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  CHRONIQUEURS / Deux mots à vous dire

Amazon : entre temps, pouvoir et conséquences

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Photo : Pexels: Karolina Grabowska
François Fouquet Par François Fouquet
Lundi le 27 janvier 2025

Sur les médias sociaux, des vidéos nous arrivent de partout. Les plateformes comme TikTok et Facebook en véhiculent beaucoup. Certaines démontrent des astuces intéressantes. La plupart sont des coquilles vides.

Parmi les vidéos qu'on prétend astucieuses, il y a celles de ces gens qui se fabriquent des boîtes destinées à recevoir de façon sécuritaire les colis livrés, entre autres, par Amazon. Une de ces vidéos mise sur une surface de miroir pour déjouer le coup d'œil du passant et éviter que celui-ci ne dérobe un paquet laissé à l'abandon sur le balcon.

Ingénieux, quand même.

Mais quelque chose me rendait dubitatif. Ma réflexion se résume en trois mots : temps, pouvoir et conséquences.

Amazon a d'abord misé sur le temps. Leur slogan pourrait être Le temps d'y penser et ce sera livré. Cette obsession du temps sauvé n'est pas anodine. Le temps est le grand influenceur de nos vies. On manque résolument de temps. Pour sauver du temps, on est prêt à investir. Et plus on investit dans les bébelles pour sauver du temps, moins on en a !

Le vice est là. C'est sûrement ce vice qui a inspiré le sourire du logo d'Amazon.

Les dirigeants ont compris ce vice du temps qui nous gruge. Et il en profite à plein !

On sait que plus il y a de temps entre le moment où on se dit qu'on veut acheter quelque chose et le moment où on l'achète, plus il y a de chances qu'on abandonne le projet. Le « besoin », qui est criant aujourd'hui, criera bien moins fort si on se dit seulement : « Je vais y penser et je l'achèterai dans quelques jours ». Il y a même de bonnes chances que le besoin n'en soit plus un. Amazon l'a compris et nous pousse à appuyer sur le bouton « commander » avant de réfléchir.

Quand des phrases justificatives du type « Je ne vais pas perdre deux jours à chercher, tout est là en quelques clics ! Puis il n'y a jamais rien dans les commerces ! » ou encore « il n'y a aucun autre moyen d'en obtenir autrement ! », hey, bien, là, précisément, je constate que le piège Amazon s'est bien refermé sur nous.

Puis, il y a la notion du pouvoir.

 

Amazon nous a déjoués avec la notion de temps. On ne magasine plus. On ne s'informe plus. On achète. C'est le but ultime d'Amazon. 

Mais pour être bien sûre que l'hameçon du temps sauvé sera suffisante, la compagnie Amazon joue de psychologie : elle sait très bien que le fait que mon clic (mon achat) déclenchera une série d'actions qui se bousculeront pour me servir, ça procure un sentiment de pouvoir agréable. "Peu importe ton revenu, dis-toi que, maintenant, tu es important !"

Et en spécifiant que si tu deviens un client Prime, tu deviens presque un super héros de la consommation, la compagnie vient nous attacher, réduisant presque à néant notre capacité de réfléchir.

Puis, il y a les conséquences.

Une fois ce nuage de glorieuse vapeur passé, il reste des conséquences. J'achète de qui, au juste ? Comment se déroulera le service à la clientèle ? Qui et (surtout) comment seront gérées les commandes que je vais retourner ?

Il est bien documenté que c'est une catastrophe à ce niveau. La compagnie préfère rembourser et même jeter les items plutôt que de gérer des retours, dans bien des cas. La responsabilité sociale, c'est une dépense. Les dépenses diminuent les profits.

Amazon est une sorte de grand vacuum dont la succion est rotative. La rotation du vacuum fait sortir du giron, ce qui est une dépense. Puis, la force centrifuge du vacuum siphonne tous les revenus vers la case profits.

Quand Amazon décide du jour au lendemain de fermer ses installations au Québec, c'est qu'il y a une opportunité de faire plus de profits. Rien d'autre. Après tout, les conditions salariales et les responsabilités d'employeur sont considérées comme des dépenses.

Quand une entreprise est capable de dicter elle-même toutes les règles du marché, c'est qu'il y a un déséquilibre dans ce marché. C'est ce qu'on vit présentement.

Revenons à la mise en marché d'Amazon : maintenant qu'elle nous tient avec la notion du temps sauvé et du pouvoir qu'on ressent, elle en ajoute une solide couche. Après tout, comme disait l'autre : trop fort, casse pas ! Comme le propriétaire Jeff Bezos est multimilliardaire, il se paie l'accès privilégié au bureau de Trump et verra à encore diminuer les réglementations en matière d'éthique commerciale, sociale et environnementale.

Rien de tout ça ne sera avantageux pour la collectivité. La collectivité représente une dépense, après tout.

Mais Bezos fait le pari que le gain en temps et le pouvoir qu'il offre au client l'empêcheront de réfléchir.

Ça semble bien fonctionner pour le moment.

Clin d'œil de la semaine

-       J'ai acheté plein de vêtements sur Amazon.

-       Et si ça ne convient pas ?

Bof, à ce prix-là, je les donnerai à une friperie. D'ailleurs, la ville devrait faire des collectes pour aller déposer des trucs aux friperies. Ça bouffe du temps, ça ! 

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