On vit dans un drôle d'univers.
Nous avons toutes les ressources voulues pour obtenir des réponses à nos questions. Il suffit de chercher un peu. Vous voulez savoir si le côlon de l'humain a été pensé pour ingérer de la viande? Il y a une étude là-dessus. Vous vous demandez si l'absorption d'une quantité X de canneberges peut vaincre des cellules cancéreuses? Il y a quelque chose là-dessus aussi.
Des recherches fondamentales et/ou appliquées, il y en a partout, tout le temps. Elles sont accrochées quelque part dans la grande Toile, il suffit de les repérer et, en un clic, bien voilà, tout est là.
Il y a un par contre, par contre...
Une étude ne devrait jamais être prise individuellement. La science est ainsi faite qu'elle regarde un aspect précis et pousse les observations dans un angle défini.
Ça se complique un brin.
Quand on consulte une étude, il faut d'abord savoir qui la commande ou la commandite. Ça en dit long sur l'angle exploité. Ensuite, il faut s'attarder un tant soit peu à l'objectif de la recherche. Et, comme la science est une étrange bête qui trouve sa crédibilité dans les constats et contre-constats, il faut, idéalement, poursuivre nos recherches pour dénicher une autre recherche qui prendrait le même problème, mais d'un autre angle.
Dit autrement, une étude n'est jamais la Vérité tant recherchée.
La science est bâtie de façon à aiguiser notre esprit critique. Et c'est bien ainsi. C'est bien, mais un peu obsolète de nos jours, il me semble.
J'entends par « de nos jours » ces jours où la vitesse et la performance commandent une compréhension instantanée. Le problème, c'est qu'une compréhension instantanée, ça devient souvent une opinion bien plus qu'une compréhension.
Oui, mais voilà, c'est génial, c'est de ça qu'on a besoin, de nos jours. Une opinion!
Par « de nos jours », j'entends donc cette importance capitale d'avoir une opinion sur tout et de pouvoir la livrer - voire la matraquer - à quiconque ose se mettre en travers du chemin de notre pensée bienveillante.
Par « de nos jours », j'entends aussi la création incroyablement fertile de ce que j'appelle des « petites sectes ».
Une petite secte, c'est un regroupement de gens qui se confortent entre eux autour d'une opinion sur laquelle ils poussent pour lui donner un aspect de Vérité. Oui, oui, avec un grand V.
S'ils réussissent à regrouper assez de personnes, l'opinion devient une croyance.
C'est là que je décroche.
Le végétalien qui se permet, du coup, de juger tout et chacun autour, de le regarder de haut parce l'autre n'a pas encore adhéré à la Vérité.
Même chose pour les groupes de jeunes mamans qui s'entraînent au point de montrer des photos de leur « six-pack » d'abdos à huit mois de grossesse et qui se valorisent en démontrant qu'elles ont repris leur poids initial avant de sortir de l'hôpital. Et qui, du coup, se hissent au-dessus des autres, fières représentantes d'un groupe ayant réussi leur grossesse.
Et j'exagère à peine. Malheureusement.
Nous vivons dans un « de nos jours » où les croyances sont multipliées en micro-secteurs, mais avec les mêmes paramètres d'exclusion ou d'inclusion qui ont caractérisé les mouvements religieux au fil de l'histoire.
Étrange, ce besoin d'appartenir à une micro-collectivité et de se faire croire qu'on navigue dans la Vérité.
Le besoin de se rassembler et de ressembler à ses semblables est puissant.
Et c'est là tout le risque inhérent aux médias sociaux qui favorisent, par le choix de nos « amis », le nombrilisme d'une pensée commune.
Dans un temps de notre grande histoire où l'acceptation de la différence et l'ouverture à autrui sont plus que nécessaires, il y a cette tendance à se réfugier dans des genres de microsociétés fermées.
Il doit y avoir une étude là-dessus, quelque part.
Clin d'œil de la semaine
Le besoin de se rassembler avec ceux qui nous ressemblent est puissant : même les religieuses cloîtrées qui choisissent une vie de méditation et de prière le font en gang...