ça aide pas, ça!
De toute façon, quoi qu'on fasse, on dirait que ça ne goûte jamais tout à fait pareil. Et c'est probablement mieux ainsi. Pour qu'un élément devienne un repère dans la vie de quelqu'un, ça prend une touche personnelle. La touche qui fait évoluer les choses. Qui tisse, même sur la base d'une recette commune, une toile un peu différente de celle qui nous a protégés un jour.
Des fois, je me dis que quand une maman (ou un papa qui fait de la sauce à spaghetti!) meurt, il y a une sauce à spaghetti qui nous quitte. Mais la recette demeure, épicée de souvenirs et de bons moments. Une recette qui demande à être faite et refaite un peu différemment, juste pour s'assurer qu'elle devienne un repère pour quelqu'un d'autre.
En mangeant la sauce à spaghetti concoctée par mon amie, voilà que j'avais cette impression un peu étrange de mettre la fourchette dans l'univers de quelqu'un d'autre, comme si ce quelqu'un me racontait un souvenir de son enfance.
La recette peut être relevée ou pas, c'est selon. Mais quoi qu'il en soit, c'est toujours fort, une sauce à spaghetti...
Clin d'œil de la semaine
Phrase potentiellement dangereuse: « C'est la sauce à spaghetti de ma mère. Elle est relevée et bien épaisse... »