Le Conseil régional de l'environnement de l'Estrie (CREE) tient à réagir à la résolution entérinée lundi soir par les élus de la Ville de Richmond qui demande au Gouvernement du Québec un moratoire pour cesser la fluoration de son eau potable sans pénalité financière.
Le CREE joint sa voix à celle du Regroupement de citoyens pour une eau saine de Richmond et la Ville de Richmond dans leur démarche. Le CREE demande également au Gouvernement du Québec de ne plus promouvoir d'aucune façon la fluoration de l'eau par les usines de traitement d'eau des municipalités et rappelle qu'il s'est engagé dans son programme à modifier la loi pour interdire la fluoration de l'eau.
Historique
La Ville de Richmond ajoute du fluor à son eau potable depuis janvier 2010, suite à une décision du Conseil municipal remontant à 2009. À ce moment, cette décision du conseil reposait sur la recommandation du directeur national de la santé publique qui recommandait à des fins de santé buccodentaire l'instauration immédiate de la fluoration de l'eau potable dans l'ensemble du Québec. D'ailleurs, l'argumentaire du ministère pesait lourd puisqu'il s'engageait à payer aux municipalités l'ensemble des dépenses liées à l'installation des équipements. Toutefois, les villes sont liées par un contrat qui les oblige si elles désirent se retirer du programme sans « raison valable » à devoir rembourser au ministère en intégralité les subventions accordées. Par conséquent, la Ville de Richmond est aujourd'hui prise en otage puisque le Ministère de la Santé publique souhaite récupérer 80% de l'aide financière accordée (260 000 $) pour les infrastructures et l'achat des produits ayant servi à la fluoration. La question posée par le conseil municipal de Richmond est donc légitime : pouvons-nous forcer une municipalité à appliquer une mesure que le gouvernement entend abolir?
Une responsabilisation collective s'impose
Dans ce dossier, le CREE plaide pour une responsabilisation collective des acteurs concernés. Les municipalités devraient, en acceptant d'aller de l'avant avec un programme tel celui de fluoration de l'eau potable, informer et consulter au préalable leurs citoyens afin d'éviter de pareil revirement. En retour, les municipalités n'ont pas toutes les ressources ni les compétences pour se prononcer sur l'ensemble des dossiers. Un enjeu comme la fluoration de l'eau potable est davantage d'ordre national que local. Par conséquent, le Gouvernement doit s'assurer que les décisions qu'il prend soient éclairées et fassent l'objet d'un règlement ou d'une loi et qu'elles permettent d'éviter d'avoir à débattre de la justesse de celles-ci dans chacune des municipalités du Québec.
Coûts économiques, sociaux et environnementaux
Des pays d'un peu partout sur la planète et des groupes sociaux et environnementaux de tous azimuts s'opposent à la fluoration artificielle de l'eau potable. 98% des pays de l'Europe l'ont bannie. Les raisons de ce bannissement sont nombreuses. Il peut être mentionné entre autres que la mesure coûte extrêmement cher, qu'elle est peu efficace et que ses impacts sur la santé et les écosystèmes sont mal connus. Au Québec, malgré la subvention qui couvre le coût des infrastructures pour les municipalités, une grande partie du coût de fonctionnement doit être assumée par ces dernières. De plus, l'ajout de produits chimiques dans l'eau potable par le biais des usines de filtration nécessite de prendre des mesures de sécurité spécifiques à sa manipulation et son entreposage, ce qui constitue un risque potentiel pour la santé des travailleurs de l'usine. De plus d'après Réseau environnement, il n'existe aucune étude qui permet de connaître l'impact de la fluoration sur les écosystèmes et que par conséquent l'ajout d'une charge polluante supplémentaire ne devrait se faire que si cela a été analysé méticuleusement au préalable. Enfin, seulement 1% de l'eau potable est utilisé à des fins de consommation humaine ce qui rend très peu efficace et vraiment couteux l'utilisation du réseau d'eau potable pour une mesure de santé publique.
Des alternatives à la fluoration de l'eau
Tel que mentionné tout au long du communiqué, le CREE à l'instar de groupes comme Réseau environnement, ne s'oppose pas à l'utilisation du fluor pour la prévention de la carie dentaire, mais souhaite que ce dernier ne soit pas véhiculé par l'eau potable municipale. L'argent économisé par le bannissement de la fluoration de l'eau nous permettrait de promouvoir d'autres moyens comme la sensibilisation et l'éducation relative à une hygiène buccale adéquate et à une saine alimentation visant, entre autres, la réduction de la consommation de certains produits sucrés. Bref, il existe une panoplie d'actions plus efficaces que la fluoration artificielle de l'eau permettant de lutter contre la carie dentaire.
Source : Antoni Daigle, adjoint aux communications et partenariats du Conseil régional de l'environnement de l'Estrie