Dans le cadre du Festival cinéma du monde de Sherbrooke, une dizaine de courts métrages réalisés par des vidéastes de l'Estrie seront présentés le dimanche 13 avril, à 14 h, à la Salle du Parvis (987, rue du Conseil à Sherbrooke).
Lors de la cérémonie de clôture du festival à la Maison du cinéma à 19 h 30 dimanche soir, on décernera le prix Cercle d'Or au meilleur court métrage de la région estrienne.
À cette occasion, j'ai rencontré quatre vidéastes cinéastes de l'Estrie :
Manuel Chavarin, 27 ans, originaire du Mexique, au Canada depuis trois ans, a réalisé trois courts métrages, des vidéos pour des webséries, et il travaille comme caméraman à Radio-Canada Estrie.
Nadia Fortin, 34 ans, des Productions Nolad : scénariste, réalisatrice, monteuse, comédienne, elle est l'auteure de «La peste et le lépreux»; «Bos Taurus Magneticus la vache»; «Pour le temps qu'il nous reste»;
«Interférences», Grand prix du jury du concours international de courts métrages Dis-moi dix mots remis par le Consulat général de France à Québec en 2013; «Evan»; et «L'ascenseur» (dont la sortie est prévue pour mai 2014).
Mathieu Gagnon, 32 ans, des Productions Garde à vue, a réalisé cinq, six courts métrages, plus un lot de vidéo-clips et de documents corporatifs, et travaille comme caméraman.
Pierre Javaux, cinéaste depuis une quarantaine d'années, a convaincu la Maison du Cinéma de diffuser son prochain film, un long métrage documentaire sur l'artiste Micheline Goulet.
Ils sont tous membres de Cinésis, un organisme à but non lucratif en vidéo, en cinéma et en arts médiatiques. Cinésis existe depuis mai 2013 et regroupe une vingtaine de membres. L'organisme offre de l'aide aux vidéastes de la région sherbrookoise en mettant à leur disposition du matériel de production et de postproduction.
« Il faut pédaler beaucoup pour parvenir à faire ce qu'on veut, commence Nadia. En région, on est obligé de tout faire, de s'impliquer à toutes les étapes de la production, d'être polyvalent et débrouillard... Moi, j'ai fait les maquillages, les costumes, j'ai joué dans mes propres films sinon je n'y serais jamais arrivée. On fait tout. C'est pour ça que le réseau, qu'un organisme comme Cinésis est important. On réussit parce qu'on s'entraide. Et la communauté nous soutient aussi. Les commerçants, les autorités de la ville, tout le monde nous aident », ajoute-t-elle, avec les acquiescements des autres.
Aujourd'hui, tout le monde peut avoir et savoir opérer une caméra vidéo haute définition (HD), un système de montage, tout un chacun peut produire et réaliser son propre vidéo.
« La technologie et les moyens sont disponibles, oui, mais il s'agit d'être original, de démontrer de l'originalité dans ce qu'on fait , signale Manuel Chavarin. On peut faire des expérimentations personnelles, mais il est bien évident qu'il faut s'adresser au grand public, au plus vaste public possible ». Mathieu Gagnon d'ajouter : « avoir une pratique artistique, ce n'est pas juste pour soi; l'art, c'est communiquer avec et pour les autres ».
Pierre Javaux, lui, souhaite qu'on réussisse à développer une cinématographie régionale comme le cinéaste Sébastien Pilote (réalisateur des films « Le Vendeur » et « Le Démantèlement ») a réussi à le faire au Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Faire connaître notre cinéma
Ils saluent tous l'arrivée du Festival Cinéma du monde de Sherbrooke : « C'est super positif, c'est certain », répondent-ils en choeur. « Et fallait qu'il y ait des films d'ici, glisse Nadia Fortin. C'est l'occasion de rencontrer les réalisateurs et les artisans des films d'ici et aussi, avoir accès à des films d'ailleurs, rencontrer des artisans et cinéastes d'ailleurs. Venez nous voir, venez voir nos films », lance-t-elle.
Pourtant, plusieurs événements existent à Sherbrooke pour présenter la production locale : la Cuvée artistique, les soirées Kino dont on parle de faire revivre sous un autre nom, les Ciné-rencontres qui organisent des classes de maître avec divers artisans du cinéma québécois, les soirées Te Koa, etc. La Course des régions a conclu une entente avec les cinémas Cartier à Québec et du Parc à Montréal pour qu'ils projettent des courts métrages produits par la Course en première partie du film principal présenté.
Mais qui a vu les films de ces quatre vidéastes? Plusieurs pensent que la solution est de mettre ces oeuvres sur le web. « Avec le numérique, tout est possible », dit Pierre Javaux. Mais pour d'autres, mettre leurs films en ligne les empêche de participer à des festivals qui exigent souvent l'exclusivité.
Ils espèrent tous que ça débloque. Ils souhaitent que leurs films remportent des prix dans des festivals pour se faire connaître. Que leurs courts métrages deviennent leur carte de visite et servent à convaincre les institutions pour en faire d'autres. Car ce ne sont pas les projets qui manquent.
Pierre Javaux travaille avec Mathieu Gagnon à un projet de long métrage sur la vraie histoire des trois Rois mages; Mathieu travaille à un autre projet de long métrage intitulé « La plaie ». Nadia sera de la prochaine Cuvée artistique de Sherbrooke en septembre prochain : « je fais du cinéma par passion, par choix : je ferais ça à longueur de semaine », dit-elle. Mais la compétition est nombreuse et féroce. « Beaucoup d'appelés, mais peu d'élus », conclut Pierre Javaux.
On peut visionner certaines vidéos de ces créateurs sur le web : les oeuvres de Manuel Chavarin sur Vimeo, celles de Mathieu à gardeavueproduction.com et celles de Nadia Fortin, sur Facebook.