L'apparition du iPhone 5, lancé mercredi dernier au Yerba Buena Center for the Arts (1) de San Francisco, a une grande similitude avec les élections québécoises du 4 septembre.
Dans les deux cas, on s'attendait à beaucoup et même à plus, alors qu'on a reçu un peu de tout sans vraiment satisfaire notre envie de voir du vrai changement.
Ainsi, les Québécois ont eu un peu de PQ (Parti Québécois), un peu de PLQ (Parti Libéral), un petit peu de CAQ (Coalition Avenir Québec) et un chouia de QS (Québec Solidaire). Il n'y a pas eu de vague; rien ne s'est imposé; rien n'est ressorti de la poutine dans laquelle ils piaffaient depuis des lustres.
Même chose pour le iPhone qui, comme d'habitude, a été lancé en grande pompe. Pendant que le P.D.G. Tim Cook en faisait la présentation, les disciples se sont écriés « Oh My Godddddd! ». Mais à la fin, comme si un chef d'antenne avait déclaré « si la tendance se maintient, Radio Canada prévoit que le iPhone 5 ne sera pas révolutionnaire et ne sera pas en situation de dominer le marché », ils sont rentrés chez eux un peu déçus, mais contents quand même.
C'est un fait qu'à comparer au iPhone 4s, le 5 n'est pas révolutionnaire. Il n'est qu'une amélioration générale, une sorte de 4s version 2. On est loin de la marche entre le 3gs et le 4 dont la hauteur en avait impressionné plus d'un. Mais il y a quand même des limites à l'innovation, direz-vous. Vous avez sûrement raison. Faudra-t-il attendre que nos téléphones sachent agir en four à micro-ondes ou en arme de poing pouvant émettre des décharges électriques avant de le constater ? Face à ce phénomène, soit que les fabricants se survoltent les courroies à en rajouter, soit qu'ils s'offrent le répit d'une saine méditation et qu'ils continuent à bien soutenir l'avenir de leur ligne de produits. Le défunt Steve l'a bien dit : on ne fabrique pas pour répondre aux besoins de nos clients. On les amène à de nouveaux besoins que l'on assume.
Mais il n'est plus là, le défunt. Ce qui nous amène à l'écran de 4 pouces. Ce n'est pas une innovation fricogène, mais une réponse aux clameurs de la populace. Incroyable, Apple a écouté la rue ! Plusieurs concurrents du iPhone, des bidules Android et même le Blackberry Torch 9850, avaient des écrans plus grands que celui du iPhone 4s. Alors, les zélotes iPommisés scandaient « ÉCRAN 4 POUCES POUR PAS QU'ON SE POUSSE ! » Et ils l'ont eu leur écran. Croyez-vous que le Jobs aurait cédé ? Jamais. L'écran serait demeuré tel quel, mais le fournisseur LG aurait été contraint à les lui livrer à moindres coûts.
Vous dites que le iPhone 5 est plus rapide, plus mince et plus léger ? Évolution normale; rien pour défaillir de bonheur. Il se connecte désormais aux réseaux 4G LTE ? Tout le monde est en train de s'adapter à cette norme par crainte de descente aux enfers. Vous parlez du DC-HSDPA ? Je veux bien, mon lapin ! C'est une saveur pas si tant pire du 4G qui est présente surtout ailleurs qu'aux États-Unis. Fallait bien lui faire de la place, non ? Ah! Vous me brandissez les merveilles de l'iOS 6 et de SIRI qui est moins con que jamais ? Bravo. Méchante belle innovation que cette amélioration normale !
Avez-vous noté ce qu'a fait remarquer la firme britannique Ovum ? Le nouveau champion d'Apple ne dispose toujours pas de logiciels pour payer à distance, pour échanger des documents en plaçant deux iPhone 5 côte à côte (techno NFC de Sony), pour s'adonner à la reconnaissance faciale, des technologies dont certains bidules concurrents disposent, eux ! En fait, soutiennent les porte-parole d'Ovum, « si Apple ne revoit pas son système d'exploitation et sa plateforme logicielle correspondante dans les deux ans, il pourrait se retrouver dans la position actuelle de Nokia et RIM». Ce n'est pas moi qui le dit, épargnez-moi les commentaires haineux dans Twitter et ne m'affublez pas d'une moustache à la Adolphe ainsi que d'une croix gammée.
Car, n'ayez crainte, le iPhone 5 va se vendre partout, en des quantités folles, dès 21 septembre. Attendez-vous à ce que les vrais mordus fassent la file. Plusieurs auront même déjà revendu leurs 4s. Génial !
Si cela leur est possible, ces heureux fripons pourront bénéficier des nouveaux réseaux 4G LTE (2), d'où les trois saveurs de iPhone 5 : le GSM Model A1428, le GSM Model A1429 et le CDMA model A1429. Voilà pourquoi, dans certains marchés, p. ex. celui de la France, il est incompatibles pour l'instant avec les réseaux en place, ou encore celui la Grande-Bretagne, la majeure partie des fournisseurs ne pourront l'offrir, du moins en son état actuel, etc. Chez nous, il ne devrait pas y avoir de problème avec les Rogers, Bell, Telus, Virgin Mobile, Fido et Koodo, tous de dynamiques revendeurs.
C'est quoi le 4G LTE ? La techno 4G LTE, alias la 3,9G (d'où le 4 dans 4G), permet d'atteindre un débit de plus de 100 mégabits par seconde (Mb/s). C'est différent de la 4G vanille, celle qu'utilise, par exemple, l'Américaine T-Mobile et qui ne dépasse pas 42 Mb/s (2). De plus, la 4G LTE englobe désormais les réseaux Wimax et HSPA+ (alias le 3G+). Pour être vite, c'est vite. Il n'en demeure pas moins que de faire passer le iPhone du 3G au 4G LTE, ce n'est pas ce qu'on peut qualifier de révolution. C'est une bonne amélioration, mais une amélioration forcée (la concurrence étant sans merci) que certains apprécieront, mais que d'autres, possiblement la majorité, ne sentiront pas. Sauf que dans les boutiques, on ne parlera que de cet avantage.
Et que dire de la nouvelle interface de connexion USB inter bidules. Apple l'a rapetissée; c'est maintenant une variante micro-USB exclusive à Apple. Il va donc falloir acheter des adaptateurs (quelque 30 $). Si c'est une innovation c'est surtout un irritant. Un irritant de la trempe des connecteurs Firewire 800 par rapport aux 400. Vous vous souvenez ?
Cela pour dire que ce n'est pas avec la version 5 de son ordiphone fétiche qu'Apple va damer le pion au savorama Android. Tim Cook a choisi la prudence en ces temps de concurrence effrénée, en ces temps de chassé-croisé dans des tribunaux de plusieurs pays. Ce chef d'entreprise étant ce qu'il est, on peut supposer que le prochain modèle de iPhone est déjà en état beta et que lors de son lancement, dans un an, plus ou moins, l'effet WOW sera généralisé.
À défaut, les marchés commenceront à parler d'essoufflement, pire, de vieillissement, et l'alternative Samsung triomphera haut la main.
(1) Pour les amateurs de MacWorld, le Yerba Buena est collé sur le centre Moscone.
(2) Le G signifie « génération ». Les G1 étaient ces anciens téléphones analogiques. Les G2, les premiers appareils numériques, dont une fourmilière de Nokia. Le 3G est cette catégorie ultra bordélique où, au fil des ans, on a eu des normes de vitesse variant entre 144 Kb/s et plus de 4 Mb/s. Quant au 4G, il hérite de la bordélisation caractérisant son géniteur, le 3G. Bref, disons que seul le 4G LTE correspond plus ou moins au vrai 4G tel que défini à l'International Telecommunications Union. Autrement dit, si on vous propose un appareil 4G, assurez-vous que ce soit du 4G LTE. Sinon vous n'aurez que du 3G amélioré. Cliquez ici pour un tableau (Average Wireless Speed) préparé par PC World.