J'aime dépenser. Surtout pour mes filles. J'aime dépenser. Lorsque je vois quelque chose qui pourrait potentiellement leur plaire, difficile pour moi d'y résister. Pour leur faire plaisir. Parce que j'ai le goût de les gâter. Par habitude de surconsommation. Je suis fautive. Je le sais. Est-ce que je change? Non. Pourtant il le faudrait. La réalité est que les bacs à jouets débordent. La garde-robe aussi. Est-ce que je ralentis pour autant le chick-à-chick de ma carte? Non. Pourtant il le faudrait. Est-ce pour combler un vide ce besoin de tout vouloir acheter? Est-ce par peur qu'elles soient pointées du doigt, car elles ne possèdent pas la dernière bébelle en vente sur le marché? Et justement si elles ne l'avaient pas, serait-ce si grave que ça docteur? Non.
Il y a environ un mois, la honte m'a rendu visite. Comme une vieille tante qui sent trop fort le parfum et qui met son rouge à lèvres tout croche et que l'on n'a pas le goût de recevoir souvent souvent... C'était l'anniversaire de Charmante, ma plus jeune. Une amie me téléphone et me demande ce que la puce aimerait recevoir pour sa fête. Je lui dis que je lui fais confiance, qu'elle a bon goût, qu'elle n'est pas obligée, que son unique présence sera reçue « comme un cadeau », mais elle insiste. Pour être gentille et efficace, elle me téléphone en direct du fameux magasin de jouets. Et pour être doublement gentille et efficace, elle se met à me proposer des trucs susceptibles de plaire à la fêtée. À la première proposition je lui dis, « Oooh désolé, elle l'a déjà reçu Noël dernier ». Elle me répond « Bah! C'est pas grave, j'avais aussi pensé à ce truc-là ». Silence au bout du fil. Petit rire nerveux. Je réponds « je lui ai acheté la semaine dernière ». Mon amie extrêmement compréhensive me dit « Ahaha! Si moi aussi j'avais une fille, je lui aurais acheté! Alors, autre suggestion, que penses-tu de cela »? Je veux mourir. Est-ce que je prends le risque de lui dire la vérité? Je réponds, du bout des lèvres vous savez, quoi. C'est à ce moment-là que mon amie doublement gentille et efficace finit par me dire « laisse faire je vais me débrouiller » et elle raccroche. Pendue au combiné j'étais ensevelie, comme sous une pile de manteaux de fourrure de matantes, sous une montagne de honte.
Le plus drôle, et ce n'est pas si drôle que ça, Charmante a reçu trois fois le même jouet. Et parmi le trio, figurait celui de mon amie.
Aies-je besoin de spécifier que j'appréhende le temps des fêtes?
Chick-à-Chick