J'étais invitée le week-end dernier à une fête d'enfants. Un anniversaire de princesse tout en rose et bleu - Reine des neiges oblige - avec cupcakes, ballons et trompettes. Arrivée tôt pour aider aux préparatifs - c'est fou ce que l'organisation de cette petite célébration peut engendrer comme surcharge de travail... mais ça c'est un autre sujet - j'étais aux premières loges lors de l'arrivée des invités.
- Ohhhhh! Ce qu'elle a grandi le petit bébé à mamie! Allez, viens ici donner un bisou à mamie.
La petite recule d'un pas et se cache derrière les jambes de son papa. C'est qu'il y a déjà quelques mois qu'elle n'a pas vu grand-maman. Une éternité pour la gamine.
J'ai capté le regard anxieux de la petite et j'ai reconnecté avec cette émotion trop souvent ressentie lors de mon enfance. Allez, soyez honnête. Qui n'a pas été forcé de faire la bise à une parenté lointaine et inconnue?
On oublie trop souvent que faire la bise est une marque d'affection que l'on réserve aux personnes avec qui on entretient une relation chaleureuse et privilégiée. Malheureusement, au nom de la politesse, on l'impose trop souvent aux enfants.
Le bisou ne devrait jamais être un geste obligé. Les enfants ont le droit de refuser toute forme de rapprochements physiques. C'est une question de respect de la personne, de son intimité et de son intégrité physique. Je crois que ça va dans le sens de l'éducation sexuelle que l'on souhaite inculquer à son enfant, soit l'importance d'imposer ses limites quand il s'agit d'un contact physique. N'oublions pas que chaque personne, bébé, enfant ou adulte possède sa propre zone de confort. Ne cherche-t-on pas toute sa vie à protéger sa bulle et à respecter la bulle de l'autre?
Protéger la bulle de son enfant
Tant qu'il ne possède pas les mots et les outils pour imposer le respect de sa personne, cette responsabilité incombe aux parents. Il suffit d'observer son enfant pour déceler son inconfort. En effet, celui-ci exprime son malaise en pleurant, en grimaçant, en poussant ou en se débattant.
Pour éviter les malentendus, il peut être sage de prendre les devants et d'informer la famille et l'entourage que vous souhaitez qu'on vous demande la permission avant d'embrasser bébé ou de le prendre dans vos bras. Et pour tous ceux qui voudront, ou pas, l'entendre, qu'on se le dise une fois pour toute : ne touche pas bébé qui veut.
Les enfants, mais les bébés encore plus, attirent les bisous comme le miel attire les abeilles. J'ai souvent entendu des histoires de parents qui ont croisé des étrangers qui, sans crier gare, se sont approchés de leur bébé pour lui toucher la figure. Certains ont même osé lui accoler un bisou. HORREUR! Comme si les enfants étaient des objets publics. Peut-on prémunir nos enfants de cette agression? On aura beau promener bébé en portage ou couvrir la poussette, rien ne semble arrêter les impulsions de bécotage alors imposez votre bulle afin de protéger l'intimité et l'intégrité physique de bébé.
Pour les bambins qui n'apprécient pas les rapprochements, il est du devoir du parent de se faire le porte-voix de l'enfant et de formuler un refus en son nom : « Non, je crois que Juliette ne veut pas de bisou avant de partir! ». Si l'enfant est capable de manifester ce désaccord, il est d'une importance capitale de respecter ce choix. N'insistez jamais pour faire plaisir ou pour ne pas déplaire.
J'en conviens, la situation peut être embarrassante. Toutefois, le refus de bisou n'entraine pas un lâchez-prise sur la politesse. Celle-ci est essentielle et incontournable. Toutefois, la politesse peut s'exprimer de différentes façons.
Une dernière mise en garde : évitez à votre enfant et à vous-même toutes tentatives de culpabilisation : « AH, matante est déçue!... Je t'aime pu.... C'est pas ben ben poli! ...Comment t'élève tes enfants? » Non, c'est NON.
En agissant ainsi, vous participez à la construction de l'estime et de la confiance en soi de votre enfant. C'est un cadeau que de lui enseigner à refuser les accolades et les bisous dans une situation qui ne lui plait pas, par des gens qu'il ne connait peu ou pas. Voilà une démarche respectueuse et pleine de sens que de lui apprendre à se respecter et savoir se faire respecter. N'est-ce pas ce que nous voulons tous pour nos enfants?
Et lorsque l'enfant est enthousiaste et volontaire? Merveilleux! En ces temps difficiles, tout le monde a besoin d'un peu d'amour et de tendresse.
Jacinthe Camirand
Intervenante postnatale au centre de ressources périnatales
Naissance Renaissance Estrie