Dimanche matin, un certain Carl D. Haugen III, CdO, HsD, gratifiait ma boîte de courriel publique d'un probable pourriel écrit de façon fort courtoise où il m'annonçait le lancement de Cyberbackup, une solution d'archivage pour les nuls. Après m'être assuré que mon système de restauration était à jour, j'ai cliqué sur le lien suggéré - j'étais intrigué - et je suis arrivé sur la page d'accueil de Cyberlab, un site apparemment protégé par McAfee Secure où on offre la possibilité d'acquérir trois produits beaux bons pas chers : Spyzooka, un antiespiogiciel, Regzooka, un réparateur de registre et Cyberbackup, le nouveau produit.
Or, en regardant les prises d'écran offertes en animation, j'ai cru percevoir une sorte de départ débutant d'un commencement de gestation d'une allure semblable à celle des épouvanticiels dont on parlait ici même jeudi dernier. Fait que, j'ai tapé « Carl D. Haugen III, CdO, HsD » dans Google.
D'abord, je suis tombé sur des pages de références menant à des sites où on ânonnait bêtement les bienfaits de Cyberlab. C'est de plus en plus comme ça sur le Web; plus personne ne prend le temps, faute de revenus, de vérifier la crédibilité des infos que l'on publie. On repique les communiqués de presse.
Même des sites de téléchargement que j'ai vérifiés tels Tucows ou 5Star accordent à Spyzooka la cote la plus élevée. Par contre, SourceForge estimait que Cyberlab était un logiciel spécifique aux amplificateurs Fender.
Fait à signaler, dans le cas de Tucows qui n'est pas le premier site venu, les commentaires des utilisateurs M'ont semblés essentiellement négatifs. Les seuls positifs me sont apparus nirvanesques, à croire qu'ils émanaient de ces agences spécialisées dans la production de soi-disant témoignages de consommateurs.
Puis, sur le site de Cyberlab, j'ai lu quelques témoignages favorables dont celui d'un certain Crawford Asbell, responsable des TI pour le comté de Lincoln en Georgie. J'ai vérifié et ce fonctionnaire heureux existait bel et bien. Reste à voir pourquoi un cadre gouvernemental, tout américain soit-il, a le droit de s'associer à une manœuvre marketing ? Étrange !
D'autres pages Web mielleuses sont apparues garantissant que Cyberlab n'était pas une arnaque, mais un truc très sérieux, un ensemble de produits que l'on devrait essayer. J'ai même trouvé un site spécialisé dans les orgasmes mâles, (jemm.info) qui vantait le sérieux de Cyberlab. Hum ! Si les logiciels de Cyberlab sont de vrais produits bons pour la santé de nos PC sous Windows, pourquoi faut-il des sites, parfois sortis de nulle part, pour affirmer qu'il ne s'agit pas de programmes malveillants ?
Orgasmes ? Courriel-pourriel dans ma boîte aux lettres ? Témoignages négatifs ? Intrigant ! J'ai donc poursuivi mon écorniflage et j'ai ouvert plusieurs pages, de type plus personnalisées c'est-à-dire moins copiées-collées, où l'on accordait à Cyberlab le Bon Dieu sans confession. C'est le cas, par exemple, de PRWeb, une patente marketing qui mettait à contribution ce bon monsieur Haugen, troisième du nom, pour nous parler de la menace des produits malveillants, dont Total PC Defender. à en croire ce site, le gars serait un expert crédible.
Sauf qu'un détail a alors attiré mon attention et a titillé ma méfiance. PRWeb (comme plusieurs autres) présentait Haugen comme étant le P.D.G. de BluePenguin Software et non pas de Cyberlab. Je suis ainsi retourné dans Google, ce qui m'a permis d'apprendre que ladite BluePenguin, une boîte de la région de Seattle, avait été placée sur le banc d'infamie par le BBB (Beter Business Bureau) et qu'elle était soupçonnée de malhonnêteté et de méchancetés assorties.
La persévérance étant une vertu gratifiante, j'ai ensuite découvert des articles, dont celui-ci de WOT où on démontrait que BluePenguin et Cyberlab étaient une seule et même entreprise. Cela m'est apparu crédible à plus forte raison que dans Google, j'ai pu constater que des Cyberlab, des honnêtes ceux-là, il y en avait des tas de par le monde, dont celle-ci, celle-ci, celle-ci et celle-ci.
Wot ajoutait même que Cyberlab fabriquait des produits destinés à arnaquer les gens.
Autrement dit, le monsieur qui avait signé mon quasi-pourriel était le patron d'une société dont les pratiques déplorables avaient été pointées du doigt, notamment par le BBB, une société qui portait un nom incroyablement répandu à travers la planète, le même nom du reste qu'une firme de la Virginie apparemment crédible qui fait dans le criminalistique informatique (computer forensic).
Embêtant tout cela. C'est qu'il y a deux façons de considérer la Cyberlab du sieur Haugen. Si on est devenu parano à force de voir la crosse devenir normalisée sur la Toile, on peut croire, à partir de quelques indices, que les trois produits de cette entreprise sont des saletés conçues pour nous leurrer. Par contre, si on est plus positif et qu'on n'associe pas nécessairement mensonge et marketing. on peut croire qu'il s'agit de produits comme d'autres, des produits qui peuvent parfois convenir, incluant dans le comté de Lincoln en Georgie.
Dans le premier cas, on en arrive à admettre que l'arnaque est devenue subtile, en tout cas qu'elle s'arrange pour sembler l'être. Cyberlab, celle de Haugen, n'est-elle pas une boîte à odeur de soufre (malgré les numéros de téléphone et la mention d'une campagne publicitaire télévisée annoncés sur la page d'accueil), une entreprise réputée malveillante par certains, dont le P.D.G., un adepte forcené du marketing en ligne, prétend guerroyer contre les logiciels arnaqueurs et les épouvanticiels ? Dans l'autre, on en arrive à déplorer que la Toile n'est plus qu'un méga souk où tout est possible sous le grand parapluie du commerce. Tucows n'a-t-elle pas accordé cinq vaches à Cyberlab ?
Je ne dis pas que cette boîte est une trappe à naïfs, je dis que des paranoïaques, des cyniques et des sceptiques pourront le croire. Je ne dis pas non plus qu'on y fabrique de bons produits. Les bons produits ne s'annoncent pas par quasi-pourriels et leur fabricants ne son pas dénoncés par le BBB.
Je dis simplement qu'on ne peut plus se fier à personne. C'est rendu de même ! Pauvre de nous !
-
Nelson Dumais - www.nelsondumais.com