Vous vouliez changer de résidence, vous en avez visité une en février 2012 et vous avez signé le contrat d'achat en avril 2012.
Vous êtes dans le domaine de la construction depuis une dizaine d'années, vous avez visité l'immeuble en février avec un ami durant une trentaine de minutes.
Vous déposez une promesse d'achat qui est suivie d'une contre-proposition que vous acceptez.
Il appert que cette contre-proposition est sujette à une inspection.
Il ressort du rapport de l'inspection au sujet du réservoir d'huile :
«502. Réservoir d'huile : Situé au garage. Examen limité en raison de la présence d'objets ménagers et/ou personnels. (...) L'âge du réservoir d'huile n'est pas indiqué. Odeur d'huile détectée et signes de fuite d'huile visibles au sol près la fournaise. Cette situation est considérée dangereuse et requiert une attention immédiate. Nous recommandons de consulter un entrepreneur licencié en chauffage afin d'évaluer/corriger ceci et de s'assurer qu'il n'y a pas de contamination de sol (...)
Rouille observée sur cet appareil, une vérification par un entrepreneur licencié est recommandé (sic) afin d'en s'assurer le fonctionnement adéquat et sécuritaire. (...).
Vous n'avez pas donné suite à la recommandation orale de l'inspecteur.
Un an plus tard, vous décidez de vendre votre nouvelle maison.
Lors d'un examen préachat du nouvel acquéreur, l'inspecteur constate la présence de deux tuyaux sortants du sol, qui sont rattachés au mur de la résidence. L'inspecteur soupçonne la présence souterraine d'un réservoir de mazout.
Vous décidez de creuser vous-même et en effet vous découvrez la présence d'un réservoir.
Vous avez contacté un avocat pour vous informer de vos droits. Ce dernier avait fait parvenir à votre vendeur un avis de dénonciation lui faisant le récit des faits, le sommant de le contacter afin de convenir d'un rendez-vous, de retenir les services d'un expert et qu'à défaut, les travaux requis seraient effectués sans autre avis.
Vous faites venir un expert qui effectue la décontamination pour la modique somme de 79 292,98 $.
Vos vendeurs ne font rien. Il ressort qu'au moment de l'achat en 2012, vos vendeurs avaient signé une déclaration dans laquelle ils affirmaient «... qu'à leur connaissance, la propriété n'a jamais fait l'objet de déversements de liquide au sous-sol tel que de l'huile ou du mazout et qu'il n'y a pas de réservoir souterrain.»
Avez-vous un bon recours contre votre vendeur?
Dans l'arrêt Laquerre c. Joseph (note 1), le tribunal comme dans tous les cas de vices cachés, fait état des conditions nécessaires pour conclure à leur existence. C'est ainsi que le vice doit être caché, suffisamment grave, inconnu de l'acheteur et antérieur à la vente.
De son côté, l'acheteur doit être prudent et diligent quand il visite l'immeuble et le juge rappelle :
«La possibilité de découvrir un vice, en raison des indices présents, suffit pour qu'il ne soit pas caché.»
Évidemment, les vendeurs invoquent la présence extérieure des tuyaux et les recommandations de l'inspecteur. Pour la juge, les acheteurs :
«... n'ont pas fait preuve de prudence et de diligence en choisissant de ne pas faire effectuer l'inspection visuelle extérieure complémentaire de la propriété recommandée...»
Cependant, la juge écrira :
«La preuve administrée ne permet pas au tribunal de conclure qu'il est probable et non seulement possible, que la présence des tuyaux aurait été notée par l'inspecteur et l'aurait mené à recommander un examen plus poussé.»
Nonobstant les propos de l'acheteur voulant que l'inspecteur lui ait déclaré que normalement, la présence de tuyaux extérieurs entraîne la présence d'un réservoir, la juge affirmera :
Le tribunal est d'avis que cette preuve est insuffisante pour établir les règles de l'art suivies en matière d'inspection préachat et démontrer de manière prépondérante, qu'une inspection complémentaire de la propriété aurait permis à l'inspecteur des Acheteurs de constater la présence des deux tuyaux sortant du sol...»
Le tribunal conclut donc :
«... que la contamination du sol constitue un vice caché... puisqu'il n'a pas été démontré, de manière prépondérante, que cette contamination était apparente en raison des tuyaux extérieurs.»
et les défendeurs sont condamnés à payer les frais de décontamination au montant de 79 292,92 $.
Il faut retenir de cette décision que la preuve est la base de tout recours et que de son interprétation, dépend le résultat obtenu.
Cette décision a cependant fait l'objet d'un appel à la Cour d'appel du Québec; il est donc possible que ce jugement soit renversé, à suivre (dossier en appel 500-09-025894-163).
Au plaisir.
Me Michel Joncas