La littérature et le marché du livre se portent bien à Sherbrooke et en Estrie.
Selon Ghislaine Thibault, directrice générale du Salon du livre de l'Estrie, la situation globale de la littérature se porte bien en Estrie : « La littérature et la lecture vont très très bien. Même si nos revenus à l'entrée au Salon ont baissés, l'achalandage a augmenté. En fait, ce sont les enfants (qui ne paient pas leur entrée au Salon du livre) qui viennent en visite scolaire, qui entraînent par la suite les parents à venir visiter le salon. Et les exposants sont enchantés : les ventes sont stables ou en hausse. »
« Les jeunes sont sensibilisés à la lecture, les bibliothécaires travaillent très fort pour promouvoir les livres et la lecture, les professeurs soulignent l'importance de la lecture, et les parents suivent et appuient ce mouvement. Et déjà, on voit que les jeunes ont adopté des personnages de livres et même des auteurs. La littérature jeunesse québécoise fonctionne très bien, c'est très fort », ajoute-t-elle.
Du côté de la Biblairie GGC, une institution qui existe depuis 38 ans à Sherbrooke, l'opinion est plus nuancée : « Le marché du livre est difficile. Il faut travailler très fort. Les impacts de la dernière crise économique se font toujours sentir et comme un livre n'est pas un produit de première nécessité, le secteur des librairies en pâtit », confie Étienne Caza, directeur principal de la Biblairie GGC de la rue King. Pour appuyer ses dires, Étienne Caza cite en exemple la vingtaine de librairies et de revendeurs de manuels scolaires qui ont fermé boutique au cours des dernières années au Québec.
Spécialisée dans les manuels scolaires au début, GGC a diversifié ses activités vers l'offre de livres et de revues et magazines, de papeterie, de matériel d'artiste et de jeux éducatifs. « Pour nous, la Biblairie GGC est devenue un centre culturel à Sherbrooke », mentionne Étienne Caza.
Chez GGC, 75 % des livres vendus sont des nouveautés, des « best-sellers », alors qu'il y a entre 40 000 et 45 000 titres différents en inventaire. « Costco et Walmart ne s'embarrassent pas d'un tel inventaire : ils n'offrent que les 500 derniers best-sellers. Ce qui explique un peu pourquoi nous sommes en faveur de la loi du prix unique pour le livre : que les nouveautés soient disponibles en librairie pendant huit mois avant qu'ils ne soient disponibles dans les supermarchés grande surface ».
Le marché de Sherbrooke est particulier et un peu privilégié avec deux universités, deux collèges, et des commissions scolaires populeuses : « Avec un tel bassin d'étudiants et de professeurs, nous avons une bonne population de lecteurs. GGC reçoit entre 500 à 600 commandes spéciales par semaine. Nous sommes chanceux d'avoir une clientèle très très fidèle. »
Concurrence du livre électronique
Selon Étienne Caza, « les gens lisent différemment aujourd'hui. En fait, ils ont moins de temps à consacrer à la lecture : ils passent beaucoup de temps sur le web, les réseaux sociaux, et ces appareils consomment beaucoup de temps. » Pour Ghislaine Thibault, « le livre électronique, disponible sur liseuse ou internet, ne représente que 2 % du marché. »
Mais Ghislaine Thibault et Étienne Caza sont d'accord sur un point : les lecteurs d'aujourd'hui sont très bien informés et avisés. « Il faut toujours être à l'affût des nouveautés dont on parle à la télévision, dans les émissions littéraires et dans les journaux. Il faut être très proactif et tenter de savoir, prévoir ce que les lecteurs vont demander. On est très dépendant du « buzz », observe Étienne Caza.
Malgré les difficultés, malgré le web, les livres électroniques, etc., Étienne Caza est convaincu qu'il y a encore de l'avenir et un marché pour le livre traditionnel : « Tout n'est pas sombre. Il faut se réinventer constamment, apprendre à toujours mieux servir notre clientèle que ce soit en magasin, au téléphone ou sur le web. Une de nos grandes forces est le service-conseil et c'est une approche que nous voulons conserver », conclut-il.